Pourquoi MR et Engagés n’ont pas osé changer les vacances d’hiver en vacances de Noël, comme avant: «Ce ne sont pas des sujets très importants»
Série | Tous les tabous wallons ne sont pas tombés (5/10). Malgré les «coudées franches» du MR et des Engagés, et de très grosses campagnes de com’ sur la question, les nouveaux accords de gouvernements ne disent pas un mot du retour à la dénomination traditionnelle des congés scolaires.
Le contexte
«Faire tomber les tabous.» En présentant la Déclaration de politique régionale (DPR) et la Déclaration de politique communautaire (DPC), les deux formateurs/présidents de parti Georges-Louis Bouchez (MR) et Maxime Prévot (Les Engagés) ont rivalisé dans les déclarations ambitieuses. Les socialistes et les écologistes, battus, sont relégués dans l’opposition, et ne pourront pas les empêcher de mettre en œuvre un programme de réformes salué par tous les éditorialistes et auquel aspire une majorité de l’électorat francophone. Jamais le centre et la droite n’ont eu autant «les coudées franches» à la Région et à la Fédération Wallonie-Bruxelles. Pourtant, certains engagements (ré-)novateurs, beaucoup d’ambitions innovantes et quelques promesses de campagne disruptives ne devraient pas, à la lecture de la DPR et de la DPC, se réaliser. Voici les tabous que le MR et Les Engagés n’ont pas osé faire tomber.
Vacances d’hiver, de printemps, congé de détente et d’automne plutôt que vacances de Noël, vacances de Pâques, congés de Carnaval et de Toussaint sont depuis des décennies dans le calendrier scolaire.
Et c’était une grande crainte du MR, en 2013, au moment où la ministre Simonet (CDH) confirmait une inflexion prise dans les années 2000 sous Pierre Hazette (pourtant MR): les libéraux s’étaient opposés au changement de dénomination des congés scolaires, délestés de leur référence catholique. A l’époque, François Bertieaux était dans l’opposition et elle redoutait d’y voir l’amorce de dérogation pour des congés religieux non catholiques. Depuis, Françoise Bertieux est devenue ministre de l’Enseignement supérieur, et son parti est revenu au pouvoir en Fédération Wallonie-Bruxelles, mais en coalition avec deux des «cinquante nuances de gauche» qui l’empêchaient de pleinement réaliser ses ambitions réformatrices. Sinon, évidemment, on serait revenus à nos traditionnels congés. Plusieurs mandataires s’étaient manifestés, dans les médias, sur les réseaux sociaux et au parlement pour reintroduire les dénominations chrétiennes traditionnelles. Et ces sujets identitaires étant fort partagés sur les réseaux sociaux mais pas seulement, la revendication était même intégrée à cette campagne des «50 Nuances de gauche», avec le budget afférent.
Ariane de Lobkowicz, députée bruxelloise transfuge de DéFI, marquait d’ailleurs son passage d’un parti en pointe sur la laïcité à un parti en pointe sur la neutralité en diffusant durant la campagne un tract très échangé. Ce tract imprimé à plusieurs milliers d’exemplaires reprenait le visuel du parti contre ces «vacances d’hiver» qui nous interdiraient de se souhaiter Joyeux Noël. «Ai-je encore le droit, s’y demandait-elle, de dire que je suis contre ce néovocabulaire qui parle de personnes racisées, de personnes sexisées ou menstruées au lieu de femmes, de vacances de printemps au lieu de vacances de Pâques, de plaisirs d’hiver au lieu de Marché de Noël?» Les électeurs de sa communauté ont semblé considérer cette question comme importante, puisque près de six mille d’entre eux cochèrent son nom sur la liste.
«Je m’en fous!»
Ces six mille électeurs et cette députée ont, peut-être, été déçus à la lecture de la Déclaration de Politique communautaire: ni MR ni Engagés n’ont souhaité inscrire cette modification très populaire dans certains électorats, dans le programme de leur gouvernement.
Comme si tout ceci n’avait été qu’une campagne de com’.
Serait-ce possible?
Croisé au congrès de participation à Charleroi, samedi 13 juillet, le député wallon (il était le suppléant d’Adrien Dolimont) Nicolas Tzanetatos éclate en tout cas d’un rire surpris. «Je ne pense pas que ce sont ces détails qui vont changer la Wallonie et la Fédération Wallonie-Bruxelles…», dit-il. «Je ne pense pas que ce soient des sujets très importants. Tant qu’on ne met pas en prison les gens qui disent vacances de Noël ou de Pâques, je m’en fous», ajoute-t-il.
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