Raoul Hedebouw mensonges

Institut mondial d’hedebouwologie: les petits mensonges et fausses promesses de Raoul Hedebouw (suite et fin)

Nicolas De Decker Journaliste au Vif
Benjamin Hermann Journaliste au Vif

Tableau périodique des éléments de langage farfelus, faux ou fallacieux de Raoul Hedebouw (et donc de son parti).

Leur parcours à tous est lesté de plusieurs années de déclarations de campagne, de petits et de gros mensonges, de fausses promesses et d’erreurs factuelles que la vérité des faits, ou la logique, ou la morale, ou les trois, contredisent, sans que jamais ils n’aient dû s’en justifier. Bien sûr, il y a parmi eux des spécialistes, qui s’adonnent au bluff politique plus souvent que les autres, mais chacun s’en est déjà rendu coupable. C’est précisément pourquoi Le Vif a décidé de répertorier ces petits et gros mensonges dans un dictionnaire très didactique des pseudo-vérités politiques en Belgique francophone.

Pour ne flinguer personne, chacun a eu le droit de s’expliquer sur ses mensonges, ses contre-vérités et ses fausses promesses passés.

Institut mondial d’hedebouwologie

Sur la Chine et le Covid (entre autres)

«La Chine, comme d’autres pays asiatiques, a endigué la pandémie de coronavirus grâce à un système de santé intégré, à une approche ferme et à une mobilisation à tous les niveaux. Lorsque la pandémie a éclaté, elle a été capable d’orienter son économie de façon à répondre à l’urgence sanitaire en un court laps de temps», peut-on lire à la page 50 du rapport du Congrès de l’Unité de fin 2021. Le PTB doit statutairement et étymologiquement tenir un congrès quinquennal, ce qui laisse beaucoup de temps aux inspecteurs sanitaires de l’Institut mondial d’hedebouwlogie pour traquer les marques de péremption, d’autant plus que cette planification n’est pas scrupuleusement respectée (il y a eu des congrès en 2008, en 2015 et en 2021).

Et donc depuis le dithyrambe de la page 50, un parmi d’autres sur les prouesses de la Chine, les limites de sa stratégie draconienne de confinement se sont révélées, tant pour ce qui relève de l’orientation de son économie que de sa manière de répondre à l’urgence sanitaire. «Ils ont eu beaucoup de soubresauts, trois ans plus tard, au moment de l’ouverture, et donc c’est clair que le bilan semble être moins positif qu’à ce moment-là», concède avec une lumineuse humilité Raoul Hedebouw, porté à la présidence de son parti par ce même congrès de 2021. Peut-être le PTB devrait-il penser à organiser des congrès quinquennaux plus souvent, afin de jeter au compost de l’Institut mondial d’hedebouwlogie ses conclusions les plus visiblement périmées. Parce que là, il les laisse se gâter pendant plus de cinq ans à chaque fois.

Sur l’Otan face à la Chine

Le rapport du dernier congrès quinquennal du PTB (qu’il tient, au mieux, une fois tous les six ans) stipulait ceci, en décembre 2021, à la page 46: «Aujourd’hui, l’Otan désigne sans ambages la Chine, pourtant de l’autre côté du globe, comme le nouvel ennemi commun.» Six semaines plus tard, les chars Russes fonçaient sur Kiev, et aujourd’hui l’Otan, qui n’a jamais amassé autant de moyens autour de la Russie, la désigne sans ambages comme l’éternel ennemi commun, ce qui ne surprend pas les géopoliticiens de l’Institut mondial d’hedebouwlogie, mais qui fait dire à son principal sujet d’étude qu’il aurait sans doute dû écrire cela différemment.

«C’est clair que le monde évolue vite et que la guerre en Ukraine, on ne l’avait pas vue venir, du moins pas aussi vite», admet Raoul Hedebouw. Mais quand il évolue moins vite, à plus de six semaines, le monde montre au président du PTB des régularités moins incertaines. «En revanche, l’analyse globale, qui dit que, dans les cinq à dix prochaines années, ce qui va se passer se passera entre l’Amérique et la Chine, elle, reste valable. Ce qui se passe aujourd’hui entre la Russie et l’Otan est une partie de la question fondamentale, et les Américains le disent eux-mêmes, que la vraie guerre, c’est entre Etats-Unis et Chine», pronostique celui qui n’avait pas vu venir l’autre vraie guerre en cours dans l’est de l’Ukraine.

