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David Leisterh relance les consultations bruxelloises… et peut-être le PS

Sylvain Anciaux

Après huit mois de blocage, David Leisterh relance les concertations bilatérales avec les partis bruxellois. S’il échoue, il passera la main aux socialistes.

C’était une technique à laquelle Bart De Wever, le formateur fédéral et désormais Premier ministre, avait habitué les négociateurs de l’Arizona : celle de la dernière chance. David Leisterh (MR), formateur au niveau bruxellois, l’imite ce vendredi en annonçant la relance d’un tour de concertations bilatérales avec l’entièreté des partis bruxellois. Dans une semaine, le bourgmestre de Watermael-Boitsfort devra faire analyser les positions de ses interlocuteurs. Et si personne n’a bougé, il passera la main au socialiste Ahmed Laaouej.

Cet engluement remonte à la mi-novembre et l’annonce des partis néerlandophones d’inclure la N-VA dans la majorité linguistique requise (avec Groen, l’Open VLD et le CD&V). Dès lors, les socialistes avaient refusé de s’asseoir à la table des nationalistes et, depuis, plus rien n’a vraiment bougé. Pendant deux mois, plus personne ne s’est officiellement parlé, à l’exception d’une rencontre un brin foireuse entre Zakia Khattabi (Ecolo), Sophie Rohonyi (DéFI) et David Leisterh, à l’initiative du président du MR, Georges-Louis Bouchez.

Depuis, tout le monde accusait tout le monde (mais surtout les socialistes) d’être responsable du blocage. Et chacun a soumis quelques propositions pour montrer sa bonne foi et qu’il était à même de prendre ses responsabilités. Sophie Rohonyi avait proposé de mettre sur pied un gouvernement bruxellois à la majorité simple au parlement, sans majorité néerlandophone. Refus. Ahmed Laaouej et le PS ont lancé l’idée de soumettre David Leisterh et son gouvernement au vote du parlement bruxellois via l’article 35.2 de la loi spéciale. Refus (mais examiné par le bureau élargi du Parlement). David Leisterh relance les consultations. A voir le résultat.

Le plus petit dénominateur commun de Benjamin Dalle

Le libéral commencera donc ses consultations lundi. Soit avec Groen, soit avec le PS, qui sont les autres gagnants du 9 juin. La première question sera la même pour tout le monde : «Considérez vous, oui ou non, le retour à l’équilibre budgétaire comme la première des priorités pour la région bruxelloise?» La rencontre avec Ahmed Laaouej s’inscrira quoiqu’il en soit dans un débat tendu, après les propos de Zakia Khattabi sur Bx1 affirmant qu’il existait un agenda caché pour gouverner sans le PS au sein du gouvernement bruxellois. «Mais j’accueille ce nouveau tour des bilatérales positivement, assure Ahmed Laaouej. Elles permettront de voir le plus petit dénominateur commun.» Celui-ci est cependant déjà connus, rappelle le nouveau président de la fédération bruxelloise d’Ecolo, Kalvin Soiresse, vu qu’un accord existait déjà avant les élections communales, qui ont vu l’axe MR-Engagés-PS se déchirer pour des sièges de bourgmestres.

Le climax de ce nouvel épisode aura lieu en fin de semaine, quand le CD&V incarné par Benjamin Dalle rencontrera le formateur. Selon le libéral, Dalle ne s’est jamais exprimé clairement sur son envie de «monter» ou non au gouvernement. Après avoir rencontré tous les partis, le plus petit dénominateur commun sera connu, et la volonté (ou pas) de Benjamin Dalle d’embrasser ceux-ci apparaîtra très clairement. S’il ne change pas d’avis, il devra se justifier, et endosser à son tour le rôle du fameux «valet noir» qui bloque les négociations. David Leisterh tentera de convaincre le PS de s’asseoir à la table de la N-VA. Et le PS refusera encore. «Et dans ce cas, on passera la main au PS», concède le porte-parole de David Leisterh.

Le PS prêt à payer pour voir la N-VA en dehors du gouvernement bruxellois

Si le CD&V accepte de revoir sa position, c’est un nouveau paysage politique qui s’ouvre, côté néerlandophone. Elke Van Den Brandt, formatrice néerlandophone pour un parlement bruxellois, devra retourner en consultation. Et les regards se tourneront vers l’Open VLD. Tout comme le CD&V, les libéraux néerlandophones ont lié leur participation bruxelloise à celle de la N-VA. Il faudra «payer» les libéraux et les chrétiens démocrates pour se détacher des nationalistes. «Il y a une coalition stable du côté néerlandophone de dix sièges sur 17, et il n’est pas prévu de la modifier, répondent les libéraux. La question n’est donc pas de savoir si la N-VA peut être remplacée par le CD&V, dans cette optique, la N-VA doit faire partie du gouvernement.» Mais les plus constructifs, dans les couloirs de l’Open VLD, avouent qu’il faut un gouvernement avant tout et que si une solution existe avec le CD&V et sans la N-VA, alors la porte n’est pas fermée.

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A l’entame de ce nouveau round, le scénario le plus plausible reste tout de même la prolongation du blocage. Ahmed Laaouej pourrait donc devenir le formateur du gouvernement bruxellois. Pour ça, il faudra faire ce que David Leisterh n’a pas réussi depuis huit mois. «Benjamin Dalle a ses convictions, il ne veut pas être la cinquième roue du carrosse néerlandophone, analyse Ahmed Laaouej, qui rappelle que cette majorité a besoin d’un poste de commissaire du gouvernement pour exister et que ce même poste doit être validé par une majorité au parlement, inexistante pour l’heure. Il veut un pouvoir décisionnel et des compétences substantielles, et je le comprends.»

S’il réussit ce tour de force, Ahmed Laaouej replacera le PS comme le parti qui sait piloter Bruxelles, une ambition cachée mais réelle depuis le 9 juin. C’est peu probable, mais pas impossible. En attendant, la proposition de soumettre David Leisterh comme Ministre-Président au parlement est toujours étudiée par le bureau du parlement bruxellois. Et d’ici-là, celui-ci restera le lieu où chacun viendra régler ses comptes en soumettant des propositions d’ordonnance… Tout en revendiquant de prendre ses responsabilités pour la région bruxelloise.

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