Pacte d’excellence : Salut ou suicide de notre école ?
Deux ans de travail impliquant tous les acteurs du système éducatif se concrétisent lors de cette rentrée scolaire. Création de postes, priorité aux maternelles, allongement du tronc commun, évaluation des profs : Le Vif/L’Express décortique les mesures qui préfigurent une véritable révolution. Si elles sont bien appliquées…
« Oui, c’est une crainte, sérieuse, une peur de voir le château de cartes s’effondrer « , confie Frédéric Delcor, secrétaire général du ministère de la Communauté française, et éminence socialiste qui a piloté la rédaction du Pacte d’excellence. Deux mois et demi après que Benoît Lutgen a » retiré la prise » et décidé de ne plus gouverner avec le PS, notamment en Fédération Wallonie-Bruxelles, le travail va se poursuivre dans l’assemblée concernée par la scolarité, où le binôme (en sursis) PS-CDH a déjà adopté les premières mesures concrètes du Pacte. Mais, depuis le 19 juin dernier et la décision du président du CDH, le flou politique a plongé la réforme phare dans une zone de turbulences. Que deviendra-t-elle si le MR devait intégrer des nouvelles majorités, lui qui regrette l’un de ses pivots, l’allongement du tronc commun jusqu’à 15 ans ? Son président, Olivier Chastel, a livré assez vite que son rejet figurerait parmi les conditions d’une nouvelle majorité à la Communauté française.
Le Pacte va-t-il capoter ? Etendre le tronc commun, soit de la maternelle à la 3e secondaire et, partant, le renforcer demeure l’hémisphère gauche du futur système éducatif. L’hémisphère droit réside dans la gouvernance (suivi des écoles, évaluation des enseignants, autonomie des directions…). Une lésion à l’un ou un développement exagéré de l’autre, et c’est tout le mécanisme qui risque de ne plus fonctionner. Il tient debout grâce à cet équilibre. » Un château de cartes « , littéralement, dont on ne peut retirer l’une d’elles de la base…
L’équilibre budgétaire se trouverait lui aussi malmené. Le Pacte nécessite un investissement de 230 millions d’euros, mais table également sur des effets retour, à l’instar de l’allongement du tronc commun, qui permet une économie de 44 millions d’euros, réinvestie, en partie, dans la remédiation, la lutte contre l’échec scolaire…
Repartir d’une page blanche est, en tout cas, une idée qui n’a pas cours. Ceux qui ont élaboré le Pacte pendant deux ans refusent catégoriquement cette option. Il est » exclu de rouvrir les discussions et de repartir dans la recherche de nouveaux équilibres « , préviennent-ils dans un communiqué envoyé au lendemain de l’annonce de Benoît Lutgen. Le processus fut effectivement unique. » Ce n’était pas une négociation PS-CDH. J’ai dû l’expliquer aux présidents de parti. Tout simplement parce qu’il n’était pas possible de négocier suivant deux dynamiques différentes, celle entre partenaires politiques et celle entre acteurs de l’enseignement « , affirme Frédéric Delcor. Un avertissement à Olivier Chastel ? Pour rappel, ce n’est pas le gouvernement qui a rédigé le Pacte. Lui, il en était le commanditaire et en reste l’exécutant. Il a été élaboré par les responsables syndicaux, les cadres du système éducatif (PO), des hauts fonctionnaires et les fédérations de parents. Un véritable labeur qui a pris des mois. Le document de 329 pages a été prémâché par des groupes de travail et finalisé au sein du Groupe central, organe chapeautant lesdits groupes. Puis, il a été soumis à l’avis des adhérents de chaque organisation impliquée.
Peu l’ont lu
Le Pacte est donc le produit d’un consensus inédit. Ce qui, a priori, doit l’immuniser des alternances politiques. Alors, même en supposant que le document soit amendé, l’exécutif est forcé de réformer cette école knock-out pour qu’on ne la laisse pas à terre. Le texte sera donc appliqué, en tout, en partie, à la louche ou à la petite cuillère.
Tout cela fait néanmoins ressurgir les controverses liées aux réformes annoncées. Rendu public en décembre 2016, le document n’a pas été lu par beaucoup, enseignants et parents. Prises une à une, les pistes qu’il contient pourraient passer pour anecdotiques. Assemblées, et appliquées, elles ouvriraient la voie à une véritable révolution. Car, cette fois, on s’attaque au réacteur de l’éducation : la formation des enseignants, l’école maternelle et primaire, le contrôle du système éducatif, la modification des programmes. Il touche au coeur du système : comment travaille-t-on avec les élèves ? Que fait-on dans les écoles ? Et dans les classes ? Avec un consensus : il faut faire réussir le plus grand nombre.
