Le secteur des soins de santé se range derrière Maggie De Block et son plan de réforme
La santé financière des hôpitaux nous concerne tous. De leur pérennité dépend en grande partie la bonne santé de la population belge. C’est pourquoi Le Journal du médecin a lancé une grande enquête, en collaboration avec HealtCare Magazine, auprès des médecins généralistes, médecins spécialistes hospitaliers et directions d’hôpital.
Tous avalisent, sur le principe, les projets de réforme de la ministre Maggie De Block en matière de financement des hôpitaux. Ils souscrivent également à l’idée que les hôpitaux doivent devenir des centres médico-technologiques. Une majorité se montre favorable à la mise en place d’un ticket modérateur pour limiter le passage aux urgences des hôpitaux pour des pathologies bénignes. L’enquête a interrogé 1.461 médecins hospitaliers, directeurs d’hôpitaux et généralistes néerlandophones et francophones. Le sondage a été coordonné par l’Université d’Hasselt.
En juin dernier, la ministre des Affaires sociales Maggie De Block (Open VLD) avait annoncé une profonde et très attendue restructuration du financement hospitalier. Le temps presse, quand on sait que plus de 40 % des hôpitaux belges ne parviennent plus à garder la tête hors de l’eau financièrement. Le nombre d’établissements dans le rouge n’a cessé d’augmenter au cours des années.
Or de la santé financière des hôpitaux dépend notre santé tout court. Ce qui est en jeu ? L’accessibilité des soins et la pérennité du système belge de santé publique.
C’est pourquoi le bimestriel destiné aux gestionnaires d’hôpitaux Healthcare Magazine, ainsi que le Journal du médecin ont réalisé une enquête sur la politique et le financement hospitaliers. La particularité de celle-ci, une première en Belgique, est que les mêmes questions ont été posées aux médecins hospitaliers, aux médecins généralistes et aux directions des hôpitaux.
La ministre Maggie De Block entend faire tomber symboliquement les murs de l’hôpital, pour permettre un continuum des soins de santé. D’où l’importance de connaître l’avis des généralistes, des partenaires bien placés pour en parler et aussi les médecins spécialistes hospitaliers se voient prélever plus de 40% de leurs honoraires pour le fonctionnement de l’hôpital. Depuis longtemps, médecins et gestionnaires ne partagent plus toujours la même opinion. Il est donc crucial de connaître leur avis sur le fonctionnement des hôpitaux.
Les principaux enseignements du sondage sont les suivants :
- Une large majorité de médecins généralistes et de médecins spécialistes hospitaliers – plus de 80 % des deux catégories – soutient l’idée de Maggie De Block de calculer le financement en fonction de la complexité des soins et, par conséquent, de ne plus rémunérer uniquement à l’acte, comme c’est le cas aujourd’hui. Chez les directeurs d’hôpitaux, la proposition recueille carrément plus de 90 % d’avis favorables.
- Dans le même ordre d’idées, près de quatre répondants sur cinq sont d’accord avec l’idée de la ministre que les hôpitaux doivent se transformer en centres d’expertise médico-technologique, s’ouvrir au monde et devenir des points névralgiques des réseaux de soins. Ici aussi, les directeurs d’hôpitaux sont du même avis. Les fusions et synergies entre hôpitaux se poursuivront donc.
- Des millions de gens se présentent aux urgences des hôpitaux et ce nombre ne cesse d’augmenter. Pour diminuer l’afflux de patients, trois quarts des répondants se disent favorables à la mise en place généralisée d’un ticket modérateur ou d’un montant facturé à tout patient qui se présente aux urgences. 85 % des généralistes, évidemment impliqués dans les postes et les services de garde, avalisent cette proposition. Il n’en est pas de même pour les directeurs et les cadres hospitaliers, dont à peine 54,5% soutiennent l’idée. Pas étonnant, puisqu’une grande partie des hospitalisations débutent par un passage aux urgences, une importante source de revenus pour les hôpitaux. L’alternative aux urgences est bien évidemment les gardes de médecins généralistes qui sont relativement méconnues, surtout de certains publics précarisés.
- Environ 60% des généralistes et des spécialistes hospitaliers ne pensent pas qu’il y ait une suroffre de lits aigus dans les hôpitaux et qu’il faut continuer à réduire leur nombre. A l’opposé, deux tiers des directeurs et des cadres hospitaliers sont d’avis qu’une réduction supplémentaire est envisageable. Sur ce sujet donc, les avis divergent.
- Le sondage révèle également une relative méconnaissance du fonctionnement et du financement des hôpitaux. Les médecins surtout subissent le système sans comprendre. Il faut dire que la complexité et l’opacité du financement hospitalier n’y aident pas. Les patients, qui réclament via leurs associations de participer à la gestion hospitalière, en savent généralement encore moins. Une simplification serait de bon augure.
Interrogée par le Journal du médecin, la ministre de la Santé publique, Maggie De Block s’est dite heureuse du résultat : « Le sondage démontre qu’il existe un large consensus pour réformer le financement hospitalier. C’est un signal très positif. Il démontre que médecins hospitaliers, médecins généralistes, directeurs d’hôpitaux sont persuadés qu’il faut réformer et modifier le système pour en assurer l’accessibilité, la soutenabilité et la qualité. Maintenant et dans l’avenir. »
La ministre est toutefois consciente que les avis divergent. C’est pourquoi elle pratiquera tout au long du processus une large concertation. Un groupe de travail fonctionne en temps réel au sein du cabinet De Block.
L’ampleur de la réforme des hôpitaux, indispensable pour assurer la pérennité de l’outil et continuer d’offrir des soins spécialisés abordables financièrement, est telle qu’il faudra à la ministre au moins deux mandats pour arriver à ses fins. Les électeurs auront donc leur mot à dire.
Nicolas de Pape
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