Des dizaines de jeunes avaient été arrêtés par la police dans un cadre non légal, le 24 janvier 2021.

Violences policières: Philippe Close, la police de Bruxelles et l’Etat belge condamnés pour une manifestation réprimée en 2021

Les autorités ont été condamnées non pas sur les arrestations en elles-mêmes, mais sur le cadre illégal de celles-ci. Les enquêtes pénales sont encore en cours pour les faits en eux-mêmes.

Le tribunal civil de Bruxelles a condamné vendredi l’État belge, la zone de police Bruxelles-Capitale/Ixelles et le bourgmestre de Bruxelles à indemniser les victimes de violences policières commises lors d’une manifestation le 24 janvier 2021, indique lundi la Ligue des droits humains (LDH). Dans cette affaire, onze jeunes avaient engagé une action en responsabilité civile devant le tribunal contre les autorités policières et communales de Bruxelles.

L’État belge, la zone de police Bruxelles-Capitale/Ixelles et le bourgmestre de Bruxelles sont condamnés « in solidum » à payer la somme de 900 euros à chacun des onze demandeurs, stipule le jugement daté du 14 mars et dont Belga a pu prendre connaissance lundi. Par ailleurs, l’un d’eux sera également indemnisé à hauteur de 5.000 euros pour le dommage moral qu’il a subi lors de sa détention, où des sévices corporels lui ont été infligés, alors qu’il n’avait que 15 ans.

Violence, insultes racistes et sexistes

Près de 150 personnes, en majorité des jeunes, s’étaient rassemblées le 24 janvier 2021 sur la place de l’Albertine à Bruxelles pour manifester contre « la justice de classe » et contre les abus d’autorité de la part de policiers. La police avait procédé à de nombreuses interpellations. Plusieurs jeunes avaient été arrêtés et emmenés à la caserne de police d’Etterbeek où certains avaient subi de la violence, mais aussi des insultes sexistes et racistes.

En janvier 2023, deux ans après les faits, onze jeunes avaient décidé de déposer plainte contre les autorités policières. Une action à laquelle s’est jointe la LDH. Cette plainte visait non pas les faits en eux-mêmes, au sujet desquels des enquêtes pénales sont encore en cours, mais les failles du système d’encadrement des manifestations. 

Les plaignants dénonçaient en particulier le profilage ethnique et la pratique dite de la nasse. Ce dispositif policier consiste à encercler un groupe de personnes, lors d’une manifestation qui dégénère, et à empêcher celles-ci de sortir de la zone, sans distinction des fauteurs de troubles et des manifestants pacifiques.

« Les pièces déposées démontrent la mise en œuvre, le 24 janvier 2021, d’une mesure de confinement [technique de la nasse] d’une centaine de personnes à hauteur de l’entrée de la gare centrale. Les images vidéo et les témoignages attestent du caractère coercitif et restrictif de cette mesure d’encerclement, empêchant les personnes confinées de quitter volontairement les lieux », a notamment constaté le tribunal.

La police adopte «un comportement contraire à la loi»

Or, a-t-il poursuivi, « la technique policière de confinement ne fait l’objet, en droit belge, d’aucun encadrement légal spécifique ». Le tribunal conclut donc que cette technique a été « ordonnée et exécutée en violation de l’article 5 paragraphe 1er de la Convention européenne des droits de l’Homme ».

Le tribunal a également estimé que les services de police ont adopté un comportement contraire à la loi, « en procédant à l’arrestation administrative des demandeurs dans un contexte qui ne démontre ni le risque d’une atteinte grave à l’ordre public qui leur est imputable, ni l’absolue nécessité de cette arrestation ».

Il a encore établi que « le fait pour les demandeurs d’être détenus, même quelques heures, sans connaître le motif exact de leur arrestation […], dans un climat de violence dont ils ne sont pas responsables, constitue un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme ».

Le tribunal a par contre considéré que l’existence d’un profilage ethnique déterminant les arrestations n’était pas démontré à suffisance dans le cas d’espèce.

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