Tout ne peut pas être entrepris en même temps, une mesure en permettant une autre. Tous les effets doivent se conjuguer pour aboutir à une école plus juste et plus efficace.
Ce texte, Le Vif/L’Express l’a lu pour vous et en a extrait la moelle, en gardant en tête qu’il n’est encore qu’une feuille de route, qu’il faut encore préciser, éventuellement adapter ou corriger.
1. Repenser le parcours de l’élève
La vision. Le tronc commun est la colonne vertébrale du Pacte. Les auteurs veulent le rendre » polytechnique » et l’allonger d’un an, c’est-à-dire jusqu’en 3e secondaire comprise – aujourd’hui, il s’arrête à la fin de la 2e secondaire. Le cursus commun comprend sept champs disciplinaires d’égale dignité – aucun n’est plus important qu’un autre. Il y a le français, les langues modernes et anciennes. Le deuxième domaine, celui des sciences et techniques, recouvre les maths, les sciences, la géographie physique et les compétences manuelles, techniques et technologiques. Le troisième axe, celui des sciences humaines et sociales, englobe l’histoire, la géographie, les sciences économiques et sociales et la philosophie et la citoyenneté. Le quatrième fait la part belle aux arts et à la culture. Le cinquième vise l’éducation physique et l’éducation à la santé. Il dépasserait le champ classique de la gymnastique et des sports pour » devenir une véritable éducation à la santé et au bien-être émotionnel « . Les élèves auront également des cours pour » apprendre à apprendre « . Ces derniers doivent permettre de » tirer des enseignements de ses expériences » et d' » identifier ses affinités et ses projets de vie « . Ils s’initieront à la créativité et à l’esprit d’entreprendre. Tout cela, dès le primaire.
La véritable nouveauté réside dans la suppression du régime d’options : pour tous, les mêmes enseignements avec les mêmes horaires – on ne touche pas aux volumes horaires des disciplines fondamentales (français et math), ni au volume horaire total hebdomadaire. Il s’agit de casser la hiérarchie des filières, qui trie les bons et les moins bons. L’idée est que chaque élève découvre son talent et retarde l’heure de son premier choix.
Au coeur de ce cursus commun, le Pacte propose de sortir du schéma où tous les élèves font la même chose en même temps, indispensable pour gérer l’hétérogénéité dans les classes. Ainsi, après l’apprentissage assuré à l’ensemble des élèves, on les sépare et, selon le niveau atteint dans la matière, ils bénéficient de cours de remédiation ou de cours avancés. C’est ce dispositif RCD – pour remédiation, consolidation, dépassement – qui permet, par exemple, à la Finlande de maintenir un tronc commun jusqu’à 16 ans.
Le tronc commun est « la » colonne vertébrale du Pacte
Dans ce modèle, l’actuel CEB (certificatd’études de base) ne peut plus stopper l’élève, même en cas d’échec. Le bilan aura lieu en fin de 3e secondaire. Tous les élèves passent une évaluation externe, conçue par la Communauté française, appelée CTC (certificat du tronc commun). Là, si l’élève échoue, il pourra redoubler. Avant non, sauf » exception dûment motivée « . Pour éviter un » redoublement gâchis « , le doubleur pourrait utiliser un système de crédits. Durant cette année complémentaire, dit le Pacte, il pourrait suivre certains cours de 4e secondaire, dans la filière probable de son choix, soit pour l’aider à se décider, soit pour capitaliser les examens réussis.
Et après ? A l’entrée de la 4e commencerait la diversification des parcours. L’élève opte entre deux filières de trois ans : une de transition qui mène à l’enseignement supérieur, une de qualification qui prépare à un métier (la frontière entre » technique » et » professionnel » disparaît). Ici, le Pacte veut améliorer la carte des formations qualifiantes. Comprenez : supprimer parce qu’elles n’assurent pas la maîtrise d’un métier spécifique (techniques sociales et techniques artistiques, par exemple) ou parce qu’elles ne mènent pas à des débouchés. Les diplômés de la filière qualifiante n’auront d’ailleurs plus accès à l’enseignement supérieur, sauf à accomplir une 7e année.
