Luc Delfosse
Les naufrages d’Elio Di Rupo
Les hommes d’Etat sont des grands cyniques et de vrais méchants. Cela tient sans doute à cette inconfortable position qui les maintient haut perchés sur un minuscule piédestal. A force, ils y prennent des crampes à ressasser leurs souvenirs et à lustrer leur ego au rythme des foules qui les implorent.
Prenez le général de Gaulle. Sa petite phrase – « l’âge est un naufrage »- est un modèle patenté d’assassinat. Soit : elle s’adressait à Pétain et non à lui-même (encore que sur le tard…). Mais vous verrez : passé un certain cap, cette rengaine vient vous titiller quasi quotidiennement.
Plus préoccupant, voire dégradant: En accusant crânement l’agresseur présumé du commissaire Vandersmissen d’appartenir au PTB, le u0022président à vieu0022 du PS a enfilé le masque interlope du délateur doublé du procureur en comparution immédiate
Question subsidiaire : vient-elle parfois effleurer Elio Di Rupo qui aimerait tellement passer un jour pour un homme d’Etat ? Parole de « vieux » (nous sommes nés la même année c’est vous dire…): j’ai un gros doute là-dessus. Le Montois autrefois à mes yeux plus matois, se pose en tout cas un peu là comme s’il était le président à vie du PS. Ne vient-il pas d’annoncer qu’il mènerait, à 69 ans, la campagne de 2019 comme si lui seul pouvait faire rempart de son corps à la concurrence? Di Rupo serait cependant bien inspiré de méfier de certains signes avant coureurs. Revenons, par exemple, sur sa double et très étrange réaction aux incidents qui ont émaillé la dernière manifestation du front commun syndical à Bruxelles. Qu’a dit EDR ? Exactement ceci : « Moi je suis un peu fatigué d’entendre toujours quand cela ne va pas: FGTB syndicat socialiste, syndicat socialiste ».
Alors là, pardon mais je ris ! Si le président en a « marre » que l’on taxe la FGTB de « syndicat socialiste » (aurait-il honte?) , et bien qu’il fasse voter une réforme des statuts qui exclue de facto du bureau de son parti … les patrons dudit syndicat. C’est entendu MM Bodson et Goblet n’y ont que voix consultatives et ils n’y assistent qu’extrêmement rarement (« et jamais depuis mon élection » tenait à préciser l’an dernier Goblet). Mais n’ergotons pas: cela aurait à tout le moins le mérite de clarifier les choses. Et, partant, d’enterrer ce qu’on appelait jadis l’Action commune (la « coupole » PS-FGTB-Mutualités socialistes) qui, croyez-le ou non, en période électorale sert encore très discrètement et très puissamment à … ne pas perdre trop de voix. Au dernier scrutin, l’intervention de Labille et de quelques caciques de la FGTB auprès de leurs affiliés a même sauvé in extremis le PS de la débâcle électorale.
Il y a cependant beaucoup plus préoccupant pour ne pas dire dégradant dans le chef du « Chef ». En accusant crânement l’agresseur présumé du commissaire Vandersmissen d’appartenir au PTB (ce que conteste farouchement celui que je me plais à surnommer Raoul Batibouw tant il semble pousser comme une statistique nord coréenne), le président à vie a enfilé le masque interlope du délateur doublé du procureur en comparution immédiate. Comme il est nerveux ! Comme il est inquiet ! Comme il mélange tout ! Comme il accuse ! Comme il juge ! Quoi ? L’enquête serait terminée ? Le type condamné ? Et, au fond, si l’agresseur présumé était, au hasard, membre de la FGTB, qu’est-ce que cela peut bien lui faire… puisque « la FGTB n’est pas socialiste ».
A ce train là, vous verrez : dans deux ou trois ans, je crains qu’EDR s’en aille partout en clamant que, lorsqu’il était Premier ministre, c’est l’archevêque de Malines Bruxelles qui, sous la menace d’un pistolet à eau bénite, l’a forcé à exclure des milliers de damnés de la crise du chômage. Foi de naufragé.
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