Le monde politique belge débordé par ce Covid pratiquement hors de contrôle (analyse)
Nos dirigeants réagissent trop tard, ciblent étrangement les restaurants, tandis que le système de tests et de traçage est débordé. Le risque d’un tsunami de mécontentement sur la politique.
Ce lundi 19 octobre marque donc un nouveau pas dans une nouvelle vie proche du lockdown. Les cafés et restaurants sont fermés, les contacts sociaux réduits à rien, le télétravail est « la règle » (sans qu’on utilise le terme « obligatoire », étrangement) et d’autres mesures sont déjà annoncées cette semaine pour le sport et la culture. En cette ère de pandémie, tout ce qui est essentiel devient superflu et doit être proscrit. Et les Belges font grise mine, à nouveau.
Le Premier ministre Alexander De Croo (Open VLD) et le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke (SP.A) étaient les plus déterminés à obtenir des mesures fortes lors du Comité de concertation de vendredi. Tout au long du week-end, ils ont insisté sur la « gravité » de la situation comparé aux pays voisins, plus préoccupante encore à Bruxelles et en Wallonie que lorsque le confinement avait été décidé à la mi-mars. Frank Vandebroucke parle de « tsunami », mais c’est effectivement un tsunami qui déferle sur un monde politique belge visiblement débordé par la Covid.
La cohérence des mesures annoncées vendredi a occupé les débats dans tous les sens. Le secteur Horeca est furieux d’être visé en premier alors que les études ne démontrent pas que les « clusters » se situent dans les bars et restaurants. Les listes de traçage réclamées par les autorités n’ont jamais été consultées. Des recours sont déjà annoncés. La décision aurait été emportée finalement, lors du Comité de concertation, après un pressing acharné du Premier ministre et de son collègue de la Santé, se basant sur une note d’experts évoquant des exemples… chinois et japonais. Le Premier ministre réplique que le secteur n’est pas considéré comme le mauvais élève de la classe, mais qu’il fallait agir.
Pierre-Yves Dermagne, vice-Premier PS, résume: « La question des sources de contaminations est devenue sans objet ». Sic transit. Parce que l’on est en réalité déjà au-delà, qu’il est minuit moins une avant un lockdown complet….
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Quelques heures après cet échange édifiant, un urgentiste de Liège au micro d’@AnneSoBkx ce matin. Le ton de l’échange n’encourageait guère à aller ni à l’école, ni au resto, ni dans un tram. Merci de travailler à savoir comment organiser nos vies en lockdown. @JohanneMontay
— JLG (@JiLJay) October 19, 2020
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L’épidémie semble pratiquement hors de contrôle dans certains endroits du pays et les digues placées jusqu’ici par nos politiques cèdent les unes après les autres. Le système de tests élaboré pour gérer les contaminations et isoler les positifs a complètement explosé. C’était visible depuis plusieurs jours, au rythme des files démesurées dans les centres wallons, mais une réunion a désormais lieu ce lundi pour revoir le processus et recentrer ce testing sur les personnes les plus vulnérables. Nous en revenons visiblement, alors que les chiffres s’affolent, à la nécessité de sauver ce qui peut l’être.
Maxime Prévot, président du CDH, dénonce ce lundi matin dans La Libre : « Les gouvernements ont fait preuve d’amateurisme dans la gestion de la crise ». C’est évidemment facile à dire pour un petit parti qui ne fait partie d’aucun d’entre eux, mais il faut bien avouer que le constat est le même depuis mars : trop peu, trop tard et trop confus – il suffit de rappeler à cette séquence des couvre-feux dans deux provinces, la semaine passée. Il faut bien avouer aussi qu’il était surréaliste de voir des matchs de football avec publics, ce week-end, alors que le ton était à un alarmisme très prononcé – mais cela, entendait-on, est moins grave parce que cela a lieu en extérieur…
Des mesures vont pourtant toucher le sport et la culture, cette semaine. Au minimum. Les partis de la majorité fédérale défendent le résultat du Comité de concertation, même si plusieurs d’entre eux étaient réservés au sujet des restaurants. Et que cela se fait parfois du bout des lèvres: « A partir du moment où c’est tranché, je me dois d’être loyal », lâche un David Clarinval (MR). Bart De Wever (N-VA) dit d’ailleurs ne pas comprendre la fermeture des restaurants. L’objectif reste bien celui de maintenir les écoles ouvertes et de préserver autant que possible l’économie, mais il n’est pas audible par tous. A entendre les cris d’alarme des services d’urgence des hôpitaux, on doit en outre se rendre à l’évidence: l’ombre d’un reconfinement général plane plus que jamais sur la Belgique.
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Donc sa logique est de fermer les écoles pour permettre d’aller au resto ? Je soutiens de tout coeur l’HORECA mais ce raisonnement qui consiste à penser qu’il faut faire des choix au détriment de l’enseignement est surréaliste.
— Georges-L BOUCHEZ (@GLBouchez) October 18, 2020
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Le baromètre que les autorités devaient présenter pour gérer la crise de façon plus sereine est reporté sine die. Des mesures de soutien sont prises pour tenter de sauver les secteurs ciblés par les restrictions. Le gouvernement fédéral Vivaldi n’est jamais à la manoeuvre que depuis deux semaines, il tente certes gérer le déficit laissé par un certain « vide de pouvoir » lors des négociations fédérales, mais il donne, là, l’image d’une urgence absolue et d’une panique à bord. Et la perception risque d’être rude au Nord du pays: un gouvernement minoritaire, dominé par les francophones prend des mesures très dures en raison de la gravité de la situation du côté francophone.
A ce rythme-là, après une adhésion relâchée de la population aux décisions, il se pourrait qu’un autre tsunami s’abatte sur le pays : celui d’un mécontentement généralisé.
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