Les interrogations. Le Pacte ne précise pas la place réservée, dans ce tronc commun, à certaines matières ni leur volume horaire. Ainsi en est-il des nouvelles compétences techniques, des arts et de la culture, ou du latin.
Pour l’instant, l’enseignement du latin passe par une option facultative que les élèves peuvent choisir en 2e, à raison de quatre heures par semaine. Or, le Pacte veut supprimer les options. Que fait-on alors ? Le rapport livré par le professeur Marc Romainville (université de Namur, qui préside le groupe de travail sur le tronc commun) propose du » latin pour tous « . Combien d’heures ? Quatre ? Deux ? Voire une ? Trois scénarios sont proposés. Soit le latin est obligatoire en 1re et 2e secondaires, à raison d’une heure par semaine. C’est le scénario préféré du groupe de travail, mais il fâche les latinistes : comment espérer faire un travail sérieux en une toute petite heure ? Soit le latin n’est obligatoire qu’en 2e secondaire mais à raison de deux heures. Soit le latin ne fait pas l’objet d’un cours distinct et est étudié de façon transversale aux cours de français, d’histoire, de philo.
Même interrogation pour l’histoire et la géographie. Doit-on conserver le modèle actuel (géographie et histoire restent des cours distincts et pèsent, ensemble, quatre heures par semaine) ? Ou faut-il créer un » cours intégré « , plus large, qui regroupe l’histoire, la géographie, les sciences économiques et sociales ? Ce scénario cabre, cette fois, les profs d’histoire et de géo.
Rien n’est encore sur papier. Il reste quelques semaines aux groupes de travail pour décider de la grille horaire de chaque année scolaire. » Dès la rentrée, nous allons nous attaquer, pour chaque discipline, à la rédaction des référentiels (NDLR : les contenus et les compétences que l’élève doit maîtriser) « , signale Frédéric Delcor, secrétaire général de la Communauté française et président du Groupe central. Ils s’annoncent plus clairs et plus directifs. » Et pour la fin de l’année, partant de là, nous aurons abouti concrètement sur la grille horaire. » Pour ce type de travail, le Groupe central garde la main, puis tranche, avant de saisir le politique qui valide et exécute.
Au-delà, nombre d’enseignants doutent encore et craignent que le tronc commun soit un sas d’attente avant l’orientation vers la filière qualifiante, qu’il entraînerait un nivellement par le bas. » Ce serait le cas si l’allongement du tronc commun n’était pas accompagné de mesures complémentaires « , note Frédéric Delcor. Il vise ici les méthodes et les enseignants.
2. Revoir le métier d’enseignant
La vision. » Ce qui est certain, c’est que le métier va changer « , résume Marie-Martine Schyns, la ministre de l’Enseignement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. C’est pour y répondre qu’on veut appliquer le trio RCD. Mais cela implique également que les » néoenseignants » évaluent autrement leurs élèves. Tout le monde demeure dans la culture du chiffre et du » Bic rouge « . L’objectif est de progresser vers une évaluation formative, » pour du beurre « , de dire à l’élève ce qu’il a acquis, là où il a fait des progrès, de repérer là où il y a un problème. En clair, en finir avec les examens circonscrits à décembre et à juin, et évaluer de façon continue. » Il faut passer d’une évaluation sanction à une évaluation construction, déclare Dominique Lafontaine, professeur en sciences de l’éducation à l’ULg. La première induit de la démotivation et une attitude particulière par rapport aux savoirs : les élèves vont à l’école davantage pour réussir leurs interros et leurs examens que pour apprendre. » Les examens, précisément, ne disparaissent pas, mais leur nombre sera réduit. Les élèves devront réussir l’épreuve externe en fin de 3e secondaire.
» Le rôle premier de l’évaluation formative, dit le Pacte, sera d’identifier les besoins en remédiation et les possibilités de dépassement des élèves. » Dans ce schéma, détecter les difficultés sera rapide et y remédier devra être individuel et précoce, avant que l’échec ne s’enkyste. De facto, le redoublement devrait diminuer – ce que veut le Pacte, qui, sans l’interdire, avance une réduction de moitié, d’ici à 2030.
