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© Belga

Pascal Smet annonce sa démission

Le socialiste flamand a créé la polémique cette semaine en invitant le maire ultra-conservateur de Téhéran lors du Brussels Urban Summit 2023. Le secrétaire d’État bruxellois a annoncé sa démission.

Dans une conférence de presse organisée dans son bureau à la dernière minute, Pascal Smet, le secrétaire d’Etat bruxellois à l’Urbanisme et au Commerce extérieur, a annoncé sa démission. Elle fait suite à la polémique qui a éclaté au sujet de l’accueil d’une délégation iranienne à Bruxelles dans le cadre d’une réunion internationale en matière d’urbanisme.

« Je n’ai pas commis d’erreur »

S’il démissionne, il n’estime pourtant pas qu’il a commis une erreur. C’est un fait en particulier qui a poussé M. Smet à faire ce choix: il ressort d’un courriel que la Région bruxelloise a pris en charge les frais d’hébergement de la délégation de Téhéran ainsi que celle de Kazan en Russie, comme elle l’a fait pour les autres invités. Mais il s’agit là de représentants de pays sous le coup de sanctions internationales. Selon le secrétaire d’Etat, il s’agit de la faute commise par un de ses collaborateurs, qu’il ignorait et qui a été entretemps réparée par Metropolis, organisateur de la conférence. Celui-ci a remboursé les sommes engagées. « C’est ma façon de faire de la politique. Même si je n’ai pas commis de faute personnelle, il faut pouvoir assumer sa responsabilité », a-t-il dit.

« Alors même si je n’étais pas au courant, cela s’est passé sous ma responsabilité. Je ne peux pas admettre en mon âme et conscience que l’argent belge destiné aux frais d’hébergement aille à un représentant du régime iranien ou russe« .

Il réfute encore toute pression sur les affaires étrangères

Vendredi, Smet s’était pourtant encore farouchement défendu devant le Parlement bruxellois. Le fait qu’à, à peine trois semaines après le retour d’Olivier Vandecasteel, il ait co-organisé une conférence avec le maire de Téhéran et sa délégation n’avait que très peu été goûtée.

Lors de la conférence de presse, il a également souligné la responsabilité de la ministre des affaires étrangères Hadja Lahbib (MR). « Chacun devrait se poser la question de savoir s’il doit prendre ses responsabilités. La société a besoin de faire confiance aux hommes politiques. Mais c’est à elle de choisir. Ce n’est pas à moi de déterminer la faute de qui que ce soit. Nous avons seulement demandé que les visas soient traités et qu’ils ne soient pas rejetés à l’avance. Il était clair pour moi qu’ils examineraient les visas au cas par cas. Je n’ai jamais demandé que tous les visas soient approuvés. C’est le ministère des affaires étrangères qui en a décidé ainsi« .

« On m’a jeté sous le bus »

Metropolis, l’une des organisations à l’origine de la réunion et dont Téhéran assure la coprésidence, avait en effet insisté pour que les demandes de visa soient traitées comme les autres et ne soient pas soumises à l’avance à l’estimation du ministère des affaires étrangères ou du cabinet Smet. Smet avait été en contact avec le ministre Lahbib à ce sujet. “On était d’accord avec l’avis des Affaires étrangères (de ne pas avoir des représentants iraniens sur le sol belge NDLR), mais pas avec la manière. J’ai effectivement téléphoné à Hadja pour qu’elle traite les demandes, mais pas pour qu’elle les accepte. J’ai simplement dit : ‘Si une représentation politique n’est pas possible, une représentation administrative doit être envisagée’.

Or dans l’hémicycle, Lahbib a simplement passé la patate chaude à Smet. Un geste qui laisse Smet amer. « J’ai trouvé très grave ce qui s’est passé au Parlement fédéral. J’ai été très touché. »

Ligne du temps

La présence d’une délégation de la capitale iranienne Téhéran, emmenée par son maire Alireza Zakani, a fait l’objet de nombreux échanges entre la Région bruxelloise et les Affaires étrangères, ainsi qu’en attestent les copies des courriels déposés par M. Smet au parlement bruxellois.