Sur les préaccords du PS et d’Ecolo

La stabilité d’une matière se mesure par la vitesse à laquelle elle passe d’un état solide, liquide ou gazeux à un autre. L’estimation de la solidité hedebouwlogique de certains propos du président du PTB les catégoriserait plutôt à l’état fumeux. Début octobre 2023, Raoul Hedebouw réagit aux vaines discussions menées par les trois partis du gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles – PS, MR et Ecolo – en vue de réorganiser les institutions francophones. «C’est incroyable. En fait, on a ici un préaccord électoral entre PS, MR et Ecolo qui nous disent déjà “on a négocié un accord en secret pendant un an”, et en plus la mise en application de cet accord, le vote lui-même, aura lieu après les élections», s’énerve-t-il sur LN24.

La vidéo est ensuite republiée par le parti qui écrit partout en grand «RAOUL DÉNONCE L’ACCORD SECRET ENTRE PS/MR/ECOLO». Six mois plus tard, au cours du débat des présidents de parti organisé par Le Vif, l’accord secret a tant gagné en liquidité qu’il lie désormais d’autres contractants. «Moi, j’ai l’impression qu’il y a déjà une coalition PS-Ecolo avec Les Engagés qui est prête, hein. Ils sont déjà en train de discuter entre eux…», lance alors Raoul Hedebouw, un peu moins dans le gaz pour l’occase. «Hé, la séquence a évolué depuis, et la montée des Engagés a changé leurs plans», nous répond-il, solide sur ces nouvelles bases, mais pour combien de temps avant le prochain changement d’état?

Sur le refinancement par les autres

Le PTB s’affiche désormais en candidat à des coalitions francophones. Il a tracé ses «lignes rouges». Mais certaines se dessinent depuis d’autres niveaux de pouvoir que ceux auxquels il dit désormais aspirer. Si bien qu’elles semblent presque rendre toute participation impossible. «Le gros problème, c’est que dans la loi spéciale de financement, on a tellement tout cadenassé qu’une opportunité fiscale telle que faire payer les plus riches pour investir dans les services publics, on ne peut pas le faire à la Fédération Wallonie-Bruxelles! C’est ça qu’on doit changer, c’est au fédéral qu’il faut un combat pour un refinancement des entités fédérées», a ainsi déploré Raoul Hedebouw, le 30 mai, lors du débat des présidents diffusé sur toutes les télévisions locales, pour montrer qu’il était intéressé d’intégrer des majorités (surtout francophones), mais à la condition que celles-ci convainquent les autres (surtout Flamands) d’améliorer leurs finances, ce qui demanderait une réforme de l’Etat.

Attention, module le président devant les micros de l’Institut mondial d’hedebouwlogie, «ce n’est pas un point de rupture en soi. Ce qu’on veut, c’est un engagement commun des partis en train de négocier aux niveaux régionaux. Mais ce sont aussi des revendications fédérales», répond-il, à deux doigts d’admettre qu’il n’acceptera d’entrer dans une coalition en Wallonie, à Bruxelles ou en FWB, que si les partis flamands qui s’y refusent depuis des décennies acceptent d’y faire envoyer plus d’argent.


(Re)lisez ici la première édition du rapport de l’Institut mondial d’hedebouwologie

Raoul Hedebouw sur le carriérisme au PTB

«Au PTB, on ne fait pas de la politique pour faire carrière», dit le directeur politique du PTB, David Pestieau, et plein de ses camarades le répètent souvent. Lui, c’était quand Youssef Handichi, encore membre du PTB, avait expliqué qu’il ne se présenterait pas aux élections en juin prochain. Youssef Handichi avait menti, là, mais il est sorti du champ d’étude de l’hedebouwologie en prenant sa carte au MR. Il reste donc aux hedebouwologues cette étrange assertion pour un parti marxiste-léniniste, souvent répétée pourtant chez les «camas», qu’une carrière politique n’était pas compatible avec un engagement au PTB. Elle est si étrange qu’elle surprend même le président de notre champ d’étude. Parce que lui, comme David Pestieau et comme pratiquement tous les dirigeants de son parti, n’ont jamais milité qu’au PTB, et, puisque les deux dimensions sont là fortement intriquées, ils n’ont jamais travaillé que pour le parti, souvent c’était aussi le cas de leurs parents, et d’ailleurs il fait une moue fort inhabituellement personnelle, Raoul Hedebouw. «Moi, je ne pense pas avoir beaucoup insisté sur les carrières. C’est sur l’argent qu’on insiste, oui, ça oui, et pas qu’un peu. Mais être militant toute une vie, ce n’est vraiment pas un problème pour moi, j’ai toujours dit que j’espérais encore avoir le courage d’être militant à septante ans. Et même sur la transmission du militantisme au sein des familles, je ne pense pas qu’on puisse souvent me prendre en défaut sur ça. Notre problème, c’est l’attrait de l’argent en politique, pas la carrière en elle-même», dit celui qui gagnera peu d’argent, il s’y engage, a être étudié pendant longtemps par l’Institut mondial d’hedebouwologie.