Cette nouvelle organisation requiert évidemment de transformer le métier d’enseignant d’une pratique solitaire à un travail d’équipe. Le travail collaboratif doit devenir la norme, expose le Pacte. Ce qui n’est pas encore un pilier de la culture scolaire : l’enseignement est un des métiers où la mutualisation est la plus faible. Or, c’est ainsi que naît la véritable innovation et s’inventent de nouvelles façons d’enseigner. Des études scientifiques indiquent par ailleurs que les pays qui obtiennent les meilleurs scores aux tests internationaux sont ceux qui ont réussi à créer un tel esprit collectif. » C’est un vrai changement de perspective « , épingle Frédéric Delcor. Dans son avis, le Pacte précise que le travail d’équipe sera intégré parmi les cinq missions de la charge horaire d’un enseignant, qui articule le face-à-face pédagogique, les préparations/corrections, le service à l’école et aux élèves et la formation continuée. Deux heures hebdomadaires devraient ainsi être dégagées pour aboutir à un véritable travail collectif.
Reste que cette autre façon d’enseigner exige des professeurs mieux armés et d’un nouveau type. C’est là que le numérique a tout son intérêt, parce qu’il permet aux enseignants de diversifier et surtout d’individualiser les apprentissages. » Son utilisation change le rapport à l’erreur. Un élève qui s’exerce au calcul mental sur sa tablette ne craint pas de se tromper et d’être jugé. Plus confiant, il peut beaucoup mieux progresser. Or, les études Pisa (NDLR : le Programme international pour le suivi des acquis des élèves mené par l’Organisation de coopération et de développement économiques) nous montrent que si les élèves obtiennent de mauvais résultats, notamment en maths, c’est justement par peur de l’erreur « , relève Eric Charbonnier, expert à la direction de l’éducation de l’OCDE.
La formation initiale des enseignants est « la pièce maîtresse de la mise en oeuvre du Pacte d’excellence
A peine 20 à 25 % des professeurs se disent prêts à utiliser des outils numériques dans les apprentissages (contre 40 % en moyenne dans l’OCDE et 60 % au Royaume-Uni et dans les pays nordiques). Pour les aider, le Pacte avance ces mesures : écrire, dans tous les référentiels, les acquisitions numériques que les élèves doivent atteindre pour qu’elles soient réellement inscrites dans les programmes. Ensuite vient l’équipement des classes : toute demande de matériel sera conditionnée à la stratégie de l’école. La mise en place d’une plate-forme de ressources pédagogiques et de bonnes pratiques numériques est également prévue ; où les enseignants pourraient se renseigner et échanger. Pour que ces mesures soient suivies d’effets sur le terrain, les profs doivent évidemment maîtriser les compétences requises mais aussi développer de nouvelles pratiques. » Etablir le numérique sur des pédagogies du siècle passé ne porte pas ses fruits « , enchaîne l’expert. Le Pacte mise ici sur la formation continuée et demande aux profs de se former davantage. Il évoque ainsi des formations collectives obligatoires (les » journées pédagogiques « ) plus nombreuses (on passe de trois jours à quatre à six par an), de meilleure qualité, et non saupoudrées » à la demande « , ainsi que des formations complémentaires, proposées le plus souvent sur une base volontaire.
Les interrogations. Le soutien aux enseignants, le développement d’outils didactiques, de manuels pour les enseignants, pour les élèves sont importants. » Mais, sur ces sujets, nous avons beaucoup de retard par rapport aux pays voisins « , rappelle Bernard Delvaux, sociologue et chercheur au Groupe de recherche interdisciplinaire sur la socialisation, l’éducation et la formation (UCL). » Individualiser les enseignements et varier les approches pédagogiques nécessitent aussi des compétences en matière de diagnostic des élèves. Et, face à cela, les enseignants sont trop peu formés aujourd’hui. »
Selon les experts, la formation initiale des enseignants est » la pièce maîtresse de la mise en oeuvre du Pacte d’excellence « , celle par laquelle il faudrait commencer. Alors que depuis des années, les rapports (OCDE, AEQES, universités) pointant du doigt l’enjeu de la revoir sérieusement se suivent et se ressemblent. On y retrouve plusieurs fois ce même constat : la formation doit être plus longue, plus exigeante, plus qualitative, plus professionnelle (davantage de stages pratiques). Sur le papier, le chantier est abouti : les enseignants aujourd’hui formés en trois ans devront étudier quatre ou cinq ans s’ils veulent se spécialiser. Ils seront codiplômés : leur cursus sera délivré autant par les hautes écoles que par les universités. Dès la 1re bac, le futur prof suivra des cours en haute école et à l’université. Sur le terrain, on regrette une lenteur. La réforme devrait se concrétiser pour… septembre 2019 et elle n’est pas encore votée.