Le 20 mars, un haut responsable de la diplomatie belge, en charge du Moyen orient, remercie une fonctionnaire de la Région bruxelloise d’avoir contacté les Affaires étrangères à ce sujet. Il y juge qu’une telle visite « n’est pas du tout opportune dans les circonstances actuelles » et recommande aussi bien au secrétaire d’Etat Pascal Smet qu’aux dirigeants de Metropolis, association internationale organisatrice de la conférence, de ne pas inviter les personnes dont il est question.

Le cabinet de M. Smet et l’administration régionale endossent alors cette analyse, qui inclut également des représentants des villes russes Kazan et Moscou, comme l’établissent des mails suivants. Ils le font savoir aux dirigeants de Metropolis qui disent comprendre « que les circonstances politiques ont changé » depuis que Bruxelles s’est proposée d’accueillir la conférence. Ils laissent aux autorités consulaires belges le soin de se prononcer sur l’octroi des visas.

Le 26 avril, les dirigeants de Metropolis regrettent toutefois la façon dont cela s’est passé, jugeant qu’il s’agit d’une « situation inconfortable » et demandent qu’une communication directe soit adressée au maire de Téhéran. Le refus belge d’accueillir Téhéran paraît ne s’être manifesté que par le biais du système informatique d’inscription à la Conférence. Ils font au passage remarquer que M. Smet a signé la lettre d’invitation au dit maire… Dimanche, M. Smet a expliqué qu’il s’agissait d’une lettre type parmi des centaines d’autres qu’il a signées.

Le 10 mai, une conversation téléphonique entre M. Smet et Mme Lahbib semble changer la donne. Un collaborateur de M. Smet en livre la teneur dans un mail d’après le compte rendu que lui a fait le secrétaire d’Etat: la ministre fédérale n’aurait pas de problème avec le fait que des villes russes et iraniennes soient invitées au Brussels Urban Summit, « certainement au niveau technique mais aussi politique si j’ai bien compris ». Un autre collaborateur indique que les Affaires étrangères n’allaient pas bloquer ou refuser les visas. Les nouvelles semblent avoir circulé rapidement puisque les dirigeants de Metropolis remercient M. Smet de sa démarche dès le 10 mai.

Le 8 juin, un membre du cabinet de Mme Lahbib demande à des collaborateurs de M. Smet comment ils souhaitent procéder pour la venue de cette délégation.

La polémique a été vive ces derniers jours, à Bruxelles mais aussi au « fédéral » à l’égard duquel M. Smet se montre amer. Il regrette le climat politique qui s’est installé. « Ces derniers temps, on essaie surtout de jeter des collègues politiques sous le bus, je n’ai jamais fait ça », a-t-il affirmé.

« Personne ne m’a demandé de démissionner »

« Sauf l’opposition au parlement, personne ne m’a demandé de démissionner », a assuré l’ex-secrétaire d’Etat. Y compris le président de son parti, Conner Rousseau. « Il ne m’a rien demandé mais il m’a dit que si c’était ma décision, il la respectait ». Le nom du successeur de M. Smet n’est pas encore connu. L’ex-secrétaire d’Etat reviendra siéger au parlement bruxellois comme député. Il n’a pas encore envisagé la suite de sa carrière politique mais il n’entend plus assumer la tête de liste de son parti à la Région bruxelloise en 2024. Il estime que cette tâche revient à la personne qui lui succédera au gouvernement régional.

Deux noms sont avancés. Hannelore Goeman, âgée de 38 ans, cheffe de groupe de Vooruit au parlement flamand, et Ans Persoons, âgée de 44 ans, échevine à la Ville de Bruxelles qui, sous la législature précédente, avait démissionné du collège de la capitale alors pris dans la tourmente du Samusocial.

L’opposition fédérale pointe la responsabilité d’Hadja Lahbib

Pour le président du MR, Georges-Louis Bouchez, c’est Pascal Smet qui « a commis une faute et en subit les conséquences logiques. Étant en charge des relations internationales de Bruxelles, il n’aurait jamais dû procéder à cette invitation. Mais au-delà de cet acte, c’est la légèreté et l’amateurisme du #Brugov qui est mis en cause, dans toutes les matières, à commencer par l’économie, la propreté et la mobilité. Notre capitale mérite mieux », a-t-il tweeté. 

