« Les musulmans ne réussissent pas à défendre leurs droits »
L’ancien imam, Sulayman Van Ael, estime que les musulmans flamands doivent se montrer plus ambitieux. « Nous devons montrer que l’islam profite au monde entier ».
Il y a un mois, l’imam Sulayman Van Ael a décidé de ne plus être imam. Pas suite à l’attention négative permanente qui pèse sur sa religion, mais parce qu’il ne souhaite plus être menacé. Malgré cette décision, il estime toujours que l’islam apporte une contribution positive à la société. « Je suis blessé qu’autant de personnes remettent la personne de Mohammed et l’islam en question. Je suis convaincu que beaucoup de gens comprendraient quel homme intellectuel et entreprenant il était, s’ils connaissaient ses paroles. C’était un homme avec une vision du monde dans lequel tout le monde avait sa place. Mais à présent, les gens fondent leur jugement sur ce que professent quelques fous extrémistes à la télévision ».
N’est-ce pas en partie de la faute des musulmans si ce message de tolérance ne passe pas ?
Van Ael: « Oh, j’en suis persuadé à 100%. Les gens ont besoin d’actes, pas de paroles. En tant que musulmans, nous pouvons continuer à dire que la foi est la solution, mais tant qu’on ne la rend pas tangible, nous n’irons nulle part. Nous devons davantage nous attarder à ce qui ne va pas dans notre communauté. Il faut montrer que l’islam profite au monde entier.
Êtes-vous d’avis que tous les djihadistes syriens commettent une erreur?
« Nous ne pouvons pas mettre tous ceux qui partent dans le même sac. Certains sont des psychopathes qui voient une opportunité de tuer et de torturer impunément. Mais beaucoup de jeunes qui y vont, voient la souffrance de la population en Syrie et pensent qu’ils peuvent aider. Si toute personne normalement constituée a mal en voyant ces images, les jeunes doivent réaliser aussi qu’on ne rend pas le monde plus sûr en faisant la guerre, mais en participant à tous les niveaux : social, économique, etc. En nourrissant les gens par exemple, en aidant les pauvres, en défendant les droits de la femme.
Les djihadistes diront qu’ils combattent pour éliminer les causes de cette douleur.
« La catastrophe est trop grande pour la résoudre sur place. Il y a trop de conflits locaux que nous ne connaissons pas. Beaucoup de Syriens ne savent plus contre qui et pourquoi ils se battent. Le premier veut fonder un petit pays islamique, le deuxième veut exprimer sa frustration, le troisième souhaite lutter contre les détenteurs du pouvoir. Nos jeunes en sont les victimes. Partir en Syrie n’est jamais la solution.
Estimez-vous que la politique d’intégration est un échec?
Je pense que la plupart des musulmans sont bien intégrés. Les musulmans ne causent pas de problèmes du fait qu’ils sont musulmans. Combien de Flamands ont déjà été interpellés par un musulman parce qu’ils buvaient une bière ? Ou parce qu’ils mangeaient un sandwich au jambon ? Cela n’arrive pas… Notre plus grand problème, c’est que nous n’arrivons pas à opposer un contrepoids aux extrémistes et à défendre nos droits.
Pourquoi?
« Par inertie, et à cause d’un complexe d’infériorité. De nombreux musulmans ont le sentiment que c’est un travail de Sisyphe, parce qu’ils pensent que personne ne leur fait confiance. On nie souvent que l’islamophobie existe dans notre société, mais les musulmans le sentent. Beaucoup d’entre eux en ont assez d’être associés à ce que font quelques fous au nom de leur religion et s’isolent davantage.
Est-il plus difficile pour les musulmans de grandir dans une société laïque ?
« Je ne vois pas pourquoi ce serait difficile. Cela dépend aussi de ce que vous considérez comme pratique de la religion. Pour moi, participer à la société est également une forme de pratique de sa foi. Que vous soyez gynécologue, dentiste ou économiste : tous ceux qui participent remplissent leurs devoirs de musulman.
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