Crédit: Hatim Kaghat

Le secteur de la santé attend des mesures plus fortes du gouvernement

Le Vif

À la suite des nouvelles mesures pour lutter contre la propagation du covid-19, dévoilées par le comité de concertation, le secteur de la santé s’impatiente et réclame des mesures plus strictes et plus efficaces. L’Association belge des syndicats médicaux (Absym), la fédération des établissements de soins Santhéa et le Collège de Médecine générale francophone de Belgique (CMG) réagissent.

« Depuis hier, les hôpitaux ont reçu l’ordre d’arrêter les opérations chirurgicales, on ne va plus faire que des soins vitaux dans les hôpitaux dans les prochains jours, voire les prochains mois », explique le président de l’Absym, Philippe Devos. « On a décidé de s’orienter vers les soins afin de s’assurer que la médecine puisse sauver le plus de vies possibles […] Ce virus ne donne pas droit à l’erreur. »

Les résultats des mesures décidées ces derniers jours seront visibles dans une semaine, ajoute M. Devos. « Là on sera fixés: si au 1er novembre on ne constate pas un aplatissement de la courbe, la situation risque d’être dramatique dans les hôpitaux », alerte-t-il. « On fait déjà face à beaucoup plus de cas que lors de la première vague dans beaucoup de provinces, et les limites se rapprochent. »

En effet, certains établissements préviennent déjà de leur incapacité à passer en phase 2B, compte tenu du manque de personnel, notamment dans les provinces de Hainaut et Liège ainsi qu’en Région Bruxelles-Capitale, où il y a « en moyenne 20% de médecins et infirmiers absents ». Aujourd’hui, en phase 2A, « on est dans une situation où on demande 15% de lits en plus, avec 20% de personnel en moins. La 2B c’est 40% de lits en plus », précise M. Devos.

Et le cercle vicieux n’est pas loin: les professionnels de santé n’échappant pas aux contaminations, ils se retrouvent à l’arrêt en cas d’infection avec symptômes, aggravant l’absentéisme dans le secteur.

« On met sur la touche beaucoup de travailleurs », s’inquiète le président du CMG, Christophe Barbu. « Les malades d’aujourd’hui sont les hospitalisés de demain et les morts d’après-demain, ça nous inquiète tant du point du vue sanitaire qu’économique […] Il y a énormément de malades, qui ne participent donc pas à la société et la vie économique ».

« On ne peut que tirer la sonnette d’alarme » regrette M. Barbu, selon qui les mesures de distanciation ne fonctionnent pas. « La situation est très inégale dans le pays. Il faut des mesures drastiques. »

Le directeur général de Santhéa, Yves Smeets est, lui, formel: « Les mesures actuelles sont insuffisantes pour aplatir la courbe. On court à la catastrophe », explique celui qui se dit extrêmement déçu du déroulement des événements.

« Il faut aller beaucoup plus loin, instaurer un couvre-feu plus large », à l’instar de celui imposé à plus de la moitié des Français. « Ce n’est pas en supprimant les compétitions sportives que ça va changer suffisamment. Le virus continue de circuler à l’école, dans les magasins, dans les transports en commun et au sein de la famille. »

« Nous ne voulons pas que notre système de santé s’écroule »

Les nouvelles mesures annoncées par le Comité de concertation vendredi matin sont « tout à fait insuffisantes », avertissent trois fédérations hospitalières (Gibbis, Santhea et Unessa), qui s’associent pour envoyer un nouvel appel à l’aide aux autorités du pays. À partir du 2 novembre, tous les hôpitaux belges devront réserver 60% de leurs lits en soins intensifs pour les patients atteints du Covid-19 et en créer 15% de plus. « Certains ont déjà dépassé ce cap », assurent les trois fédérations.

« Quelles sont les mesures prises aujourd’hui qui vont avoir un réel impact sur les hospitalisations sans cesse croissantes ? », questionnent-elles, alors que la Belgique affiche pour la première fois une moyenne de 10.000 nouveaux cas quotidiens de Covid-19.

« À cela s’ajoutent les nouvelles hospitalisations en constante augmentation », avec plus de 400 admissions par jour. « Le personnel soignant et les hôpitaux ne vont pas tenir le coup », préviennent Gibbis, Santhea et Unessa.

Dès lundi, toutes les interventions non urgentes devront être reportées, un choix « indispensable pour pouvoir garantir une prise en charge optimale des patients Covid ». Toutefois, « aujourd’hui plus que jamais, notre préoccupation première est de ne laisser personne sur le carreau. Nous voulons à tout prix pouvoir prendre en charge aussi bien les patients Covid que non-Covid avec des pathologies essentielles et urgentes », expliquent les représentants des établissements de soins.

« Nous ne voulons pas que notre système de santé s’écroule. Dans tout le pays, les hôpitaux sont sur les charbons ardents », alertent-ils. « De plus en plus d’hôpitaux arrivent à saturation (…) Nos hôpitaux manquent cruellement de main d’oeuvre. » Le taux d’absentéisme toutes causes confondues (Covid, burn-out, autres pathologies) dans les institutions hospitalières avoisine désormais les 20%, avec des pics à 30% dans certains hôpitaux.

« Comme durant la première vague, nos hôpitaux et leur personnel sont prêts à donner le meilleur d’eux-mêmes, mais nous insistons sur l’importance de soutenir nos soignants », écrivent les organisations.

« Des décisions fortes et urgentes sont cependant indispensables pour aplatir la courbe et faire en sorte que notre système de soins de santé tienne le coup sur le court et le long terme. Nous insistons pour que les autorités prennent leurs responsabilités et envisagent toutes les pistes possibles pour renforcer les mesures et soutenir concrètement le personnel soignant », concluent-elles.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire