Rik Daems
Le paradoxe de la monarchie et de la démocratie
Une monarchie et une démocratie qui fonctionnent bien sont-elles compatibles en pratique? Et un chef de l’état élu vaudrait-il mieux pour notre démocratie? En tant que démocrate convaincu, il me semble que c’est la question de base à laquelle il faut répondre.
Le réputé » Democracy Barometer », une étude du professeur Herman Matthijs nous apporte quelques éléments de réponse.
Le Democracy Barometer est un projet scientifique international reconnu qui vérifie quelle démocratie fonctionne le mieux dans le monde. Le classement est peu discuté : la Belgique se trouve immanquablement dans le top trois du monde. Le Danemark et la Finlande complètent ce top trois. En outre, cinq sur les sept pays en tête de classement sont des monarchies. Les deux non-monarchies sont la Finlande et … l’Islande. D’importants régimes présidentiels tels que l’Allemagne, les États-Unis et surtout la France se situent beaucoup plus bas. Certains n’atteignent même pas la vingtième place.
D’après une étude récente du professeur Herman Matthijs, le coût de notre monarchie se révèle très raisonnable comparé aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni. Et certainement par rapport à nos pays voisins présidentiels que sont l’Allemagne ou la France.
Chez nous, comme en Suède et au Danemark, les coûts s’élèvent à environ 14 millions d’euros. Les Pays-Bas et le Royaume-Uni se situent dans la tranche des 40 millions d’euros. L’Allemagne oscille autour des 30 millions d’euros alors que la France dépasse largement les 110 millions d’euros. Une monarchie, et certainement la monarchie belge, s’avère donc meilleur marché qu’un régime présidentiel. Cependant, la Belgique se trouve dans le gros peloton des pays dont les dépenses sont formellement trop peu transparentes bien que le site web du Palais offre de nombreuses informations.
Notre pays est une monarchie constitutionnelle. Concrètement, cela implique que les droits et les devoirs sont clairement limités dans la constitution. Ce qui est remarquable, c’est que tout acte du roi doit être expressément appuyé par une majorité parlementaire. Et l’article 106 de la constitution stipule littéralement : « Aucun acte du Roi ne peut avoir d’effet, s’il n’est contresigné par un ministre, qui, par cela seul, s’en rend responsable ».
La monarchie de notre pays dispose donc d’un pouvoir politique très limité. En outre, elle reçoit de fait une représentation de plus en plus représentative et symbolique.
Il y a deux moments où le roi joue un rôle politique : lors de la formation d’un gouvernement fédéral et lors de la ratification ou de la promulgation des lois. Notez que ce n’est pas le cas des gouvernements régionaux, qui ont de plus en plus de poids politique, en grande partie grâce à l’accord récent sur la réforme de l’état.
Malgré le contraste apparent entre la monarchie et une démocratie qui fonctionne bien, les deux sont parfaitement compatibles en pratique. A condition que le pouvoir politique du chef de l’état demeure très limité, ou soit formellement réduit à un minimum.
Cela signifie-t-il qu’aucune évolution n’est envisageable? Selon moi, oui, même si ce n’était que pour faire correspondre formellement les lois aux faits sur le terrain.
Tout comme en Flandre, la signature et la promulgation de lois fédérales ne semblent plus des tâches fondamentalement royales. Et la nomination de ministres, le cas échéant avec une exception pour le ministre, ne me semble pas non plus devoir être maintenue absolument.
En outre, n’oublions pas que, nulle part, le pouvoir formel n’est donné au roi pour intervenir dans une formation de gouvernement, quelle qu’elle soit. Aujourd’hui, la politique fédérale est parfaitement capable de prendre ce pouvoir en main si elle veut. Mais de nombreuses personnes reconnaîtront qu’une intervention royale neutre dans la formation du gouvernement fédéral a prouvé son utilité plus d’une fois. Certainement dans un pays aussi complexe et sensible au niveau communautaire que la Belgique.
Par contre, la transparence de la liste civile et des dotations me semble un must à court terme. L’argent des impôts doit pouvoir être justifié à tout moment.
Il est cependant certain qu’on se dirige de plus en plus vers une royauté protocolaire. Ce changement s’inscrit en effet dans l’évolution des dernières décennies qui a vu de plus en plus limiter le rôle politique du chef de l’état. En revanche, il ne faut pas diminuer le contenu et l’impact de sa tâche représentative et protocolaire dont la valeur deviendra de plus en plus claire.
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