© BELGA

Fouad Ahidar, la stratégie de «l’homme ordinaire» qui veut conquérir Bruxelles

Nathan Scheirlinckx
Nathan Scheirlinckx Journaliste au Vif

Après sa percée surprise aux élections régionales bruxelloises, Fouad Ahidar espère transformer l’essai lors des prochaines communales. Pour s’en donner les moyens, l’ex-Vooruit a lancé une grande opération de recrutement, d’Ecolo à… la N-VA.

Au soir du 9 juin, Fouad Ahidar a créé la sensation lors du scrutin régional à Bruxelles. Son parti, le Team Fouad Ahidar, est arrivé deuxième de la course côté néerlandophone, à une foulée de Groen. Un succès inattendu, rendu possible par les spécificités électorales de la capitale – 17 sièges sur les 89 du Parlement bruxellois reviennent d’office à des néerlandophones – et par la personnalité clivante de Fouad Ahidar.

Alors que les élections communales et provinciales du 13 octobre se rapprochent, le Jettois recrute pour mettre ses équipes en ordre de marche. Nadine Van Lysebetten (ex-N-VA), Ange-Raïssa Uzanziga (ex-Groen), Sarah Bestrioui (ex-Ecolo) et Elias Ammi (ex-DéFi) sont déjà passés sous la bannière du Team Fouad Ahidar.

Tous ont été convaincus par celui qui a été exclu du parti Vooruit en 2022, après avoir voté contre l’obligation d’étourdissement des animaux avant abattage. «J’ai une grande confiance en lui, car c’est une personne très empathique, qui sait créer des liens et qui est très sociable», a déclaré Nadine Van Lysebetten à Bruzz. Ange-Raïssa Uzanziga, qui sera «secrétaire de groupe» de la liste, déclare vouloir «contribuer à la vision ambitieuse et inclusive de Team Fouad Ahidar».

«J’ai une grande confiance en lui, car c’est une personne très empathique, qui sait créer des liens et qui est très sociable»

Nadine Van Lysebetten (Team Fouad Ahidar)

Le grand recrutement de Fouad Ahidar

La personnalité joviale de Fouad Ahidar semble convaincre © BELGA

Bernard Clerfayt (DéFI), ministre bruxellois de l’Emploi et ancien bourgmestre de Schaerbeek, s’interroge quant à cette opération de débauchage à tout-va: «On peut se poser la question du lien qui unit ces personnes issues de différents bords politiques. Partagent-elles la vision communautariste de Fouad Ahidar? J’ai du mal à comprendre l’offre politique de la liste, qui n’évoque par exemple pas le social et les quartiers.» Dans les 19 communes bruxelloises, un vent de panique souffle-t-il à l’approche du raz-de-marée Fouad Ahidar? «Ecolo et PS doivent à mon avis se faire du souci, au vu de leurs mauvais résultats aux dernières élections», estime la politologue Caroline Sagesser (Crisp).

«On peut se poser la question du lien qui unit ces personnes issues de différents bords politiques. Partagent-elles la vision communautariste de Fouad Ahidar?»

Bernard Clerfayt (DéFI), ministre bruxellois de l’Emploi et ancien bourgmestre de Schaerbeek

Emir Kir, bourgmestre de Saint-Josse-ten-Noode, l’une des communes où le Team Fouad Ahidar veut percer en octobre prochain, ne s’inquiète pas. «Nous avons rencontré leurs représentants, mais restons avec la Liste du Bourgmestre en position de force pour les élections.» L’ancien membre du PS salue en tout cas le retour en force de Fouad Ahidar. «Exclu de la vie politique, il est revenu par une autre porte (NDLR: en constituant sa propre liste). C’est un homme jovial, capable de s’entourer et cohérent avec ses combats.»

Ahmed Mouhssin, tête de liste Ecolo à Saint-Josse, confirme également que son groupe a rencontré le Team Fouad Ahidar. Avec des envies d’ailleurs? «Non, nous sommes des militants écologistes de longue date, qui formons une équipe soudée. Ceux qui sautent le pas sont soit au début de leur carrière politique, soit sentent le vent tourner.»

«Un homme jovial, drôle et sympathique»

«Fouad est quelqu’un de jovial, spontané, sympathique et drôle, évoque Bernard Clerfayt. Quand il entre dans un café à Bruxelles, il n’hésite pas à saluer tout le monde.» © BELGA

La personnalité de Fouad Ahidar jouerait un rôle important dans la conclusion de ces transferts inter-partisans. «Il a réussi à projeter cette image d’homme ordinaire, simple dans sa façon de parler et même de s’habiller», observe Caroline Sagesser. «Fouad est quelqu’un de jovial, spontané, sympathique et drôle, évoque Bernard Clerfayt. Quand il entre dans un café à Bruxelles, il n’hésite pas à saluer tout le monde.»

Si la constitution de listes pour le Team Fouad Ahidar suit son cours, la tâche reste ardue pour le Jettois, qui part de zéro ou presque avec cette nouvelle formation politique. «L’homme est en politique depuis longtemps et a de la bouteille», commente David Leisterh (MR), amené à devenir le prochain ministre-président bruxellois. «Fouad Ahidar répond visiblement à une certaine demande politique, mais annoncer des transferts ne suffit pas. Encore faut-il constituer une liste complète, pouvant atteindre 49 candidats sur certaines communes.»

«Fouad Ahidar répond visiblement à une certaine demande politique, mais annoncer des transferts ne suffit pas»

David Leisterh (MR)

Si compléter les listes sera peut-être déjà une victoire en soi, le chemin ne s’arrête pas là pour le Team Fouad Ahidar. «Lors des élections régionales, 21% des sièges de l’hémicycle bruxellois sont réservés aux Flamands. Alors qu’historiquement l’électorat flamand à Bruxelles plafonne à 11%, déroule Bernard Clerfayt. Dans ma commune, la liste Ahidar a fait 1.200 voix au scrutin bruxellois. S’ils font le même résultat le 13 octobre prochain, ils n’auront même pas un siège de conseiller communal, pour lequel il faut en général 2.000 voix».

Dans l’entité de Schaerbeek, le Team Fouad Ahidar devra donc au minimum doubler son score acquis le 9 juin dernier pour espérer obtenir un premier bouquet communal. «Rien n’est fait, il faudra voir si les citoyens votent pour la liste sans qu’elle soit représentée par Fouad Ahidar en personne», s’interroge Bernard Clerfayt.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire