Nicolas De Decker
La certaine idée de Nicolas De Decker | Ce mystérieux «argent magique» dont Bouchez et Prévot veulent la peau
MR et Engagés veulent la fin de l’«argent magique», et promettent en même temps d’énormes plans budgétaires. Une logique difficile à suivre, à moins qu’il y ait un «truc».
On peut ne pas aimer Georges-Louis Bouchez (MR) et Maxime Prévot (Les Engagés), mais il faut bien admettre qu’ils manient remarquablement l’art complexe et cumulé de la parole claire et nuancée. «L’argent magique, c’est fini», dit dans un slogan l’un , qui trouve que la politique se meurt si elle n’est pas portée par des politiciens qui parlent clair, et qui remarque que les gens en ont marre. Et «c’est fini, l’argent magique», dit dans un slogan l’autre, qui trouve que la politique se meurt si elle n’est pas portée par des politiciens qui parlent tout en nuance, et qui observe que les gens en ont marre.
Et voilà donc les deux hommes politiques les plus puissants de Wallonie plus unis que jamais pour dénoncer la fin d’une magie, qui consisterait en la création prodigieuse d’un argent inexistant, prestidigitation périssable arrivée à péremption –parce que les gens en ont marre, merde, à un moment donné.
Il y avait, jusqu’au 9 juin dernier, un truc, inventé par la gauche bien sûr, pour faire croire que l’argent poussait des arbres et qu’on pouvait en faire ce qu’on voulait. Ils l’ont trouvé, le truc, Maxime Prévot et Georges-Louis Bouchez et, aidés de leurs électeurs et de Bart De Wever, ils vont enfin en finir avec l’argent magique en Belgique, dans les Régions, et, si on les laisse faire, dans toutes les villes noyées sous le numéraire imaginaire, parce-que-les-gens-en-ont-marre.
Or, comme quelqu’un a dit que la magie d’un tour se trouvait dans le regard du spectateur plus que dans les cuticules du prestidigitateur et les formules de l’ensorceleur, regarder les efforts du médiateur royal, les projets du réformateur libéral et les ambitions du formateur fédéral impose de chercher où l’argent magique a bien pu disparaître.
Car dans les abracadabrants 19 milliards d’effets retours promis par la «supernota» de Bart De Wever, dont même l’économiste banquier le plus idéaliste ne peut confirmer une once de matérialité, dans les baisses d’impôts promises par Georges-Louis Bouchez –il a dit qu’ils n’allaient augmenter nulle part et baisser partout parce que les gens en avaient marre–, dans les dépenses supplémentaires actées par Maxime Prévot dans la négociation fédérale –il a dit qu’il avait obtenu que la police, la justice, l’armée, les soins de santé et les grandes villes seraient refinancés parce que les gens en ont marre–, dans le retour à l’équilibre budgétaire annoncé partout en Wallonie, en Fédération Wallonie-Bruxelles et en Belgique, avec moins de recettes parce que les gens en ont marre, mais pas vraiment moins de dépenses non plus, parce que les gens en ont marre aussi, c’est beaucoup d’argent qui apparaît finalement là où on disait qu’il n’y en avait plus du tout et que les gens en avaient marre.
Ils disent que c’est fini, l’argent magique, mais il doit quand même bien y avoir un truc quelque part. Ils diront peut-être lequel bientôt. Mais après les élections communales, parce que quand même, les gens en ont marre, merde, à un moment donné, et parce qu’il ne faudrait pas que les gens en aient déjà marre, de cette nouvelle magie, avant ce moment donné-là.
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