La Cité ardente est abondamment pourvue en appartements. © GETTY IMAGES

Où et quand acheter ? A Liège, l’exode urbain

La Cité ardente est aujourd’hui délaissée… au bénéfice des coeurs de villages alentours.

Le marché immobilier liégeois s’est bien comporté en 2019, annoncent d’emblée les notaires de la province. Pour la cinquième année consécutive, celle-ci est en proie à une hausse du prix des logements qui s’y sont échangés, se distinguant ce faisant des autres provinces wallonnes. Par ailleurs, poursuivent-ils, le nombre de transactions signées sur son territoire se maintient et les délais de mise en vente des biens sont stables (de l’ordre de trois à six mois). .

J’ai moins de 30 ans et j’achète mon premier bien

Jusqu’en 2018, les notaires liégeois constataient un retour en ville. Depuis 2019, ils relèvent une préséance de la campagne et plus particulièrement des coeurs de village dans les intentions immobilières des jeunes acquéreurs. Qui y traquent les petites maisons affichées à quelque 100 000 euros.  » Il s’agit d’un phénomène nouveau « , déclare Renaud Grégoire, notaire à Wanze. Il s’explique par deux motivations : la volonté des jeunes de se rapprocher de la maison de leurs parents et, surtout, les contraintes budgétaires qui sont les leurs.  » La population liégeoise se paupérise et peine à faire face à l’inexorable hausse des prix de la brique. On le voit très clairement dans nos études, c’est de plus en plus marquant.  »

Cette quête des habitations dites  » modestes  » éloigne les jeunes des villes. Et ce, parce qu’ils veulent profiter de la réduction du taux des droits d’enregistrement, qui passe de 12,5 à 6 % sur une première tranche de 163 125,56 euros du prix du bien. Un coup de pouce prévu par le législateur wallon et conditionné au revenu cadastral, qui ne doit pas dépasser 745 euros.  » Le souci, c’est que ces habitations modestes se retrouvent presque uniquement dans les campagnes « , décrit Renaud Grégoire.  » D’où le départ des jeunes, qui quittent les villes quand ils franchissent le cap de la propriété pour s’établir dans des villages de plus en plus reculés.  » Quid de l’abattement ? La Région wallonne est moins généreuse que son homologue bruxelloise en la matière puisque l’économie prévue par les autorités plafonne à 2 500 euros au sud du pays. L’abattement wallon est en effet limité à une tranche de 20 000 euros du prix d’achat du bien, contre 175 000 euros pour la capitale. Si c’est toujours cela de pris, les jeunes Liégeois ont tout intérêt à combiner les deux avantages fiscaux.

J’ai 35 ans et ma famille s’agrandit

Quand ils sont un peu plus âgés, leurs économies et, surtout, la plus-value réalisée sur la vente de leur premier bien autorisent les jeunes couples à viser plus haut.  » Le bien phare dans le cas où ils disposent d’un peu plus de moyens, c’est la maison trois-façades neuve livrée par un constructeur de maisons clé sur porte « , assure Renaud Chauvin, notaire à Verviers. Tout au plus leur faut-il sélectionner la cuisine et les revêtements de sol dans un catalogue.  » La génération des 25-40 ans n’aime pas attendre, elle veut tout, tout de suite. De même, elle n’aime pas les imprévus, les soucis et apprécie de pouvoir se reposer sur la garantie d’un professionnel, même si tout n’est pas parfait et pensé à son image dans son nouveau foyer.  » Pour preuve, au sein d’une promotion ou d’un lotissement, l’appartement ou la maison témoin sont vendus dans les premiers,  » avec les rideaux « , plaisante Renaud Grégoire.  » D’autant que la durée de vie des couples est de plus en plus courte. Dans nos études, il arrive que l’on voit des gens se séparer dans le délai de quatre mois entre la signature du compromis et celle de l’acte de vente !  »

Un centre-ville qui souffre d'une multitude de travaux en cours.
Un centre-ville qui souffre d’une multitude de travaux en cours.© BERNARD GILLET/BELGAIMAGE

J’ai 45 ans et je souhaite investir dans la brique

En province de Liège, les investisseurs ont l’embarras du choix quand il s’agit de placer leur épargne dans un appartement neuf. Et pas uniquement en ville.  » Le développement des appartements à la campagne est prégnant chez nous « , atteste Renaud Chauvin, qui cite en exemple, pêle-mêle, Hannut, Verviers, Huy, Esneux, Seraing, Waremme…  » Cet essor se justifie par la politique de densification en Région wallonne. Certaines communes l’ont déjà assimilée et, via des schémas de structure communaux, elles ont autorisé la construction d’immeubles à appartements dans les centres de villages.  » Soit des ensembles à taille humaine de six à huit logements.  » Les promoteurs qui les portent ne prennent pas beaucoup de risques : ils trouvent preneurs très rapidement.  » Pas plus que les propriétaires-bailleurs puisque  » le marché locatif reste soutenu « , rassure le notaire.

Attention, toutefois, à ne pas vouloir s’en séparer trop tôt, met en garde Renaud Grégoire, insistant sur le fait qu’il s’agit d’un placement à long terme.  » Que ce soit sur le marché du neuf ou celui de l’existant, en comptant les 21 % de TVA pour le premier et les 15 % de frais de mutation (droits d’enregistrement et honoraires du notaire) pour le second, il faudra quelques années avant de récupérer sa mise, et plus encore pour briguer une plus-value.  »

Ci-dessous retrouvez la carte des prix médians d’un bien pour chaque commune de la Région Wallonne. Faites glisser votre curseur sur une commune ou tapez le nom de votre commune dans le cadre en haut à gauche.

