Assistons-nous en France comme en Belgique à la fin du socialisme politique tel que né à la fin du 19e siècle ?
La situation du parti socialiste français diffère bien sûr fondamentalement de son alter ego belge. Chez nos voisins, malgré des scandales çà et là, c’est plus l’usure du pouvoir, l’inanition du quinquennat Hollande et le surgissement du phénomène Macron qui précipitent sa disparition.
La gauche française opère une mue, elle ne disparaît pas. Le PS hexagonal a « simplement » été siphonné par Jean-Luc Mélenchon et à sa droite par La République En Marche (REM).
On assiste à l’avènement tant espéré d’une gauche à l’Américaine, qui accepte, comme en Grande-Bretagne et en Allemagne, l’économie de marché et vire définitivement sa cuti marxiste. Le télévangéliste libéral-social Macron est le Justin Trudeau français, avec davantage de fond tant littéraire, culturel qu’économique.
Ces jours-ci, n’importe quel chien avec un chapeau sous les couleurs de la REM peut être élu, comme en témoigne la différence de traitement entre deux anciennes ministres de François Hollande, Pascale Boistard, sèchement battue dans la Somme sous la bannière PS et Barbara Pompili sous le drapeau de la REM réalisant le très bon score de 40,7% au premier tour des Législatives.
Peu importe que Michel Onfray (contre qui le nouveau président a décidé de créer une cellule riposte car il prend lui et Zemmour trop de place dans le récit national) y voit une vague de désespoir plutôt que d’espoir : ni l’incompétence (Colboc), ni l’estompement de la norme (Ferrand), ni le fait d’avoir écrit un livre décrivant les manières de frauder la sécu (Schiappa), n’est sanctionné lorsqu’on est un « marcheur ». La mer Rouge s’ouvre devant Macron qui a dévoré le parti socialiste du haut de son jeunisme dans une Assemblée nationale où il ne fait pas bon avoir plus de 50 ans. C’est Mitterrand, 30 ans plus tôt, qui faisait subir au parti communiste la même étreinte du boa.
En Belgique, ce sont davantage les affaires qui tirent notre PS vers le bas bien qu’elles soient liées aussi à l’usure du pouvoir et à la manière de l’exercer.
Après celles qui frappèrent Van Cau à Charleroi en 2005, Il fallait être naïf pour croire que les autres grosses fédérations socialistes aient pu être épargnées. A Liège comme à Bruxelles, les parvenus se sont accrochés. Comme le disait avec une certaine candeur José Happart lors du scandale de ses indemnités de départ, le clientélisme est une des mamelles du PS qui ne peut vivre sans. Nonobstant un nombre substantiel de socialistes honnêtes et idéalistes qui le composent, le PS a donc attisé les braises de son indispensable combustible : se servir dans le secteur public là où un Armand De Decker se sert dans le secteur privé. On a même parlé à propos d’Yvan Mayeur du complexe de l’assistant social dans un PS dominé par les technocrates bardés de diplôme. Circonstance aggravante : à chaque fois (énergie, télédistribution, hôpitaux, samu social), ce sont in fine les sans-grades -ceux qu’on prétendait protéger – qu’on plume.
Aujourd’hui, on pourrait croire que la question de la disparition pure et simple du PS belge ne se pose pas tant ses assises et ses ramifications sont ancrées dans la sociologie de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Mais sur sa gauche, le siphon du PTB, du haut de sa virginité démocratique qui lui dispute son idéologie totalitaire, ouvre grande sa bouche.
Si d’aventure, les designers d’un En Marche! belge arrivaient à leurs fins, il pourrait arriver au PS belge la même mésaventure que son équivalent français. Le PTB et En Marche ! se partageraient, à babord et à tribord, ses oripeaux. Verrait-on un Paul Magnette ou un Rudy Demotte s’y arrimer ?
Le phénomène est d’autant plus à tenir à l’oeil pour les socialistes francophones que le vent de renouveau qui balaie l’Union européenne fondatrice sanctionne tout autant l’ancienne gauche que les conservateurs (Les Républicains, Theresa May) et les populistes (Marine Le Pen et même Geert Wilders).
L’agonie naissante de ces droites-là reste un mystère tant les problématiques qui les nourrissaient (terrorisme, communautarisme, insécurité, relégation, chômage) sont plus présentes que jamais. Peut-être les électeurs continuent de penser que ces partis posent les bonnes questions mais n’apportent aucune réponse ? A moins que ce ne soit la personnalité caractérielle et anxiogène de certains de leurs dirigeants ? Leur présence, elle-aussi, ininterrompue à la télé depuis des décennies ?
Quoi qu’il en soit, le grand nettoyage a commencé.
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