Joyce Azar
« Le pari risqué d’un Netflix flamand »
Entre développements technologiques et évolution des modes de consommation, le paysage médiatique est en constante mutation.
En Belgique francophone, LN24 a pris son envol le 2 septembre dernier pour devenir la première chaîne d’info en continu. Côté radio, la RTBF a profité de la vague numérique du DAB+ pour lancer Jam et Viva+, alors que BX1 s’est tourné vers l’outil accessible qu’est Internet pour émettre sa nouvelle webradio régionale. Au nord du pays, une version flamande du célèbre magazine américain Newsweek a vu le jour. L’édition est mensuelle, pour permettre au lecteur de prendre son temps.
Mais répondre aux besoins du public peut parfois coûter cher. Le 24 septembre, DPG Media, le plus grand groupe médiatique de Flandre, a annoncé une importante restructuration. Un quart des emplois vont devoir passer à la trappe au sein des chaînes télés VTM, Q2, Vitaya et CAZ. Objectif de la société : s’offrir les moyens d’élaborer une plateforme flamande de streaming. Aux yeux de la direction, cette réorganisation est un mal nécessaire. » DPG Media est actuellement une entreprise saine, mais pour le rester, nous devons nous adapter « , a défendu son CEO, Kris Vervaet. L’an dernier, la maison mère de VTM a subi une baisse de son chiffre d’affaires publicitaire. En cause, le succès des plateformes de streaming et la hausse du visionnage télé en différé.
DPG Media a donc décidé d’axer sa stratégie sur le numérique en lançant un » Netflix flamand « . En échange d’un abonnement payant, le public aura accès à un grand nombre de fictions flamandes et internationales. L’entreprise espère ainsi percevoir de nouveaux revenus tout en récupérant les spectateurs perdus au fil des désabonnements de la télédistribution.
L’idée n’est en fait pas neuve. Il y a un an, Medialaan, qui a depuis fusionné avec De Persgroep (VTM, DeMorgen, Het Laatste Nieuws…) pour former DPG Media, avait proposé aux autres chaînes flamandes et fournisseurs TV de s’unir sur une plateforme numérique pour contrer les grands acteurs du streaming. Les principaux interpellés se sont toutefois montrés frileux, et c’est donc seul que DPG Media a décidé de se lancer dans l’aventure. Celle-ci s’annonce périlleuse car la concurrence américaine est rude. Pour faire le poids, le groupe flamand devra parvenir à s’approprier les droits de séries cultes à coups de millions d’euros. Afin de combiner qualité et originalité, il devra aussi investir dans la réalisation coûteuse de séries propres, alors que VTM est aujourd’hui davantage axée sur les émissions de divertissement. Le contenu de la plateforme, et le prix auquel il sera proposé, seront primordiaux pour parvenir à convaincre les fidèles de Netflix, Proximus ou Telenet à changer d’abonnement, ou à ne pas rejoindre le géant Disney+, dont l’arrivée en Belgique ne saurait tarder.
Face à ce qui prend l’allure d’un combat entre David et Goliath, DPG Media ne se décourage pas. Il évoque notamment le succès de projets similaires dans d’autres pays européens, des pays où différentes chaînes ont toutefois accepté de s’unir. Le groupe renvoie aussi au lancement, considéré par certains comme risqué, de la chaîne privée VTM il y a trente ans. Seulement à l’époque, la menace ne provenait que d’un seul et unique concurrent, la VRT.
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