Sur la taille de la classe ouvrière

Dans le rapport du dernier congrès du PTB, tenu fin 2021, on peut lire que «la classe ouvrière représente grosso modo 60% de la classe travailleuse», et c’est une double entorse. Au lexique traditionnel du marxisme, tout d’abord, qui ne parlait historiquement que de classe ouvrière: le PTB a choisi depuis longtemps de rebaptiser du terme moins clivant de «classe travailleuse» l’ensemble des catégories salariées, et la plupart des indépendants.

A la réalité matérielle ensuite: les ouvriers sont loin de constituer la majorité de la masse immense des salariés (fin 2023, l’ONSS dénombrait 1,5 million d’ouvriers dans les secteurs privé et public pour un total de plus de 4,5 millions de salariés) et encore moins des indépendants.

La double entorse se justifie par une contorsion. Le PTB veut simultanément représenter toute la classe travailleuse, donc il réduit, jusqu’à l’effacer terminologiquement, ses mentions de la classe ouvrière à l’extérieur. Mais comme, à l’intérieur, il veut promouvoir l’ascension d’ouvriers dans l’appareil du parti, il augmente fictivement le poids des ouvriers parmi les travailleurs. D’ailleurs Raoul Hedebouw assume cette part de fiction ouvrièriste à l’intérieur, travailleuse à l’extérieur: «On a pris le critère du diplôme, on considère que les travailleurs sans diplôme sont des ouvriers. Et on a pris une définition assez large en effet, parce que sur cette question, ce n’est pas tout blanc ou tout noir», dit le rouge.


Raoul Hedebouw sur la guerre en Ukraine

Le 19 février 2022, alors que Joe Biden annonce que la Russie se prépare à envahir l’Ukraine, sur sa page Facebook, Raoul Hedebouw ravit les hedebouwophiles: «Les USA nous ont menti à propos de l’Irak, l’Afghanistan, la Syrie, la Libye, le Vietnam, la Bolivie, le Venezuela, le Guatemala, le Honduras, Haïti, Cuba, le Panama, le Nicaragua… mais ils diraient maintenant la vérité sur l’Ukraine?», écrit le président du PTB. Le 24 février, la Russie envahit l’Ukraine, les USA ne nous avaient pas menti, Raoul Hedebouw avait tort, et le post du président du PTB devient immédiatement une pierre philosophale pour hedebouwologues. Le concerné reconnait son erreur mais maintient. «Les Etats-Unis sont encore et toujours en train de mentir sur leur propre domination du monde», nous dit-il, deux ans et un mois après la vérité de Joe Biden. «Evidemment que les Etats-Unis restent une puissance hyper mensongère. Mais je n’ai jamais dit que Poutine ne menaçait pas l’Ukraine ou qu’il n’était pas impérialiste, hein. D’autres forces de gauche radicale ont peut-être dit ça en Europe, mais moi je n’ai jamais dit ça. Notre analyse est que l’impérialisme russe existe, mais que c’est un impérialisme sous-régional. Je rappelle d’ailleurs que le PTB était opposé à la guerre en Tchétchénie alors que les Verhofstadt, Louis Michel et compagnie voulaient faire du business avec Poutine…», précise celui qui disait que les «USA ne disaient pas la vérité sur l’Ukraine» tandis qu’ils disaient alors la vérité sur l’Ukraine, et qui, donc, «persiste et signe», faisant exploser tous les calculateurs de l’Institut mondial d’hedebouwologie.


