Loi pandémie: « On vise à l’utiliser encore durant cette crise-ci », dit Annelies Verlinden
La ministre de l’Intérieur a présenté son avant-projet de loi en commission de l’Intérieur de la Chambre. Des auditions seront organisées rapidement. Voici le compte-rendu intégral de ces premiers échanges.
Les débats sur l’avant-projet de loi pandémie du gouvernement fédéral ont commencé en commission de l’Intérieur de la Chambre, ce mercredi après-midi. Plusieurs députés, dont Vanessa Matz (CDH), ont insisté sur l’importance d’auditions élargies à la société civile, dès la semaine prochaine. Elles pourraient être décidées dès vendredi. La ministre de l’Intérieur, Annelies Verlinden (CD&V), a quant à elle présenté son projet.
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« Il y a une attente importante des citoyens, souligne Hervé Rigot (PS). L’objectif, c’est que cette loi soit d’application pour d’autres situations de crise, mais aussi d’avoir un cadre pour les mesures que l’on décide maintenant. » D’où l’importance de faire des auditions dans un meilleur délai. Le parlementaire socialiste souligne son souhait de voir ce travail mené « solidairement, majorité et opposition ».
Verlinden: « Une transparence jamais vue »
Annelies Verlinden (CD&V), ministre de l’Intérieur, a introduit la démarche gouvernementale. « Ce que nous faisons aujourd’hui, c’est une transparence jamais vue, entame-t-elle. Le but de nos travaux, c’est de faire des propositions constructives pour améliorer le projet. Il faut parfois faire abstraction de ce qui est dit autour de nous. Il faut saisir le moment pour que ce soit le summum du travail parlementaire. »
L’objectif, rappelle-t-elle, est de renforcer le cadre légal pour la gestion de la crise. « Il y a un cadre actuel qui a été confirmé par le Conseil d’Etat, mais cette loi a l’intention d’intégrer les acquis de la gestion de la crise du Covid-19. L’objectif est de créer une loi pour cette pandémie et les pandémies futures. Il s’agit de créer une loi assez détaillée afin de gagner du temps en cas de situation d’urgence. »
Ce projet se concentre sur la menace d’épidémie avec la présence d’un virus infectueux ayant un impact sur la situation du système des soins et la nécessité d’une coordination nationale. « Ce n’est que dans ces circonstances-là que la loi s’appliquera« , insiste la ministre de l’Intérieur.
« Par arrêtés ministériels »
« Ce n’est pas quelque chose qui tombe du ciel, nous avons une procédure », prolonge Annelies Verlinden. En cas d’épidémie, un arrêté royal devra promulguer la situation d’urgence, sur avis du ministre de la Santé publique, après concertation au sein du Conseil des ministres, sur base de données scientifiques. « Le but, c’est que ce soit soumis à la Chambre, que tous les parlementaires puissent connaître les causes de cette situation d’urgence, dit la ministre. Une ratification de cet arrêté royal devra être fait par le parlement dans un délai de deux jours. » Cet arrêté royal aura une durée de trois mois, renouvelable.
Les mesures seront promulguées, comme c’est le cas aujourd’hui, dans un arrêté ministériel après concertation dans les organes compétents et au Conseil des ministres. Vu l’urgence, le Conseil d’Etat pourra être contourné su nécessaire. « La suppression de l’arrête ministériel pourra avoir lieu par l’entremise d’une loi, si le parlement considère que celui-ci n’a pas lieu d’être », précise Annelies Verlinden. Qui ajoute : « Il nous paraît sage de fonctionner par arrêtés ministériels, on verra ce que vous en pensez. » C’est, déjà, ce qui se pratique aujourd’hui.
« Nécessaires, appropriées et proportionnelles »
En ce qui concerne les mesures, la ministre de l’Intérieur précise que les pouvoirs locaux pourront prendre d’éventuelles décisions complémentaires. « Au niveau local, les bourgmestres et les gouverneurs ont la possibilité de prendre des mesures complémentaires si la situation l’exige et on les invite à le faire, explique-t-elle. Mais ils doivent faire notification aux autorités hiérarchiques dans le cadre d’une coordination nationale. »
Les principes généraux de ces mesures sanitaires? « Elles doivent être nécessaires, appropriées et proportionnelles. Ce n’est pas nouveau, cela existe déjà aujourd’hui. » Le Conseil d’Etat, le cas échéant, peut se prononcer s’il est saisi pour évaluer si c’est bien le cas.
Une catégorie de mesures sont reprises dans une liste limitative, qui reprend globalement celles décidées lors de cette pandémie de Covid – mais le spectre est large ! Cela peut concerner, notamment, la limitation de l’entrée ou de la sortie du territoire belge, l’interdiction ou la limitation des rassemblements, l’interdiction ou la limitation des conditions de travail, la détermination des commerces, entreprises nécessaires aux intérêts de la nation,…
Protection des données : à suivre…
En ce qui concerne la protection des données, le texte a été soumis de façon autonome à l’Autorité de protection des données. Annelies Verlinden dit qu’il sera tenu compte l’avis très critique rendu mardi par cette instance, mais que celui-ci repose sur un projet qui n’est pas finalisé. « Il est donc impossible de dire aujourd’hui à quelles fins ces données peuvent être données. Il faudra davantage détailler cela dans une étape ultérieure. »
Tous les détails seront repris dans l’arrête royal et la loi de confirmation. « Nous voulons bien sûr tenir compte des avis de l’Autorité de protection des données », insiste-t-elle.
Le contrôle des mesures et les sanctions concernant les mesures prises par les autorités seront organisés par les services publics. « Ces sanctions seront les mêmes que celles qui sont prévues aujourd’hui, dit la ministre. Les sanctions prévues par la loi pandémie pourront aussi être de mise pour les sanctions prévues au niveau local.
L’implication du parlement ? Un débat au parlement pourra avoir lieu sur l’état d’urgence épidémiologique. L’arrêté ministériel sera soumis au parlement avant publication et le parlement pourra l’annuler si l’estime disproportionné. Un rapport du gouvernement aura lieu régulièrement. « Depuis octobre, j’ai écrit pratiquement chaque semaine un arrêté ministériel ce serait impossible de le faire sur base hebdomadaire », ajoute-t-elle. Cela se ferait sur base mensuelle.
Et Annelies Verliden de conclure : « A la fin de cette pandémie sur le Covid-19, il y aura une évaluation de la loi par la commission et rectification, le cas échéant. Pour ma part, on peut travailler rapidement, sans hâte et sans déroger à la qualité. On vise l’utilisation de cette loi dans cette crise-ci.«
« Ce texte n’est pas sérieux »
Le débat sur le fond de l’avant-projet aura lieu ultérieurement. Même s’il a déjà été amorcé. Le PTB s’insurge sur le fait que cette loi régularise la situation actuelle : « Ce texte n’est pas sérieux », dit Nabil Boukili.
Peter De Roover (N-VA) ne nie pas que cet avant-projet peut être critiqué, mais repousse ce verdict au moment où le débat de fond aura lieu : « On peut discuter du texte qu’il a été soumis. Si ce texte ne suffit pas, on le dira lors de son traitement. »
« Le but de ces auditions, ce n’est pas d’approuver ce texte, mais d’avoir enfin ce débat démocratique essentiel« , dit Sophie Rohonyi (DéFI). Le texte sera amélioré avec les avis que nous recevons, conclut Hervé Rigot (PS). C’est un texte fondamental qu’il convient de traiter avec rigueur. Le parlement a la chance de s’en saisir. Peut-être que d’autres textes viendront. « Mais c’est à nous de jouer ! »
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