Dans leur copie, les auteurs du Pacte ont touché à un tabou : l’évaluation des professeurs. A leurs yeux, il n’est pas raisonnable de penser qu' » une responsabilité collective ne débouche pas in fine sur une responsabilité individuelle « . A ce titre, ailleurs, au Canada et à Singapour par exemple, les enseignants vont chaque année observer des collègues dans leur classe et ils sont aussi évalués par le chef d’établissement. Mais rien de très explosif ne transparaît chez nous, même si le changement qu’il induit amorce une évolution de fond. Dans l’esprit du Pacte, l’évaluation sert davantage à accompagner les professeurs qu’à distribuer des bons et des mauvais points. Le but, en somme, est de passer d’une gestion très administrative des carrières – au mieux, une visite tous les cinq ans d’un inspecteur souvent perçue comme infantilisante – à un moyen » d’évoluer, en particulier en ayant la possibilité de suivre les formations utiles au développement de ses compétences « .
C’est le chef d’établissement qui endosse le rôle d’évaluateur. Il mène, tous les ans, un entretien avec chaque enseignant. L’évaluation sera formative, » pour du beurre « . Ce n’est qu' » en cas de mauvaise volonté ou de manque d’effort manifestes et répétés » par rapport à une faiblesse pointée à l’évaluation formative qu’il pourra lancer une » évaluation sommative » (qui sanctionne). Celle-ci sera menée par le pouvoir organisateur (PO). Un recours restera possible devant une » instance tierce « . Si l’évaluation est défavorable, des objectifs seront assignés à l’enseignant. Et une sanction ne pourra être prise que si le professeur reçoit deux rapports défavorables consécutifs, émis sur deux années scolaires distinctes.
3. Développer le leadership du directeur
La vision. Le chef d’établissement revêtirait, on le voit, un peu plus les habits d’un » manager « . Il évaluera les enseignants, pointera leurs faiblesses… L’idée d’une autonomie octroyée aux chefs d’établissement fait son chemin, sur le terrain, dans les textes, dans les discours politiques. De fait, le Pacte veut lui confier de nouvelles missions. A la figure du chef reclus dans son bureau, concentré sur ses fonctions bureaucratiques, se substitue celle du directeur multitâche, chargé de la gestion administrative (et parfois financière), de la politique éducative, d’une partie des ressources humaines.
Ainsi, il doit désormais rédiger un plan de pilotage, une sorte de contrat fixant les objectifs chiffrés et les stratégies mises en oeuvre dans son établissement sur la réussite des élèves, la lutte contre l’échec, les outils numériques, le travail en équipe… Ce sera à lui de le définir, en collaboration avec son équipe éducative. Fait nouveau, chaque année, ce plan sera évalué par l’inspection. Et les écoles dont la performance s’écartera de la moyenne de ses semblables (même zone, même profil…) devront se soumettre à un dispositif de » rattrapage « . Après négociation avec le gouvernement, le directeur proposera lui-même son plan de rattrapage. Mais il restera monitoré de près.
Ce directeur serait également plus largement consulté par le PO lors des recrutements d’enseignants et devrait avoir plus de latitudes pour employer, comme il l’entend, les moyens budgétaires d’encadrement.
Lui-même sera évalué. Le Pacte évoque un système de mandat renouvelable. Les auteurs l’estiment encore » prématuré » mais souhaitent en » laisser la possibilité au PO « . Concrètement, son mandat serait alors de six à huit ans, reconductible après une évaluation positive du son PO.
Les interrogations. Si le métier de directeur évolue vite, la formation, elle, ne suit pas. En matière de recrutement, il n’est pas outillé. Il est à peine formé à la gestion des ressources humaines. Il semble crucial de professionnaliser le métier en renforçant le cursus de base et attirer » les bons » vers ce métier, ou du moins ceux qui ont les meilleures compétences pour devenir directeur. Dans certains pays comme la Finlande, souvent citée en exemple en matière de formation des enseignants, les directeurs sont responsables du recrutement de leur équipe pédagogique. C’est fréquent aux Pays-Bas, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, où une très grande autonomie est concédée aux établissements. Mais dans ces pays, la formation des chefs d’établissement est très différente. Indépendante de celle des enseignants, elle met l’accent sur le coaching, la gestion des ressources humaines, d’un budget, du leadership… Chez nous, c’est l’évolution de carrière qui mène des enseignants à la direction d’école, moyennant un stage et une formation de 120 heures. Il n’existe ni diplôme en tant que tel, ni préparation distincte.
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