Marché immobilier : l’impayable Brabant wallon
Sous le soleil de la Wallifornie, les prix de l’immobilier sont parmi les plus élevés du pays. Sans pour autant freiner les candidats à l’acquisition, particulièrement assidus en 2018.
Encore et toujours, la Jeune Province impressionne par le prix élevé de ses maisons et de ses appartements. Les premières continuent sur leur lancée et enregistrent, entre 2017 et 2018, une augmentation de valeur de 3,1 %, à 296 977 euros (prix médian). Les seconds accusent une légère diminution de 1,5 % – la première après quatre années de hausse consécutives – pour se stabiliser à 221 600 euros tout de même. Ce qui revient à dire qu’à l’échelle régionale, il faut débourser… 132 000 euros de plus pour acquérir une maison en Brabant wallon comparé à l’ensemble de la Wallonie (prix médian de 165 000 euros). Pour un appartement, le différentiel monte à 62 000 euros. C’est énorme. Si l’on regarde la carte de la Belgique, sur le marché des maisons, seuls Bruxelles et le Brabant flamand affichent un prix médian plus élevé que leur voisin. Et encore, c’est de justesse pour le Brabant flamand (298 000 euros). En revanche, pour ce qui est des appartements, le Brabant wallon coiffe toutes les provinces belges, y compris la capitale (210 000 euros).
Au vu de ces tarifs, il y a lieu de se demander comment font les acquéreurs pour pouvoir encore s’offrir une adresse dans le » poumon vert de Bruxelles » ? D’autant qu’ils sont fort jeunes : l’an passé, 45 % de ceux qui ont acquis un bien immobilier en Belgique avaient moins de 35 ans ! Qu’à cela ne tienne, l’attrait du Brabant wallon est plus fort que jamais : » après une baisse de l’activité de 2,5 % en 2017, qui faisait elle-même suite à une baisse de 2,8 % en 2016 « , le nombre de transactions a gonflé de… 2,3 % en 2018, avertit Emmanuel Estienne, notaire à Genappe. Pour tenter d’expliquer cette santé retrouvée du marché immobilier brabançon, il pointe la baisse des taux d’intérêts hypothécaires. Ceux-ci se sont situés tout juste au-dessus des 2 % dans les premiers mois de 2018 pour glisser à 1,97 % à partir du mois d’août. » Ils n’étaient plus passés sous la barre des 2 % depuis décembre 2016 « , souligne-t-il. Et d’ajouter que » le nombre de crédits liés à l’achat d’une habitation a atteint son niveau le plus élevé depuis cinq ans » en 2018. Mais ces considérations valent pour l’ensemble du pays et non pas pour la seule Jeune Province.
Préserver la ruralité
C’est l’effet » Wallifornie « , sans doute. » Son triangle d’or que constituent l’UCLouvain, entourée de ses zonings industriels et de recherche, et les cités-dortoirs qui l’entourent ( NDLR : Braine-l’Alleud, Waterloo, La Hulpe, Lasne, Rixensart, Wavre, Grez-Doiceau, Chaumont-Gistoux et Beauvechain) en fait une zone à fort pouvoir d’achat « , indique le notaire ittrois Jean-Paul Mignon. Par contagion, cette attractivité se propage aux communes limitrophes : Braine-le-Château, Nivelles, Genappe, Court-Saint-Etienne, Chastre, Mont-Saint-Guibert, Walhain et Incourt. A l’inverse, celles qui s’inscrivent à l’extrême ouest, à l’extrême sud et à l’extrême est du territoire brabançon connaissent des destins et des prix différents, plus en phase avec les provinces voisines de Hainaut, Namur et Liège.
Dans le détail, 15 entités sur les 27 que compte le Brabant wallon voient le prix médian de leurs maisons augmenter en 2018. C’est Jodoigne qui sort de la mêlée avec une croissance de 11,6 %, talonnée par Waterloo (+9,6 %) et Chaumont-Gistoux (+8,5 %). Chastre, Hélécine et Walhain prennent la direction opposée et essuient les baisses de valeur les plus fortes (respectivement -8,3, -7,5 et -6,1 %). En ce qui concerne les appartements, sur les 18 communes retenues par les notaires pour leur parc représentatif, sept sont dans le vert : Mont-Saint-Guibert (+9,8 %), Court-Saint-Etienne (+8,8 %), Ottignies-Louvain-la-Neuve (+8,5 %), Grez-Doiceau (+8,4 %) et Nivelles (+7 %). Genappe (-11,3 %), Wavre (-8,6 %) et Tubize (-7,3 %) font face à de fortes corrections de prix.
Ces statistiques sont généralement influencées par ce qu’il s’est vendu plus de biens neufs ou de biens anciens d’une année à l’autre. C’est le cas de Louvain-la-Neuve, Court-Saint-Etienne ou Mont-Saint-Guibert, où se sont développés des projets neufs commercialisés l’an dernier. » Les promoteurs ciblent surtout le voisinage des grands axes de circulation ou des gares « , analyse Enguerrand de Pierpont, notaire à Braine-l’Alleud. Autre facteur d’incidence, le fait que certaines entités soient, à l’opposé, en proie à une politique communale réfractaire à leur urbanisation. » Les communes plus rurales, telles Chaumont-Gistoux, Ittre ou Braine-le-Château par exemple, privilégient le calme, la sérénité et la vie au vert, argue Me Mignon. Elles refusent qu’on construise sur leur territoire. » Ce qui ne manque pas d’y faire grimper les prix de l’immobilier existant.
Reste que le notaire ittrois remarque qu’il y a finalement peu de promotions immobilières d’importance en Brabant wallon. Si ce n’est le mégaprojet de ville nouvelle à Tubize (lire ci-contre), dont les notaires brabançons ne manqueront pas d’observer l’impact à l’échelle de la province. » C’est un projet d’envergure qui aura des répercussions sur le marché immobilier de Tubize et ses alentours, affirme Nicolas Lambert, notaire à Braine-le-Château. Dans un premier temps, l’offre sera telle que les prix seront susceptibles de baisser. C’est déjà ce que l’on constate aujourd’hui. »
C’est un véritable renouveau que s’apprête à vivre l’ancien site industriel des Forges de Clabecq, ancré sur les berges du canal Charleroi-Bruxelles, à Tubize. La vaste plaine de 87 hectares a fait l’objet d’un masterplan élaboré en étroite collaboration entre son propriétaire, Duferco, la commune et la Région wallonne. Outre une importante zone économique de 20 hectares et une nouvelle école, un futur quartier de 573 logements est en passe de voir le jour sur dix hectares. Baptisé le Quartier des Confluents, il mêle le premier outlet mall urbain du pays, des commerces de proximité, une crèche, un pôle d’activités sportives et de loisirs, de l’horeca, un centre médical, une résidence-services, des bureaux et un projet d’agriculture urbaine. » C’est intéressant de voir combien la vision et les enjeux y sont différents d’une ville classique. Surtout que l’on passe d’un extrême à l’autre, d’une cité industrielle très polluée à une ville soucieuse de durabilité, de mobilité douce, d’architecture contemporaine, de mixité… « , décrit le notaire Nicolas Lambert. Si tout se passe bien, les 350 premiers logements sortiront de terre en 2021.
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