La N-VA pourra-t-elle exister sans Bart De Wever?
Il domine la vie politique depuis vingt ans. Dans six mois, le président de la N-VA pourrait décider de l’avenir de la Belgique. Mais que pense vraiment Bart De Wever? Retour sur une vie politique de victime à travers une demi-douzaine de préceptes.
Bart De Wever trouve toujours qu’on ne l’aime pas assez alors que personne n’a jamais été autant aimé (3/6)
Il y avait Leo Tindemans et ses 900 000 voix aux élections européennes de 1979, et il y eut Yves Leterme et ses 796 000 voix au Sénat en 2007. L’un comme l’autre jamais ne parvinrent à faire durer cette popularité, ni à la structurer politiquement.
Et il y a Bart De Wever, qui trouve que tout le monde lui en veut et que les médias lui sont hostiles, qui une fois par semestre depuis quinze ans annonce qu’il pense à quitter la vie politique, qui est invité dans toutes les émissions, y compris celle qui fit son succès, De Slimste Mens ter Wereld (l’homme le plus intelligent du monde), qui récolte 785 000 voix en 2010 au Sénat, qui explose tous ses adversaires dans les baromètres et dans les bureaux de vote et qui s’en sert pour construire le parti dominant du système politique flamand. A Anvers, son taux de pénétration est astronomique. Aux communales de 2018, il amasse 76 000 voix anversoises: plus d’un quart (26,9%) de ses concitoyens ayant déposé un suffrage valable ont voté pour lui. C’est encore mieux que Paul Magnette qui, le même jour, avait été choisi par 22,6% des électeurs carolos.
En Flandre, sa popularité semble éternelle. Depuis une douzaine d’années, plusieurs personnalités flamandes lui ont disputé le titre de favori des sondages.
Aucune n’a duré, en témoignent ses plus récents concurrents, Alexander De Croo et Conner Rousseau. Tous ont fini par lasser, regardez comment la courbe de son rival de jadis, Elio Di Rupo, s’est brisée en Wallonie (voir graphique ci-dessous), tandis que la sienne conservait une très louable vigueur en Flandre.
Bart De Wever dure toujours, il n’a pas encore lassé, même si, entre octobre 2018 et mai 2019, il a perdu vingt mille voix de préférence, et que, les sondages n’étant pas bons pour son parti, il risque une moisson plus frugale en juin prochain.
C’est un problème pour lui, et un problème pour son parti, car les succès de la N-VA, plus que d’aucune autre formation, dépendent de ceux de son président de presque toujours.
«L’électorat de la N-VA est le seul qui évoque spontanément “le leader du parti” comme motif de choix électoral. La marque “Bart De Wever” ne semble toujours pas désavantageuse pour la N-VA», observent, dans un tout récent ouvrage (De Breuklijnen voorbij?, Skibris, 2023, 280 p.) consacré aux élections de 2019, les politologues Koen Abts, Cecil Meeusen, Bart Meuleman et Marc Swyngedouw.
Selon les mêmes, en 2010, 26% des électeurs de la N-VA citaient le président comme une raison de leur choix. Cette proportion a baissé en 2014 (à 15%) et en 2019 (à 13,8%), mais elle n’allait, dans les autres partis, jamais au-delà de 1,4%…Une telle articulation d’une formation à son président pose la question de la survie de celle-là après celui-ci. La N-VA pourra-t-elle exister sans Bart De Wever?
Ou même avec Bart De Wever, mais avec un autre président que Bart De Wever?
Les enfants de Bart De Wever, qui a sacrifié déjà une génération de successeurs potentiels, porteront peut-être toujours un flambeau à flamme jaune. On ignore s’il sera siglé N-VA comme celui de papa.
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