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Cela a valu au président des libéraux francophones une réplique immédiate de Théo Francken:  « Georges-Louis, avec tout le respect, mais si Pascal Smet doit partir, alors, Hadja Lahbib, également. Elle a délivré le visa et son cabinet a donné le feu vert, une faute aussi grande ». 

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Une partie de l’opposition fédérale a exhorté dimanche la ministre des Affaires étrangères, Hadja Lahbib, à suivre l’exemple du secrétaire d’Etat bruxellois Pascal Smet. Pour elle, ce sont les Affaires étrangères qui ont accordé un visa aux deux délégations, alors même que le 20 mars un haut responsable du département déconseillait une telle visite dans un mail adressé à une membre de l’administration bruxelloise.

Plusieurs personnalités de la N-VA ont rapidement réagi après l’annonce du socialiste bruxellois flamand, dont le président Bart De Wever. « Que Pascal Smet prenne ses responsabilités est correct mais la responsabilité finale reste auprès de la ministre des Affaires étrangères. Elle ne peut rester en place. Un signal, selon lequel les vrais réfugiés politiques sont en sécurité dans notre pays face au régime iranien, est nécessaire », a souligné M. De Wever sur Twitter.

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Aux yeux du député Georges Dallemagne (Les Engagés), la démission de M. Smet traduit la « gravité » de la décision de Mme Lahbib d’octroyer les visas. « Pascal Smet n’aurait jamais dû insister pour inviter le maire de Téhéran. Sa démission est inéluctable. La Belgique doit traiter l’Iran comme un État terroriste. Ses représentants sont persona non grata. Il reste que c’est Hadja Lahbib qui a octroyé les visas. La démission honorable de Pascal Smet dans l’affaire des visas pour le maire de Téhéran souligne la gravité de la décision prise par…Hadja Lahbib ».

DéFI met en avant les « zones d’ombre » qui demeurent dans ce dossier. « La démission de Pascal Smet était devenue inévitable pour une faute politique majeure. Il faut saluer son geste. Des zones d’ombre subsistent. Les visas n’auraient pas dû être délivrés par les Affaires étrangères. Nous poursuivrons cette semaine le travail au Parlement fédéral », a averti le président François De Smet.

La commission des Relations extérieures devrait se réunir mercredi à 16h.

Au parlement bruxellois, les représentants de ces partis ont affiché des positions identiques.  Pour Mathias Vanden Borre (N-VA), Pascal Smet a pris « la seule et juste décision possible » à la suite d’une « faute politique trop lourde » et s’être engagé personnellement dans l’organisation de ce « rassemblement politique ». « Mais il s’agit d’une responsabilité partagée ».  Pour Christophe De Beukelaer (Les Engagés), « Pascal Smet a pris ses responsabilités et ce geste l’honore. Je veux reconnaître aujourd’hui sa combativité qui a permis de faire bouger BXL dans certains domaines, y compris la mobilité pendant la législature passée…. Mais cette démission  ne peut cependant pas éluder la question majeure du rôle d’Hadja Lahbib qui est responsable d’avoir délivré les visas… », a-t-il ajouté.  

Chez Ecolo, la seule réaction publique est venue de la députée bruxelloise Marie Lecoq, très remontée, vendredi dernier lors du débat au parlement bruxellois, à l’encontre de Pascal Smet.  « La politique internationale doit être collectivement guidée par les valeurs de défense des droits humains, de démocratie et de liberté. La nécessaire démission de Pascal Smet est une étape sur cette voie. Les écologistes y veillent, à tous niveaux de pouvoir », a-t-elle dit.

Pour le PS, le chef du groupe Ridouane Chahid a qualifié la démission du secrétaire d’Etat d' »acte responsable qui permettra au gouvernement bruxellois de continuer sereinement la mise en œuvre de sa Déclaration de Politique Régionale. Un acte qui devrait en inspirer d’autre si l’honneur de notre pays compte un peu pour eux….. », a-t-il dit sans autre précision.

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