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Mes enfants étudient et si j’achetais un kot ?

Ces dernières années, une série de résidences étudiantes flambant neuves ont vu le jour dans le centre-ville de Liège, sur la place du XX août, le long du boulevard de la Sauvenière, etc.  » Les studios et chambres qui les composent se sont très vite et très bien vendus, notamment auprès de parents désireux d’investir pour y loger leur enfant avant d’en retirer un revenu locatif « , se souvient Aline Hugé, notaire à Liège.  » Depuis, il n’y a plus de nouveaux projets de ce type et ces investisseurs en bon père de famille placent leur argent dans des studios, mais aussi, de plus en plus, des petits appartements d’une ou deux chambres au centre-ville, d’une valeur de 140 000 à 150 000 euros.  » Une fois les enfants diplômés, ils rentabilisent leur investissement en les mettant en location. Mais, dans ce cas-ci, les locataires potentiels ne sont pas nécessairement des étudiants, ce qui élargit le spectre du public cible, souligne la notaire.

Et la perspective de l’aménagement de maisons en colocations pour étudiants ou jeunes travailleurs ?  » Elle gagne du terrain, entre autres en ce qu’elle permet de régulariser des kots ou des petits logements aménagés sans autorisation des autorités urbanistiques dans les grandes maisons de maître de l’hypercentre de Liège « , ponctue Aline Hugé.

Ci-dessous, retrouvez un tableau des prix par commune et par province wallonne. Utilisez l’outil en haut à droite pour retrouver votre commune.

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J’ai 65 ans, ma maison est trop grande pour moi

Etant abondamment pourvue en appartements, en ce compris dans ses contrées plus reculées, ce n’est pas l’offre qui manque en province de Liège pour les seniors souhaitant se séparer de la villa familiale pour un habitat plus petit et facile à entretenir au coeur de leur commune.  » Ils demeurent ainsi dans l’environnement qu’ils ont connu toute leur vie « , convient Aline Hugé.  » Car la vente de leur grande maison n’est pas tant un souhait qu’une nécessité. On remarque d’ailleurs que peu viennent au centre-ville de Liège, qui est effrayant pour des personnes de 65-70 ans. On les verra plutôt à Tilff, Embourg, Sprimont, etc.  »

Cela étant dit, avant de pouvoir cibler un appartement, encore faut-il réussir à vendre sa maison. Ce qui, comme ailleurs en Wallonie, n’est pas chose aisée, les villas des années 1960-1970-1980 plantées sur leur terrain d’une trentaine d’ares n’ayant guère la cote auprès des plus jeunes.  » Bien souvent, les prix sont rabotés et les seniors doivent ajouter quelque 50 000 euros de leurs économies pour réunir de quoi s’offrir un appartement neuf « , regrette Renaud Chauvin. A moins que le bien ne puisse être divisé en deux ou trois unités d’habitation. Voire rasé en vue d’y élever en lieu et place un immeuble à appartements. Ou encore que la situation du jardin par rapport à la voie et aux équipements publics autorise ses propriétaires à le saucissonner en plusieurs terrains à bâtir, liste le notaire verviétois. Un scénario  » régulier et fréquent « , sur lequel les communes réfractaires  » n’ont pas de prise « , certifie son confrère Renaud Grégoire.  » Si elles s’y opposent, l’instance de recours est la Région wallonne. Les autorités communales ont donc tout intérêt à coopérer et à trouver un compromis parce qu’elles ne savent pas ce que la Région pourrait autoriser et, surtout, ce à quoi elle prétendra à titre de charges d’urbanisme « , prévient le notaire wanzois.

Avant l’habitat groupé, place aux projets mixtes

Si les notaires liégeois identifient quelques projets d’habitat groupé dans leur province, ils sont plus souvent issus de la réhabilitation d’un site historique et patrimonial que d’un réel désir de vie en commun.  » Je pense que le public cible de ce genre d’habitat alternatif n’est pas vraiment tenté par la propriété à la base et se complaît sur le marché locatif « , argue Aline Hugé.  » Ce que l’on voit plutôt, par contre, c’est du mouvement du côté des promoteurs immobiliers, qui ne se contentent plus seulement de proposer des immeubles à appartements mais, petit à petit, imaginent des projets intergénérationnels, dotés d’espaces extérieurs mis en commun et de divers lieux de rencontre entre les occupants.  »

Le centre-ville de Liège est en souffrance

D’après la notaire liégeoise Aline Hugé,  » le retour en ville est fortement ralenti, si pas stoppé  » au sein de la Cité ardente.  » Le centre-ville de Liège souffre de la multitude de travaux en cours, des soucis de mobilité qui en découlent, de la paupérisation de plusieurs quartiers… Tout cela fait fuir les candidats-acquéreurs. Les gens n’étaient pas aussi mécontents avant. Cela s’est vraiment ressenti en 2019.  » Et de confier qu’il faudra sans doute attendre 2021-2022, voire l’arrivée du tram, annoncée en 2023, pour que les choses reviennent à la normale.

6 %

de droits d’enregistrement.

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