Passé colonial: trop pour le MR, insuffisant pour le PS, un bon compromis selon les Verts
Le PS et le MR ont réagi mardi de manière contrastée aux propositions de recommandations du président de la commission parlementaire qui se penche sur le passé colonial de la Belgique. Le premier ne veut pas se cantonner à des excuses du parlement et estime qu’il faut aller plus loin dans un travail de réparation, le second entend en revanche ne pas dépasser les « regrets » exprimés par le roi Philippe durant son voyage en RD Congo.
Il n’est pas question pour nous d’avoir un accord au rabais sur un sujet aussi fondamental qui concerne des populations victimes de violences systémiques. Nous nous devons d’être à la hauteur: le Congo, le Rwanda et le Burundi nous regardent. Si les excuses ne viennent que du parlement, cela ne nous convient pas du tout. Du long travail d’audition que nous avons mené, il ressort que ces excuses doivent venir non seulement du parlement mais aussi du gouvernement, du chef de l’État et de toutes les institutions qui ont collaboré au régime colonial comme l’Église ou des entreprises privées », a expliqué le vice-président de la commission, Christophe Lacroix (PS).
Les socialistes soutiennent toujours le projet d’une fondation qui pourrait être par exemple alimentée par les entreprises qui ont profité du régime colonial et qui poursuivrait la recherche sur cette période de l’histoire, mènerait des opérations d’éducation et de sensibilisation, travaillerait à la réconciliation, etc., à la manière de ce qu’a fait l’Allemagne pour le travail forcé sous le régime nazi. La proposition de M. De Vriendt évoque un « fonds fiduciaire » que constitueraient les Églises pour soutenir des projets de réparation. Les socialistes comme les libéraux jugent prématurée la présentation par le président Wouter De Vriendt (Ecolo-Groen) de ses propositions de recommandations ce mardi.
« Il reste de nombreux points de divergences fondamentales que nous devons encore trancher, il nous semble dès lors prématuré de rendre public un document qui ne reflète pas le consensus de tous les membres de la majorité. Les discussions étaient en effet censées se poursuivre cette semaine afin d’aboutir lundi prochain », ont souligné les chefs de groupe Open Vld et MR, Maggie De Block et Benoit Piedboeuf.
Les deux partis libéraux s’en tiennent aux « regrets » exprimés par le chef de l’État et plaident pour que la Chambre exprime également ses regrets pour les souffrances infligées. « Il n’y a pas d’équivoque, le Roi l’avait rappelé, le régime colonial comme tel était basé sur l’exploitation et la domination, une relation inégale, marquée par le paternalisme, les discriminations et le racisme. Nous nous inscrivons pleinement dans cette démarche de reconnaissance », ont-ils souligné.
Ecolo-Groen salue par contre la proposition de rapport qu’il qualifie de « bon compromis ». « Une démocratie comme la nôtre peut-elle encore continuer à éviter habilement de reconnaître sa responsabilité dans une des expressions les plus flagrantes de violation des droits humains, à savoir la colonisation? La réponse est évidente. Il est vrai que les Belges d’aujourd’hui ne sont pas responsables des actions de nos prédécesseurs, mais nous avons reçu la période coloniale en héritage et nous devons la gérer de manière juste et responsable. S’il n’y a pas de culpabilité individuelle des Belges, il existe assurément une responsabilité collective de l’État belge, de l’Église et des entreprises coloniales », a souligné Guillaume Defossé.
Les écologistes appellent également à se tourner vers l’avenir. « Nous devons travailler sur les conséquences actuelles de la colonisation. Celles qui font qu’aujourd’hui, les personnes d’ascendance africaine font face à un racisme systémique bien spécifique. Ce lien entre racisme et colonialisme a déjà été reconnu par les Nations-Unies mais aussi le Parlement Européen. La lutte contre ce racisme systémique ne doit plus être une posture, elle doit être politique. Le Plan d’action national contre le racisme pour lequel nous nous sommes engagés en 2001 doit aboutir et être mis en œuvre sans délai », a-t-il ajouté.