Nationalismes flamand et québécois: Gare aux idées reçues !
Fleur de lys québécoise et lion flamand, même combat ? Pas vraiment. Le 22 septembre, des chercheurs canadiens et belges vont tirer des leçons des arrangements adoptés dans leur pays pour gérer les conflits communautaires et linguistiques.
Pour certains politiciens et chercheurs flamands, pas de doute, le nationalisme québécois ressemble au nationalisme flamand : les deux mouvements reposent sur des bases linguistiques, ils ont redressé les inégalités du passé – les classes dominantes étaient francophones en Belgique, anglophones au Québec – et ils ont obtenu une redistribution du pouvoir politique, avec la construction d’une alternative à l’Etat central. Pour répliquer aux Belges francophones indignés par certaines mesures prises par la Flandre en vertu du sacro-saint principe de territorialité, les indépendantistes flamands citent volontiers en exemple le cas de la Belle Province, qui a su protéger, elle aussi, sa langue et sa culture.
Pourtant, le Québec est un îlot francophone dans un océan anglophone, alors que les Flamands sont majoritaires en Belgique. La minorité anglophone au Québec est très protégée, alors que la Flandre a chassé ou assimilé sa minorité francophone. Le gouvernement québécois voit la diversité linguistique de la province comme une richesse, alors que la langue française n’est plus, depuis des lustres, la bienvenue en Flandre. La prestigieuse université anglophone McGill est une institution phare de Montréal, ville francophone, alors que les Belges francophones ont été chassés de l’université catholique de Louvain, bilingue jusqu’en 1968.
En Flandre, la langue française n’est plus la bienvenue
Des recensements linguistiques sont organisés au Québec, alors qu’ils ont été supprimés depuis 1961 en Belgique sous la pression du mouvement flamand. Les indépendantistes québécois n’ont plus le vent en poupe alors qu’un parti nationaliste flamand, première force politique en Belgique, participe au pouvoir. Le Québec peine à faire entendre sa voix au niveau fédéral canadien et connaît un statu quo institutionnel, alors que la » flamandisation » de la Belgique (postes clés entre des mains flamandes…) se poursuit et que les pressions flamandes pour affaiblir plus encore l’Etat belge restent fortes. Les autorités québécoises prônent l’ouverture et la tolérance, alors que le discours des élus nationalistes flamands nourrit le repli sur soi.
Reste que, par-delà leurs différences, la Belgique et le Canada ont des points communs. Les deux pays sont bilingues, ont une longue tradition de tensions entre groupes linguistiques et sont marqués par de multiples clivages. Malgré des périodes de crise, le contentieux communautaire a été géré par des arrangements institutionnels, qui ont permis la mise en place de systèmes fédéraux. Peut-on tirer des leçons de ces expériences, alors que la question de la diversité ethnique et culturelle de la société s’impose à l’agenda politique des deux pays ? Le 22 septembre, à Bruxelles, des chercheurs canadiens et belges (historiens, juristes, sociologues, politologues…) compareront, le plus souvent en duo (belgo-canadien), les solutions adoptées dans leur pays respectif.
Le colloque Des sociétés inclusives ? Le Canada et la Belgique au xxie siècle, organisé par l’ULB, la KU Leuven et l’ambassade du Canada, se tiendra au palais des Académies (entrée libre, enregistrement obligatoire).
Le voyageur qui roule vers le centre-ville de Montréal est vite piégé : échangeurs en travaux, artères réduites à une ou deux voies, rues fermées avec déviations à la clé, intersections où ont été déployés des « signaleurs » chargés de gérer le flux routier… Même constat sur l’autoroute Montréal-Québec, où l’asphaltage et la réfection des ponts créent des bouchons. « Cet été plus encore que les précédents, circuler a été un cauchemar, constate une enseignante belge installée de longue date à Montréal. L’engorgement va encore s’aggraver ces deux prochains mois autour du grand échangeur Turcot : un tronçon emprunté quotidiennement par 22 000 véhicules sera démantelé et reconstruit. »
Les médias dénoncent l’invasion des plots en plastique qui délimitent les travaux, dévient la circulation ou signalent les nids-de-poule. Devenu le symbole de Montréal, le cône orange incarne tous les travers de la métropole québécoise. Mais si la ville a été plus congestionnée que jamais depuis juillet, dénoncent les éditorialistes, c’est aussi parce que le Québec, plus encore que la Belgique, connaît un phénomène de « festivalisation » : festivals western, celtique, de jazz, Juste pour rire, de la Nouvelle-France, du bleuet (la myrtille locale)… A Montréal, des axes routiers ont été fermés pour cause de course automobile, de spectacles de rue et autres animations. Des chroniqueurs remontés contre les libéraux (au pouvoir au fédéral et dans la province) dénoncent dès lors un Etat qui divertit le peuple en été, lui permet de boire dans la rue, « pour faire oublier qu’il lui vide les poches le reste de l’année ».
Autre sujet qui fâche, Québec comme Belgique : les ventes d’armes à l’Arabie saoudite, pays au piètre respect des droits humains et impliqué dans une guerre sanglante au Yémen. Le royaume saoudien représente près de 60 % du commerce wallon dans le secteur de l’armement. Le pays à l’érable lui a vendu des blindés légers pour 15 milliards de dollars, le plus gros contrat de l’histoire des ventes d’armement canadien, négocié par le gouvernement Stephen Harper et approuvé par son successeur, Justin Trudeau, malgré une vive réaction citoyenne. Fin juillet, les informations selon lesquelles Riyad utilise des véhicules blindés légers canadiens pour des opérations de répression antichiites dans l’est du pays ont embarrassé le gouvernement.
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