Passé colonial belge: le mot « excuses » ne sera pas écrit
Le député fédéral Wouter De Vriendt (Ecolo-Groen), qui préside la commission spéciale de la Chambre sur le passé colonial de la Belgique, a annoncé mercredi qu’il proposerait de voter les recommandations issues de deux ans et demi de travail parlementaire, mais sans y inscrire le mot « excuses » qui divise la majorité.
Le 19 décembre dernier, cette commission n’avait pas pu voter sur les recommandations finales, car la majorité était divisée: les libéraux et les CD&V ne voulaient pas d’excuses et avaient proposé l’expression des « plus profonds regrets », dans le sillage des regrets exprimés au mois de juin par le Roi. Ils mettaient notamment en avant le risque de réparations financières que comportent des excuses, même si la plupart des experts entendus avaient contesté tout lien entre l’un et l’autre.
Aux yeux des socialistes et des écologistes, par contre, les excuses constituaient un préalable indispensable à tout travail de réconciliation. Le PS avait d’ailleurs réaffirmé qu’il n’était pas question pour lui de soutenir un texte « au rabais » qui n’aurait pas comporté ce mot.
« Malheureusement, les esprits ne sont pas encore mûrs pour des excuses », a déploré mercredi Wouter De Vriendt, dans un communiqué. Il rappelle au passage les excuses présentées la semaine dernière aux Pays-Bas par le gouvernement pour le passé esclavagiste de ce pays.
Mais le rapport de la commission belge comporte 127 autres recommandations, que Wouter De Vriendt ne souhaite pas voir perdues. Elles concernent notamment la création d’un centre de connaissances sur le passé colonial de la Belgique au Congo, au Rwanda et au Burundi, le développement de bourses d’études et de recherche entre ces quatre pays, la déclassification prioritaire d’archives coloniales, un hommage aux métis dans l’espace public, l’érection d’un nouveau monument en l’honneur de Patrice Lumumba, un appel aux églises pour un fonds fiduciaire, l’organisation d’une année nationale de réflexion sur le passé colonial, un changement du nom de l’Ordre de Léopold II, un monument aux victimes des zoos humains, une évolution plus inclusive du Musée royal de l’Afrique centrale (AfricaMuseum) ou encore de nouvelles mesures de lutte contre le racisme et la discrimination.
Plaidant le pragmatisme, M. De Vriendt a donc retiré les excuses du texte. Il dépose toutes les autres recommandations quasi inchangées sous forme de résolution parlementaire, tandis que la demande d’excuses figure dans une résolution séparée. « J’entends maintenant beaucoup de bonne volonté à gauche et à droite, et une prise de conscience partagée que nous devons nous ressaisir », a souligné le président de la commission parlementaire.