Vincent Van Quickenborne
Vincent Van Quickenborne © Belga

Pipigate de Van Quickenborne: « Hadja Lahbib non plus n’a pas dit la vérité, et elle est restée en place »

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Le « pipigate », l’incident qui a eu lieu lors de la fête d’anniversaire du ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne (Open VLD), continue à faire des vagues. Le bourgmestre de Courtrai risque-t-il d’y laisser sa peau?

Tout a commencé lors de la fête d’anniversaire de Vincent Van Quickenborne la nuit du 14 au 15 août. Durant cette fête organisée pour ses 50 ans, plusieurs invités ont uriné sur un combi de la police garé à côté de la villa du ministre, sous protection depuis plusieurs mois. Révélés dans la presse, ces faits, baptisés pipigate, ont suscité une vive polémique. Le ministre a répété à plusieurs reprises qu’il ignorait tout de ces comportements jusqu’à ce qu’ils sortent dans les médias.

Or, selon un article de la VRT, les images filmées par une caméra de surveillance laissent penser le contraire. Une interprétation « suggestive » démentie par Vincent Van Quickenborne. « Je n’ai quitté ma maison que lorsque le dernier invité est sorti vers 3h30 du matin, à l’arrivée de son taxi. C’était plusieurs heures après les incidents », a-t-il déclaré.

« Interprétations erronées« 

« J’ai ouvert et fermé le fourgon de police parce qu’il n’était pas correctement verrouillé », précise-t-il encore. « J’ai effectivement ri, regardé mon portable pour prendre un selfie et j’ai peut-être fait des gestes qui pourraient conduire à des interprétations erronées au vu de ce qui s’est passé quelques heures plus tôt, mais elles ne sont pas correctes », a-t-il poursuivi. Pour étayer ses dires, le ministre a décidé de montrer ses images privées à VTM.

Suite à l’incident, Kristien Van Vaerenbergh (N-VA) a décidé de réunir la commission de la Justice pour entendre les explications du ministre. La présidente de la commission a rappelé que Vincent Van Quickenborne bénéficiait d’une protection policière en raison des menaces qu’il a reçues de trafiquants de drogue. « Il s’agit de personnes qui, jour et nuit, assurent une protection et méritent le plus grand respect. La N-VA soutient la demande d’entendre le ministre en commission de la Justice. S’il apparaît qu’il a tenu des déclarations inexactes, il ne peut simplement plus rester en fonction », a-t-elle expliqué. Les Engagés, le Vlaams Belang et à leur suite le PTB ont également réclamé une convocation de la commission de la Justice.

Politologue à l’Université de Gand, Carl Devos n’est guère étonné par cette demande de la N-VA. « La N-VA est dans l’opposition face à Vivaldi, dont Vincent Van Quickenborne est l’un des principaux ministres. La N-VA souhaite aussi que l’Open VLD soit le plus petit possible, peut-être pour inclure ce parti dans un regroupement majeur de la droite en Flandre », déclare-t-il. La semaine dernière, le président de la N-VA Bart De Wever a en effet annoncé qu’il aspirait à rassembler les ailes droites du CD&V et de l’Open VLD pour créer un large parti conservateur en vue des prochaines élections.

« Hadja Lahbib non plus n’a pas dit la vérité« 

Le ministre risque-t-il sa place? « S’il a menti, il devrait démissionner, mais les mœurs politiques ont évolué à ce niveau« , déclare Carl Devos. En juin dernier, la ministre des Affaires étrangères Hadja Lahbib (MR) est en effet restée en place malgré des explications jugées peu convaincantes et changeantes autour de l’octroi de visas à une délégation iranienne.

« Hadja Lahbib non plus n’a pas dit la vérité, les partenaires de la coalition ne lui faisaient même plus confiance, et elle est tout de même restée en place », explique le politologue. Selon lui, sa démission aurait provoqué le départ du MR du gouvernement, « un prix trop élevé à payer pour les partenaires de la coalition ».

Le politologue ne s’attend pas à une répétition de l’affaire Sarah Schlitz. Pour rappel, en avril dernier, les révélations autour de l’utilisation du logo personnel de la secrétaire d’État à l’Egalité des Chances sur des communications publiques et ses explications erratiques au parlement ont entraîné sa démission du gouvernement.

Ici, le ministre n’a pas menti devant le Parlement, souligne Carl Devos. Du moins pas encore, car il doit se rendre au Parlement jeudi. « Un ministre ne doit jamais mentir, mais surtout pas au parlement. Il ne peut pas mentir en dehors du parlement non plus, mais en quelque sorte, c’est moins grave qu’un mensonge en dehors du parlement ».

Aussi le politologue estime-t-il que l’Open VLD ne laissera pas tomber son vice-Premier ministre. « Les autres partis veulent-ils attiser les tensions en forçant un homme fort de l’Open VLD à démissionner ? », s’interroge-t-il.  « A mon avis, non. Comme dans le cas de Lahbib et de Schiltz, on essaiera de nuire à la réputation de l’Open VLD et du ministre« .

En revanche, l’incident risque de porter atteinte aux relations du ministre avec les syndicats de police, déjà tendues avant l’incident. En novembre dernier, après le meurtre de Thomas Monjoie, les syndicats SLFP et SNPS demandaient déjà la démission du ministre de la Justice pour avoir menti selon eux sur la politique de tolérance zéro contre les brutalités policières. En outre, les syndicats sont en conflit ouvert avec le ministre en raison d’un projet d’accord sectoriel qu’il a refusé de signer.

Intimidation des syndicats de police

Aussi le ministre accuse-t-il le syndicat de la police d’avoir orchestré la fuite des images. « Une opération qui vise à me nuire est en cours de la part de certains syndicats de police qui ne peuvent accepter que l’on va mettre fin progressivement à leur régime de pension à partir de 58 ans. D’abord, avec mon ancien président de parti, Egbert Lachaert, on a essayé de nous intimider physiquement et maintenant ils s’en prennent à moi« , a affirmé le ministre sur les ondes de VTM.

Carl Devos partage son avis. « Cette relation est très tendue et très malsaine. La fuite de ces images n’est pas une coïncidence. Le syndicat de la police va également très loin dans ses actions et son combat politique contre un parti et un ministre. La police risque de devenir une partie trop impliquée », conclut-il.

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