Paul Magnette: « La gauche ne meurt jamais »
Plutôt que de se disperser dans un grand nombre de petites idées, la gauche doit se recentrer sur quelques-unes des grandes idées qui ont fait sa force, afin de la sortir de la crise qu’elle connaît actuellement, expose le socialiste Paul Magnette dans « La gauche ne meurt jamais », publié mercredi.
« Il ne faut pas se mentir, la gauche est profondément en crise en Europe, à l’exception du petit village gaulois que constitue la Belgique francophone », constate M. Magnette en présentant son ouvrage à la presse, dans un café de la place Rouppe au coeur de Bruxelles. Il voit un paradoxe dans le fait que la crise du capitalisme financier depuis 2008 et la colère à l’égard de ses institutions n’ont pas généré un effet de balancier profitable à la gauche. « Nous ne parvenons pas à convaincre, on n’a pas mesuré ce qui a changé », dit-il en évoquant non seulement les partis socialistes européens, mais aussi les écologistes et les syndicats paralysés par la « nostalgie des 30 glorieuses ».
Il cite, à titre d’exemple « une confiance en l’État devenue parfois si large qu’elle frise l’idolâtrie ». Pourtant, les crises que la gauche a déjà connues par le passé enseignent que, quand elle a su ouvrir un vaste débat sur ses valeurs et ses pratiques, elle a pu imposer ses thèmes à l’agenda politique, estime Paul Magnette. En ce sens, « la crise de la gauche est une bonne nouvelle ». Le bouleversement que constitue la persistance d’une croissance faible ces prochaines années représente aussi une opportunité pour la gauche, ajoute-t-il: les conflits redistributifs qui en naissent nécessiteront des arbitrages qui sont une chance pour une gauche dont l’égalité demeure « l’étoile polaire ».
En 165 pages, le socialiste propose de retrouver la modernité en recourant aux grandes idées qui ont fait la force de la gauche: contribution du capital, juste rétribution du travail, réduction du temps de travail au bénéfice de l’émancipation personnelle ou des soins aux proches, statut unique des travailleurs, etc. « Nous devons inventer de nouveaux mécanismes de répartition », dit-il, s’empêchant toutefois de formuler des propositions concrètes qui seront l’objet du « chantier des idées » que le PS entame. Soulignant le besoin de modernité, Paul Magnette accorde un chapitre à l’individualisation des moeurs, au renforcement de l’hédonisme, du narcissisme des réseaux sociaux, etc.
« La gauche doit s’en réjouir, estime Paul Magnette: une société formée de citoyens qui ont confiance en eux-mêmes et sont attachés aux plaisirs de l’existence et à la convivialité est mieux armée qu’une autre pour éviter de retomber dans la violence, le mépris mutuel et le rejet de l’autre. La gauche a toujours été du côté de la fête ».