Les réactions au Codeco Energie: « Une blague qui ne fait pas rire »
Mercredi, le Premier ministre Alexander De Croo (Open VLD) a annoncé une série de mesures destinées à alléger les factures énergétiques des ménages et des entreprises. Jugées insuffisantes, elles ont déclenché la colère de l’opposition.
Les mesures décidées par le Codeco ont provoqué l’indignation du PTB qui s’indigne de ce qu’aucun nouveau prélèvement ne soit pratiqué sur Engie Electrabel malgré les profits réalisés par l’opérateur électrique. « Aucune nouvelle mesure pour nos factures… La seule chose nouvelle qu’on apprend c’est qu’ils trahissent leur promesse (« personne ne s’enrichira ») : ils ne toucheront pas aux milliards de surprofits d’Engie Electrabel. C’est une honte! » a lancé sur Twitter le président, Raoul Hedebouw.
« Aucune nouvelle mesure, autres encore à rédiger pendant au moins un mois et un groupe de travail. Une blague qui ne fait pas rire alors que la population souffre maintenant. Ni anticipation, ni vision », ont affirmé de leur côté Les Engagés qui ont pointé du doigt un « Bricodéco illisible ».
Aux yeux du président de DéFI, François De Smet, c’était une réunion « symbolique ». « Mélange d’anciennes mesures (tarif social, TVA) et de lettres d’intention (on va travailler sur les surprofits et avec les banques et avec l’UE mais on n’a rien de concret pour le moment, merci). Un codeco symbolique qui a pris des mesures symboliques« , a-t-il dit.
Sans surprise, le Vlaams Belang a également fustigé les décisions du Codeco. « Aujourd’hui, il est clair que la solution ne viendra pas de cet organe », déclare Barbara Pas (Vlaams Belang), présidente de groupe à la Chambre.
Pour le parti d’extrême droite, le Comité de concertation « n’a mené à rien ». « En dehors de l’extension des mesures déjà existantes, on n’a fait qu’exprimer des intentions, dans le sens de ‘nous allons travailler ensemble’, ‘nous devons passer par là ensemble’ et ‘nous allons parler à' », déclare Reccino Van Lommel, membre de la Chambre. « Et ils refilent la patate chaude à l’UE concernant les prix du gaz, mais ils ne font rien eux-mêmes. »
Le niveau européen
Interrogé par Bel RTL, le ministre bruxellois de l’Energie Alain Maron (Ecolo) admet « qu’à ce stade, les mesures sont insuffisantes« . « Parce qu’elles sont projetées dans le futur », et plus spécifiquement au niveau européen qui détient « la » solution pour calmer l’emballement, explique-t-il.
La vice-présidente du gouvernement wallon, Christie Morreale (PS), défend le même principe sur LN24. « Le gouvernement fédéral n’a qu’une partie de la solution, il faut agir à la source« . Après un « premier pas » hier, d’autres mesures seront entre autres discutées « dans le cadre du conclave budgétaire », ajoute-t-elle: soutien aux entreprises, soutien aux citoyens de la classe moyenne. « Pierre-Yves Dermagne (ministre socialiste de l’Economie et du Travail au fédéral, NDLR) a le mandat pour le proposer ».
Du côté des entreprises, la Fédération des entreprises (FEB) pousse le gouvernement à agir rapidement. Il n’est pas nécessaire d’avoir « une énième conversation sur la situation, mais plutôt une consultation sur des propositions concrètes », a-t-il ajouté.
L’Union wallonne des entreprises (UWE) « déplore l’absence de mesures urgentes, mais constate malgré tout une prise de conscience des autorités politiques sur leur situation spécifique. Elle accueille favorablement la main tendue par le Premier ministre et les ministres-présidents pour une concertation destinée à trouver des mesures appropriées pour les entreprises, en espérant que cette concertation conduise à des mesures fortes et rapides ».
Pour la fédération technologique Agoria, « il manque un calendrier et un budget concrets pour les mesures susceptibles d’alléger les factures énergétiques des entreprises à court terme ». Pour Agoria, il est temps « d’accélérer le processus ».
« La montagne a accouché d’une souris »
Du côté des éditorialistes, les réactions sont plus nuancées. Pour La Libre Belgique, « la montagne a accouché d’une souris ». « Les bonnes intentions exprimées masquent un constat d’impuissance et une inaction coupable ». Le Soir fait preuve de plus indulgence et souligne que la Belgique tente d’agir au niveau européen. « Non, l’appel à l’Europe lancé d’emblée par le Premier ministre Alexander De Croo n’est pas une façon de se débiner, mais l’application du principe de réalité. Il faut d’ailleurs rendre à César ce qui lui appartient : c’est la petite Belgique qui, depuis des mois, harcèle ses collègues européens pour imposer ce fameux plafond sur des prix qui s’envolaient déjà », écrit Béatrice Delvaux.
Même son de cloche au journal De Morgen qui estime que la déception qui entoure le Codeco n’est pas tout à fait justifiée. Il salue notamment l’absence d’interdictions et d’obligations en matière de consommation d’énergie. « Les gens ne sont pas bêtes: les chiffres montrent que la consommation d’énergie est déjà en baisse. Une obligation favoriserait surtout la méfiance à l’égard de la politique et donnerait l’impression que c’est à nouveau Monsieur Tout de monde qui paie les pots cassés ».
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Les mesures du Codeco
Comme attendu, le Comité de concertation a décidé de prolonger les mesures de soutien aux ménages déjà prises jusqu’au 31 mars 2023. Il s’agit du tarif social élargi dont bénéficient un million de ménages, la réduction des accises sur l’essence et le diesel, la TVA réduite à 6% sur le gaz et l’électricité et une mesure de compensation pour les ménages qui se chauffent au mazout. Les réductions de TVA à 6% prises dans la construction et pour soutenir les investissements dans les panneaux solaires, chaudières et pompes à chaleur sont également prolongées, mais jusqu’à la fin de l’année prochaine.
Le gouvernement mène par ailleurs des discussions avec le secteur financier. Il veut permettre un report de remboursement des prêts hypothécaires des ménages les plus touchés par la crise. Une concertation aura lieu avec les représentants patronaux et syndicaux pour aider les entreprises.
Il planche également sur la possibilité d' »écrémer » les surprofits engrangés par les entreprises énergétiques. Les mesures nécessaires seront prises à cet effet. Un groupe de travail composé d’experts de la Commission de Régulation de l’Energie et du Gaz (Creg), du SPF Économie et du SPF Finances a été chargé d’examiner où se situent ces bénéfices excédentaires, s’ils peuvent être captés en Belgique et quels instruments fiscaux et juridiques peuvent être utilisés à cette fin.
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