Mohammed Ameur : « Une chance pour les deux pays »
L’ambassadeur du Maroc en Belgique jette un regard rétrospectif sur la crise des rapatriements et décrit la philosophie marocaine de la migration.
En poste à Bruxelles depuis 2016, Mohammed Ameur, géographe de formation, a été député socialiste (USFP), représentant de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et ministre chargé de la Communauté marocaine résidant à l’étranger (2007).
Les rapatriements du Maroc vers la Belgique n’ont pas été faciles. Est-ce aussi votre avis ?
L’opération de rapatriement s’est déroulée dans un contexte difficile, marqué par un confinement général et strict, l’interdiction des déplacements entre les villes et les régions et la fermeture des aéroports et des frontières. En dépit des contraintes, le Maroc a autorisé plusieurs pays européens à rapatrier leurs ressortissants et les binationaux. A elle seule, la Belgique a organisé 64 vols entre mars et début mai. La bonne entente entre les deux pays a favorisé la réussite de cette opération exceptionnelle et permis de surmonter les multiples contraintes liées au contexte sanitaire. Près de 40.000 Marocains étaient bloqués à l’extérieur du pays. Comme le contexte sanitaire du Maroc ne permettait pas d’engager deux opérations de rapatriement en même temps, la priorité a été accordée aux ressortissants européens et aux bi- nationaux.
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Comment l’Etat marocain considère-t-il sa diaspora ?
La doctrine marocaine à l’égard de la diaspora repose sur la prise en compte de trois réalités : humaine, culturelle et sociologique. La présence marocaine en Europe est inscrite dans la durée, elle revêt un caractère durable. Les communautés marocaines se sont globalement bien intégrées dans leur pays d’accueil et préservent des liens solides avec leur pays et leur culture d’origine. Leur contribution au développement et au rayonnement de leurs pays d’adoption est une réalité dont la Belgique est un cas exemplaire. Parallèlement, la diaspora marocaine a participé d’une façon remarquable à la modernisation du Maroc. C’est la raison pour laquelle la politique en direction de la diaspora doit accompagner et favoriser l’intégration, d’une part, et renforcer les liens avec les racines et les cultures d’origine, d’autre part. En d’autres termes : favoriser l’enracinement sans déracinement. La présence en Belgique d’une communauté d’origine marocaine forte de plusieurs centaines de milliers de personnes constitue, à mon avis, une opportunité, pour ne pas dire une chance, pour les deux pays.
Quel accueil le Maroc fait-il à ses migrants ?
Depuis quelques décennies, le Maroc est devenu un pays de transit et d’accueil des migrants. Avec le renforcement du contrôle des frontières avec l’Europe, de nombreux immigrés subsahariens s’installent durablement dans notre pays. Cette évolution a conduit le Maroc à initier une nouvelle politique migratoire en tenant compte de ses engagements nationaux et internationaux en matière de droits humains et, aussi, des liens intenses et ancestraux avec le continent africain. Depuis 2014, le Maroc a régularisé la situation de plus de 50.000 Africains vivant et travaillant dans le Royaume. Pour la seule année 2019, les écoles marocaines ont accueilli plus de 13.000 enfants africains. C’est le seul pays au sud de la Méditerranée qui s’est doté d’une politique migratoire humaine et solidaire.
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