Sur les impôts payés par Colruyt

Raoul Hedebouw a déjà admis avoir un jour dit quelque chose de faux, «et on est un des seuls partis à avoir reconnu une erreur, donc de ce côté-là, voilà, quoi», quand l’Institut mondial d’hedebouwologie l’interroge sur sa gaffe du 14 janvier. Ce jour-là, à la réception des voeux du parti, il affirme que Colruyt n’a payé en 2022 à la Belgique, sur un bénéfice d’1,8 milliards, que 0,27% d’impôts», et c’est faux. Ces chiffres correspondent à l’impôt payé par la holding du grand groupe flamand, basée au Luxembourg, qui intègre les plus-values sur actions et les dividendes reçus, souvent déjà taxés et donc largement exonérés. Les comptes consolidés du groupe, eux, montrent que ses bénéfices, 250,9 millions d’euros, ont été taxés à un honorable 24,8% au titre de l’impôt des sociétés. «On n’aurait pas dû globaliser», reconnait donc Raoul Hedebouw, qui trouve une raison à son tort. «On a bien fait de pointer du doigt cet 1,8 milliards d’euros, dont on ne sait pas comment il a été taxé, mais on sait que c’est très faible, au Luxembourg, et c’est sur ça qu’il faut avoir ce débat», ajoute-t-il, comme si le débat avait eu lieu sur ces stratégies d’optimisation fiscale et pas sur sa grossière erreur factuelle. Sur laquelle, promet-il, l’Institut mondial d’hédebouwologie n’aura plus à se pencher dans le futur, parce qu’elles ne se reproduiront plus. Les procédures, ont peut dire process, ont été renforcés, assure-t-il. «ll n’y a rien à faire, il faut du double check, et ne pas vouloir aller trop vite», résume Raoul Hedebouw.


Sur les sanctions à géométrie variable

Raoul Hedebouw et le PTB sont réticents aux sanctions lorsqu’il s’agit de les appliquer à la Russie ou à la Chine, parce qu’elles seraient inefficaces et contre-productives, mais Raoul Hedebouw et le PTB sont favorables aux sanctions lorsqu’il s’agit de les appliquer à Israël. Le département de géométrie variable de l’Institut mondial d’hedebouwologie se frotte les compas. Mais le sujet départemental se justifie. «Pour la Russie, on n’est pas opposé aux sanctions, on a juste demandé que les sanctions soient dirigées vers les oligarques russes eux-mêmes. Et pour la Chine, on n’est pas d’accord de rentrer en guerre avec la Chine, qui n’inflige pas d’oppression coloniale à un autre peuple», répond Raoul Hedebouw. «Dans le cas d’Israël, il y a des dizaines de résolutions des Nations-Unies», contre-balance-t-il, sans signaler, au plus grand dépens du département de droit international de l’Institut mondial d’hedebouwologie, qu’Israel, contrairement à la Chine et à la Russie, ne dispose pas d’un droit de veto au Conseil de sécurité de l’ONU. Le PTB défend le mouvement BDS, qui réclame même un boycott des universités israéliennes, et ce n’est, dit-il, pas la même chose que pour la Russie ou la Chine car «dans la société civile israélienne même, il y a des colons, c’est-à-dire des acteurs eux-mêmes de la colonisation». Le département de logique formelle de l’Institut mondial d’hedebouwologie, qui n’ignore pas comment sont gouvernées les très dociles universités russes et chinoises, est à deux doigts de présenter une démission collective.


Raoul Hedebouw sur les «grands monopoles privés»

«Les grands monopoles privés déterminent où et quand investir et comment on produit, en se basant avant tout sur leurs chances d’empocher des profits et non sur la survie de l’humanité», est-il écrit à la page 57 du rapport du congrès 2021 du PTB, dans le chapitre consacré au climat, en effet ces grands monopoles privés matérialisent remarquablement l’ennemi de classe, spécialement dans ce chapitre, et on n’en attend pas moins de la production politique quinquennale d’une formation aussi résolument communiste que celle de Raoul Hedebouw. Il faut donc tordre le bras de ces grands conglomérats privés, et nationaliser partout le secteur de l’énergie. Mais dans le secteur de l’énergie, les grandes entreprises, en fait, sont au moins autant publiques que privées. Les quatre plus grandes compagnies pétrolières mondiales sont des propriétés d’Etat, et des géants européen tels qu’EDF ou Engie sont, en tout ou en partie, propriété publique. Mais, conteste le matérialiste Raoul Hedebouw, leur capital est public mais leur âme est privée. «Chez nous en Belgique, Engie n’est pas une entreprise nationale belge, hein. Et puis surtout ces sociétés, c’est du capitalisme d’Etat. On le dénonce aussi, le capitalisme d’Etat», répond-il aux questions de l’Institut mondial d’hedebouwologie. Mais alors pourquoi vouloir nationaliser un secteur déjà largement nationalisé? «Parce que ce n’est qu’une première étape. Puis, il faut faire rentrer la démocratie, les syndicats, les organisations syndicales, dans ces entreprises d’Etat gérées comme des monopoles privés», conclut-il, confiant dans son espoir de pouvoir l’accomplir en Belgique (puis peut-être en Europe, et puis aussi en Chine ou en Arabie saoudite).

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