Christine Laurent
Magnette, un concept ?
Il y a les gagnants et… les perdants. Les valeurs montantes, les rebelles, les mutants, les mal-aimés, les controversés ou les ressuscités… Tous, à leur manière, ont marqué l’année 2010. En voici une centaine, épinglés après mûre réflexion par notre rédaction, avec la complicité du Vif Weekend et de Focus Vif.
Autant d’acteurs majeurs, parfois bien malgré eux, des turbulences, des soubresauts, des tourbillons, des changements, des drames et des événements heureux qui ont imprégné, cette année, tant sur la scène nationale qu’internationale. Des hommes et des femmes au c£ur même de l’actualité et qui se sont distingués pour le meilleur et parfois pour le pire. Plusieurs d’entre eux ont vu leur destin basculer. Comme Julian Assange, qui a choisi de tout déballer… pour se retrouver à la case prison. Ou le trader Jérôme Kerviel, finalement crucifié. On n’oubliera pas, non plus, « l’aigle » André Léonard précipité au sol pour dérapages incontrôlés. Ni Mgr Vangheluwe, désormais infréquentable. Et que dire de Benoît XVI flirtant avec tous les dangers ?
De bruit et de fureur, la scène politique nationale, aussi, en a bruissé. On a ainsi vu Didier Reynders dégringoler pour de bon de son piédestal, Joëlle Milquet se battre pour l’emploi comme la chèvre de Monsieur Seguin, Philippe Moureaux faire un pas (un seul) de côté, les faux frères Modrikamen-Aernoudt s’étriper joyeusement, tandis que l’Ecolo Jean-Michel Javaux recevait une volée de bois vert de Josy Dubié pour ses « foucades monarchistes et calotines ». Rarement Elio Di Rupo aura frôlé le 16, rue de la Loi de si près, mais Bart De Wever, qui fait la pluie et le beau temps, lui en autorisera-t-il vraiment l’accès après son « raté » sur « le momentum » ?
Déjà dans les coulisses, subrepticement, une toute nouvelle génération s’agite, s’agite. De jeunes fauves prêts à affronter les dinosaures vieillissants. A 35 ans à peine, Charles Michel se rêve déjà en roi des bleus. Benoît Lutgen, même à reculons, portera bien demain ce costume de boss du CDH taillé sur mesure par sa patronne ! Paul Magnette, lui, n’est pas un héritier. A 39 ans, notre homme de l’année, malgré une carrière fulgurante et prometteuse, n’est pas près de s’asseoir dans le fauteuil de Di Rupo, Boulevard de l’Empereur. Au PS, si on ne veut pas vivre dangereusement, on se plie à l’autorité du chef suprême. Et le président n’entend pas se faire dégommer sans l’avoir lui-même décidé. Paul Magnette, s’il s’inspire de la sagesse de Tocqueville, son modèle, sait probablement laisser du temps au temps. Déjà, il a appris à calibrer ses interventions, à passer entre les gouttes, malgré la gestion de dossiers explosifs, comme le nucléaire, qui auraient pu ébrécher son image lissée. Il bosse, il bosse. Fort de ses 264 167 voix de préférence aux dernières élections, il peut afficher une certaine sérénité. La récompense pour avoir nettoyé les écuries d’Augias et avoir épargné à la capitale du Pays noir une décrépitude dont elle ne se serait pas relevée. Homme libre ou homme lige Magnette, comme le prétendent ses adversaires ? Un peu des deux, peut-être. Notre premier de classe devra surtout encore prouver qu’il n’est pas un homme à éclipses, qu’il a une vision, des projets, de l’ambition. « Paul Magnette, ce n’est pas qu’un ministre, ni même qu’un professeur, Paul Magnette n’est pas qu’un philosophe, c’est un concept », affirme sur le Net, avec une naïveté touchante, son fan club qui dit lui vouer « une passion subjectivement incontrôlable ». Diable ! Nul doute que Le Vif/L’Express, en le désignant comme son lauréat de 2010, va en faire des heureux !
Christine Laurent
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