Hadja Lahbib au soir des élections en juin dernier. Bientôt commissaire européenne? © BELGA

Les trois raisons qui ont conduit le MR à choisir Hadja Lahbib pour un poste de commissaire européenne

Clément Boileau
Clément Boileau Journaliste

En proposant l’ancienne journaliste pour ce poste prestigieux, le MR satisfait aux exigences de parité d’Ursula Von der Leyen. Tout en se délestant sans doute de trop grandes responsabilités au fédéral… et d’un potentiel rival au sein du parti.

Décidément, Hadja Lahbib peut tout faire. Après avoir été nommée à la surprise générale ministre des Affaires étrangères à l’été 2022, avoir été élue haut la main députée au parlement bruxellois en juin, avoir annoncé sa candidature en tant que tête de liste à Schaerbeek (ce qu’elle demeure par ailleurs), voilà l’ancienne journaliste propulsée par la MR à un éventuel poste de commissaire européenne.

Reste à franchir deux obstacles, et pas des moindres: l’acceptation de l’offre par le Conseil européen et l’attribution d’un portefeuille par la présidente de la Commission européenne tout juste reconduite Ursula Von der Leyen en vue de monter le futur collège de commissaires. Puis une audition face aux eurodéputés, qui approuvera — ou pas — cette candidature avant acceptation officielle par le Conseil européen.

Satisfaire au souhait de parité

En attendant, la libérale continuera de mener campagne à Schaerbeek, ainsi que l’a annoncé le président du MR Georges-Louis Bouchez. «Hadja restera Ministre des Affaires Étrangères et occupera la tête de liste communale à Schaerbeek afin de porter le projet libéral, comme elle avait prévu de le faire», a annoncé ce dernier, expliquant que «cette désignation traduit une volonté de féminisation et de renouveau tant au niveau du parti que des structures publiques». Une féminisation qui était aussi un souhait d’Ursula Von der Leyen afin de rendre aussi paritaire que possible le prochain collège. Question compétences, Georges-Louis Bouchez a également souligné le «brillant travail effectué par Hadja dans la gestion de la présidence de l’Union européenne par la Belgique», tout en saluant le candidat déchu à sa propre succession Didier Reynders, écarté au profit d’Hadja Lahbib.

Écarter Reynders

Celui-ci «reste et restera une figure marquante et importante de notre formation politique», a fait valoir Georges-Louis Bouchez, sans se prononcer sur la porte de sortie que le parti peut éventuellement offrir à Didier Reynders dans le futur. Ce dernier avait échoué voilà quelques semaines à rafler le secrétariat général du Conseil de l’Europe, ce qui l’avait précisément conduit à candidater à sa propre succession. En l’écartant au profit d’une personnalité qui lui doit — politiquement — tout, Georges-Louis Bouchez assoit un peu plus son emprise sur le parti, qui l’a par ailleurs réélu à sa tête (il était le seul candidat) avec près de 96 % des voix.

Se délester d’une trop grande responsabilité au fédéral

Enfin, la nomination éventuelle d’Hadja Lahbib au poste de commissaire est aussi, potentiellement, un coup stratégique pour alléger la charge de responsabilité des libéraux au sein d’un gouvernement de type «Arizona». En effet, pour un parti amené à entrer dans un gouvernement fédéral, l’obtention d’un portefeuille européen «coûte» cher auprès de partenaires qui, potentiellement, pouvaient être intéressés par le poste. Or, avant qu’il ne soit acté que le poste reviendrait de toute façon au MR, il se disait que Frank Vandenbroucke (Vooruit) était intéressé — même si celui-ci l’a toujours démenti. Vrai ou non, l’option Hadja Lahbib va de toute façon peser dans l’obtention de l’un ou l’autre poste ministériel au fédéral — l’équivalent, à la grosse louche, d’un vice-premier ministre.

Ce qui peut sembler paradoxal, de la part d’un parti qui, par la voix de Georges-Louis Bouchez, semble vouloir assumer un maximum de responsabilités. Mais les remous suscités par les dernières négociations au fédéral (qui reprennent cette semaine) ont montré que le parti libéral n’était pas prêt à tout assumer, surtout sur le plan fiscal, qu’il s’agisse de la fameuse taxe sur les plus-values ou une éventuelle augmentation de la TVA. Dans ce cas, pourquoi ne pas laisser cette patate (très) chaude à d’autres, surtout si cela entre en contradiction avec les promesses des gouvernements régionaux où les libéraux ont vanté une fiscalité plus souple ?

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