Thierry Fiorilli

Les intérêts communs de la N-VA et du MR

Thierry Fiorilli Journaliste

Les résultats de l’étude universitaire menée il y a deux ans par la VUB et l’UCL sur le profil plus ou moins régionaliste/communautaire/fédéraliste des différents partis belges sont publiés à un moment particulièrement intéressant : un an avant les élections fédérales et régionales (en plus du scrutin européen), fixées au 25 mai 2014.

Un an, aujourd’hui, dans pratiquement tous les domaines, c’est une éternité. Durant laquelle tout peut basculer, tout peut changer radicalement. Reste que, en cette fin mai 2013, il n’est pas sot de considérer que la N-VA et le MR seront les deux partis principaux à négocier la formation des différents gouvernements – le fédéral et les trois régionaux. Avec le CD&V, au Nord, et le PS, à Bruxelles et au Sud, comme outsiders. Peut-être alliés, peut-être renvoyés dans l’opposition s’il y a moyen de constituer des majorités avec les autres partis et pour mieux atteindre ses propres objectifs respectifs.

Ceux de la N-VA sont connus : la disparition, à terme, de la Belgique. Ceux du MR ne sont pas secrets : ne plus laisser les clés wallonnes et bruxelloises au PS, qui les détient depuis 25 ans. Sans surprise donc, l’étude des trois universités relève que la N-VA est, avec le Vlaams Belang, le parti le plus en faveur d’une autonomie régionale radicale. Deux formations qui pourraient s’allier, après les élections de 2014, pour prendre la direction du prochain gouvernement flamand et se débarrasser du CD&V et du SP.A (à la rigueur, de l’Open-VLD aussi). Sans surprise non plus, le fait que le CD&V arrive juste derrière (dans les résultats de l’étude), et puis l’Open-VLD. Enseignement (ou confirmation) : c’est en Flandre qu’on trouve les partis les plus radicaux en termes de régionalisation profonde, avec deux d’entre eux prônant l’autonomie de la partie nord du pays.

Que, côté francophone, le MR soit le plus en pointe en matière de revendications de pouvoirs accrus aux régions peut paraître étonnant. Mais, sur le fond, moins qu’il n’apparaît à première vue : depuis avant le scrutin de 2010, l’alors président du Mouvement réformateur, Didier Reynders, répétait qu’il était temps de « déplacer le centre de gravité en Wallonie ». Autrement dit : qu’il fallait ravir la Wallonie à son « padre-padrone » socialiste. Pour la sortir d’une forme de conservatisme, pour la booster, la rendre plus crédible, moins dépendante des pouvoirs publics, plus entrepreneuriale, plus indépendante en somme. Le même Reynders, alors que le MR était encore allié au FDF, répétait après les élections de 2010, et durant une large part de l’interminable crise politico-institutionnelle qui en a découlé que « Flamands et francophones doivent voir ce qu’ils veulent encore faire ensemble. » Un autre discours que celui, plus socialiste et humaniste (au sens CDH du terme), consistant à clamer que « nous ne sommes demandeurs de rien ».

Le divorce d’avec le FDF (survenu en septembre 2011) et l’arrivée de Charles Michel à la direction du MR n’auront pas modifié fondamentalement la donne : les libéraux francophones sont ceux qui se présentent aujourd’hui, parmi les quatre grands partis traditionnels, comme les moins frileux face à l’évolution institutionnelle future du pays. Et, indique l’étude universitaire, c’est le PS qui s’accroche le plus au modèle actuel.

Si la N-VA et le MR, dans un an, remportent bien les élections, et avec suffisamment d’avance sur leurs concurrents, les deux partis qui négocieront l’avenir de la Belgique devraient particulièrement bien s’entendre. Sur les plans économique et social aussi. Pas sûr que la formation du gouvernement soit dès lors si douloureuse que ça.

De quoi, peut-être, apporter de l’eau au moulin de ceux qui annoncent (ou pressentent) l’abdication imminente d’Albert II, le Roi ayant peut-être moins à intervenir après mai 2014, pour aider à sortir de l’impasse, qu’il l’a fait après juin 2010.

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