Anne-Sophie Bailly
L’édito d’Anne-Sophie Bailly: il faut dépasser l’engagement pour le climat pour passer à l’action
« Ce n’est plus une conférence climat. C’est un festival de greenwashing des pays riches. Une célébration de deux semaines du business as usual et du bla-bla. » Greta Thunberg n’a pas mâché ses mots en claquant la porte d’une réunion consacrée à la compensation carbone en marge de la COP26. Avant d’enfoncer le clou sur Twitter en déclarant: « Shell, BP et Standard Chartered sont ici, à Glasgow, pour essayer d’intensifier la compensation et donner aux pollueurs un laissez-passer gratuit pour continuer à polluer. Leur plan pourrait ruiner l’objectif de 1,5°C. » Une position qui a été largement reprise lors des marches qui se sont tenues le week-end dernier, d’un bout à l’autre de la planète, pour appeler à l’action face au dérèglement climatique.
L’achat de droits de polluer, c’est la pru0026#xE9;servation de l’intu0026#xE9;ru0026#xEA;t individuel de court terme au du0026#xE9;triment du collectif u0026#xE0; long terme.
Il y a pourtant peu de chances qu’au terme de la COP26, ces militants soient totalement satisfaits des avancées engrangées, même si à mi-parcours, une centaine de pays s’étaient déjà engagés à réduire les émissions de méthane et si la sortie du charbon se dessinait. Mais atteindre cette fameuse neutralité carbone qui doit permettre de limiter le réchauffement climatique à 1,5° C au-dessus du niveau de température de l’ère postindustrielle n’est plus tant une affaire d’engagements que de réalisations et de traductions de ces engagements en politiques concrètes et, surtout, appliquées.
Car en matière d’engagements, les initiatives se multiplient depuis longtemps. De plus en plus d’entreprises, d’organismes, de groupes de musique même, cherchent à devenir « CO2 neutral ». Mais ils passent à l’action en compensant, parfois partiellement, parfois totalement, leurs émissions. Sans éviter, ni réduire drastiquement ou même suffisamment les gaz à effet de serre produits qui, selon le bilan annuel du Global Carbon Project, devraient d’ailleurs rebondir de 4,9% en 2021. Ces engagements vers la neutralité carbone se concrétisent dans l’achat de droits de polluer sans induire le nécessaire changement de mentalité.
La demande adressée à l’Europe de Zuhal Demir (N-VA) d’abaisser l’objectif de CO2 de la Belgique en est un autre exemple. La ministre flamande de l’Environnement dit soutenir la transition vers une Europe neutre climatiquement… pour autant que le pouvoir d’achat des Flamands soit préservé et la compétitivité des entreprises sauvegardée. Autrement dit, un engagement conditionné à la préservation de l’intérêt individuel de court terme au détriment du collectif à long terme.
Pourtant, il faudra bien accepter et faire percoler le message, aussi difficile soit-il à faire passer, que certaines manières de faire, de consommer, de produire sont révolues. Que certains privilèges devront être abandonnés. Qu’il faut dépasser l’engagement pour passer à l’action.
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