Le retour de Gwendolyn Rutten, « une journée noire pour la politique »
C’est un nouveau coup de tonnerre chez les libéraux flamands: seize jours après avoir claqué la porte de la politique nationale, Gwendolyn Rutten fait son grand retour. L’ancienne présidente de l’Open VLD succède à Bart Somers au poste de ministre au sein du gouvernement flamand, une nomination que le politologue Carl Devos voit d’un très mauvais œil.
Lundi, Bart Somers a annoncé qu’il démissionnerait de son poste de ministre flamand des Affaires intérieures, des Affaires administratives, de l’Intégration et de l’Égalité des chances pour reprendre ses fonctions de bourgmestre de Malines. Il justifie sa démission par son amour pour sa ville et affirme que l’échelon local peut constituer un repère pour les gens en période d’incertitude pour la démocratie. Gwendolyn Rutten a été choisie pour lui succéder.
Celle-ci se dit bien consciente du contraste avec ses propos tenus il y a deux semaines, lorsqu’elle avait annoncé son retrait à la suite de la nomination de Paul Van Tigchelt comme ministre de la Justice. « Si vous m’aviez dit il y a quelques jours que je serais assise ici, je ne l’aurais pas cru », a-t-elle déclaré. « J’étais déçue il y a quelques semaines. C’était un moment difficile, car je pensais ne plus pouvoir avoir d’impact en politique. C’est pourquoi j’avais fait le choix de faire autre chose de ma vie, à côté de mon poste de bourgmestre d’Aarschot », a-t-elle expliqué lors d’une conférence de presse.
Gwendolyn Rutten renforce la caricature des politiciens opportunistes
Politologue à l’Université de Gand, Carl Devos ne cache pas sa stupéfaction. Il rappelle que Gwendolyn Rutten a quitté la politique nationale parce qu’elle ne pouvait pas devenir vice-Première ministre, et qu’elle revient pour devenir vice-ministre-présidente. « Gwendolyn Rutten renforce la caricature selon laquelle les politiciens sont des opportunistes intéressés uniquement par les postes. Elle avait mis fin à son engagement national parce qu’elle n’avait pas obtenu de poste, et elle le reprend parce qu’elle obtient un poste. En outre, elle avait déclaré qu’elle ne souhaitait rien de plus que d’être bourgmestre, mais maintenant elle l’abandonne pour autre chose », fustige-t-il.
Si Alexander De Croo, le « seul patron » de l’Open VLD depuis le départ de Vincent Van Quickenborne et Bart Somers, a choisi Gwendolyn Rutten pour succéder à Bart Somers, c’est parce qu’il a été surpris par les réactions internes virulentes après qu’elle ait annoncé son départ, analyse Carl Devos. La nomination de Paul Van Tigchelt au poste de ministre de la Justice aux dépens de Gwendolyn Rutten avait en effet déclenché un tollé de réactions au sein de l’Open VLD.
« Compte tenu de son ambition d’être perçu comme féministe, malgré ses résultats mitigés à cet égard (la démission forcée de la secrétaire d’État Eva De Bleeker en Flandre n’a pas été oubliée), Alexander De Croo souhaitait nommer une femme. Comme il ne pouvait donc pas choisir quelqu’un de sa propre circonscription électorale (la sénatrice Stefanie D’Hose), il a choisi Gwendolyn Rutten », explique le politologue.
Un cadeau pour les partis radicaux
La nomination de Gwendolyn Rutten risque de fragiliser encore un peu plus l’Open VLD. « Au sein de l’Open VLD, on pense que beaucoup d’électeurs vont oublier cet épisode, mais j’en doute. C’était un jour noir pour la politique, en particulier pour l’Open VLD. Ce parti est déjà en mauvaise posture depuis des semaines, les sondages sont désastreux, et maintenant l’affaire Rutten ne fait qu’aggraver la situation: il semble qu’il n’y ait d’engagement que lorsqu’un poste de ministre est en jeu. Hier, lors de la conférence de presse, elle a également déclaré qu’elle ne pouvait avoir un ‘impact’ que de cette manière, comme si on ne pouvait pas en avoir en tant que parlementaire… », déplore le politologue.
Au-delà du parti, faut-il craindre que l’affaire Rutten mine encore un peu plus la crédibilité de la classe politique ? « Les partis radicaux en tireront profit. Ce qui s’est passé hier est un cadeau pour eux. Ce qu’a fait l’Open VLD hier est en fait de l’antipolitique. Et celui-ci est déjà très fort », conclut Carl Devos.
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