Privilèges politiques, riches à 5 millions, Gaza et réseau unique: vieilles idées et nouveautés du programme du PTB
Le PTB a adopté son programme pour les élections de 2024. Le PTB veut taxer les grosses fortunes à partir de cinq millions d’euros, diviser les indemnités des politiques, sanctionner Israel. Il prône un réseau unique d’enseignement, mais pas en Flandre.
Le PTB, dimanche 10 mars, à Bruxelles, a été le dernier parti francophone à tenir son congrès programmatique en vue des élections régionales, fédérales et européennes du 9 juin prochain. Toutes les formations du pays ont donc adopté, souvent après des mois de débats, leur programme pour le grand scrutin. Entre les propositions que les partis mettront en avant, celles sur lesquelles ils seront discrets, celles qu’ils ont abandonnées depuis les élections de 2019, et celles qu’ils viennent d’inventer pour les élections de 2024, le Vif a fait le tri dans les milliers de pages des programmes des partis.
Le PTB, dimanche 10 mars, à Bruxelles, est le dernier parti francophone à avoir fait adopter son programme 2024. Celui-ci compte quatorze chapitres, mais le site de la formation de la gauche de la gauche affiche avant tout quatre priorités: la justice fiscale, le pouvoir d’achat, les privilèges politiques et le climat.
Ce qui est apparu: le génocide
Les deux paragraphes palestiniens d’un sous-chapitre «La paix au Moyen-Orient» de 2019 ont été promus au rang de chapitre propre, avec l’intitulé qui témoigne de ce que chacun sait: le PTB, dans le conflit israélo-palestinien, a choisi son camp depuis longtemps. La violence de la réponse israélienne aux attentats terroristes du 7 octobre dernier et l’émotion qu’elle suscite chez nous ont donc des répercussions sur la campagne du PTB. Sur les termes qu’il prononce, «Palestine: le génocide doit cesser», titre le nouveau chapitre. Et sur les mesures qu’il prône. Car si les appels au boycott figuraient au catalogue 2019, le PTB exige désormais aussi la reconnaissance immédiate de l’Etat palestinien et la traduction devant la justice internationale de «Netanyahou et le gouvernement israélien». Il condamne par ailleurs «l’amalgame entre antisémitisme et critique de la politique israélienne». Cette promotion symbolique et politique se complète d’un retrait, puisque les pays du Moyen-Orient (Iran, Irak, Syrie, etc.) qui avaient l’honneur de propositions en 2019, sont absents de la carte mondiale du PTB de 2024.
Ce qui a disparu: les riches à un million
La «justice fiscale» est la priorité des revendications 2024 du PTB, alors que la «fiscalité équitable», incluant évidemment la taxe sur les millionnaires, figurait au 24e chapitre du programme 2019. Mais cette promotion, ici aussi, se complète d’un retrait, celui des possesseurs d’un patrimoine compris entre un et cinq millions d’euros. Ils auraient été taxés par le PTB de 2019, qui voulait «instaurer une taxe des millionnaires sur les patrimoines nets dépassant un million d’euros». Ils ne seront pas ponctionnés par la «taxe des millionnaires» dans sa version de 2024 puisque celle-ci ne concerne plus que les détenteurs d’une fortune de cinq millions d’euros. «Nous introduisons une taxe des millionnaires de 2% sur les fortunes nettes supérieures à cinq millions d’euros (et de 3 % sur les fortunes supérieures à dix millions d’euros). De cette manière, nous taxons le 1% le plus riche de la population», commence le chapitre inaugural de 2024. Les riches sont toujours plus riches, mais ceux qui avaient un million en 2019 et qui n’en ont gagné que quatre jusqu’à aujourd’hui, eux, ne le sont plus. Ils ont réintégré la classe moyenne, donc le peuple.
La poursuite de cette quête lui aliénerait le puissant enseignement catholique.
Ce qui sera crié: l’argent en politique
Au PTB, le combat des prolétaires contre les bourgeois a été remplacé par la lutte du peuple contre les élites, où cohabitent le 1% des plus riches et l’establishment politique. Le 1% des plus riches sont concernés par la taxe des millionnaires. Pour les politiciens, le PTB veut, en 2024 comme en 2019, lutter contre «les privilèges politiques». Il réclame la suppression des indemnités de sortie des ministres et des parlementaires et la division par deux de leurs indemnités, division qu’il désire appliquer au financement des partis politiques (à travers un système de matching funds similaire à l’allemand, qui donne un euro d’argent public pour un euro de cotisation d’un militant). Le PTB veut également «limiter l’influence des cabinets» et les réduire à une équipe de quatre ou cinq collaborateurs, sur le modèle des pays du nord de l’Europe.
Ce qui sera murmuré: le réseau unique (en français)
Comme son concurrent socialiste en Belgique francophone, le PTB-PVDA inscrit, traditionnellement, à son programme la revendication d’un réseau unique d’enseignement. «A terme, nous travaillons à la mise en place d’un réseau unique public et pluraliste», lit-on au quatrième sous-chapitre, «Une place pour chaque élève», de la partie «Enseignement». Mais la mesure ne sera jamais mise en œuvre, ni même vraiment promue, car comme son concurrent socialiste en Belgique francophone, le PTB-PVDA y «travaille» en réalité très peu. La poursuite de cette quête lui aliénerait le puissant enseignement catholique et les 50% d’électeurs qui y scolarisent leurs enfants. A la différence de son concurrent socialiste en Belgique francophone, le PTB-PVDA est un parti national, censé présenter le même programme pour tous les Belges, dont ces Flamands qui, à 75%, envoient leurs enfants dans les écoles catholiques. Ce qui explique sans doute que la revendication du réseau unique ne figure pas dans le programme diffusé en néerlandais du PVDA-PTB…
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