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La Vivaldi coincée entre ses contradictions, le MR fragilisé et l’opposition remontée (analyse)

Olivier Mouton Journaliste

Les interprétations différentes sur le relèvement de la pension, la gaffe de Georges-Louis Bouchez, les attaques radicales de l’opposition et le déficit de confiance mettent déjà le gouvernement De Croo sous pression.

Les premiers pas de la Vivaldi sont difficiles. Et le débat sur la déclration de politique général faite jeudi par le Premier ministre Alexander De Croo (Open VLD), s’annonce houleux: il début ce vendredi à 10h et devrait durer toute la journée.

Quatre éléments, au moins, expliquent pourquoi la nouvelle majorité va déjà devoir bomber le torse.

Les premières contradictions PS-MR

A peine le programme complet de la Vivaldi dévoilé, les premières divergences ont vu le jour, sur un sujet ô combien emblématique: l’augmentation de la pension minimale à 1500 euros. Bruts ou nets? Le MR et le PS donnent des lectures différentes de l’accord. Dans le texte du programme, il est précisé que ce sera bien « nets », mais il s’agit bien de tendre vers cela et beaucoup de politiques annoncées dans ce plan visent… l’horizon 2030. Pour les socialistes Paul Magnette et Pierre-Yves Dermagne, vice-Premier, c’est bel et bien un montant « net », pour un coût d’environ 2,2 milliards. Le président libéral, Georges-Louis Bouchez, affirme pour sa part qu’il s’agit le relever dans un premier temps vers le « brut » (dont coût 760 millions) avant d’aller vers le « net » (dont coût… plus de trois milliards d’euros). Le ton n’est pas encore monté très haut, mais vu que le texte initial laisse de telles failles dans de nombreux domaines, cela laisse augurer de nombreux bras de fer dans les prochains mois.

La fragilisation du MR

Ce n’est jamais une bonne nouvelle dans une coalition quand un de ses membres est fragilisé. Le MR, incontestablement, l’est, et pas un peu. Son président Georges-Louis Bouchez avait déjà été secoué par ses partenaires durant les négociations, il est désormais fortement critiqué en interne après le couac de son casting. Cela fait beaucoup et le parti se réveillé groggy, lui qui perdait déjà sa position dominante acquise durant les gouvernements Wilmès et Michel. La nomination manquée de Denis Ducarme au gouvernement wallon fâche pour de nombreuses raisons: manque de concertation y compris des autres ministres wallons, amateurisme que de ne pas avoir tenu compte du décret wallon sur la parité, domination du « clan Michel » avec la nomination de Mathieu, frère de Charles, au gouvernement fédéral… Les bleus sont mal en point, cherchent des solutions, mais un animal blessé est souvent imprévisible au coeur d’une meute.

Les attaques de l’opposition

Cela est évidemment plus logique pour une majorité qui vient de naître: l’opposition l’attend au tournant. Mais dans ce cas, cela risque de tourner au pugilat en raison du poids des extrêmes. En Flandre, la N-VA et le Vlaams Belang dénoncent un gouvernement antiflamand, pléthorique, dominé par les accents « socialistes et écologistes » (dixit Bart De Wever)… Du côté francophone, le PTB critique une équipe qui poursuit le trvail de la Suédoise de Charles Michel et pointe du doigt les renoncements rouges-verts, notamment sur la promesse de remettre la pension à 65 ans (le PS explique que, dans les faits, il en sera ainsi). Quant au « petits » CDH et DéFI, ils crient moins forts, mais ils dénoncent l’incompatibilité entre les promesses et le budget. Autrement dit, cela va partir dans tous les sens.

Le déficit de confiance

Les Belges sont soulagés d’avoir enfin un gouvernement fédéral, après seize mois d’errance, mais cela ne signifie pas qu’ils l’adoptent, très loin de là. Un sondage express Ipsos/Le Soir/ RTL montrait jeudi soir que 46% des personnes interrogées ne font pas confiance à la Vivaldi – et cette proportion est majoitaire en Flandre, où les deux premiers partis sont rejetés dans l’opposition. Il faudra être sacrément fort pour inverser la tendance. Le nouveau Premier ministre a reconnu qu’il était conscient de la situation et qu’il respectait ceux qui ne croient pas en son équipe, en insistant précisément sur la nécessité de mettre en place une « stratégie de confiance » en plus d’un stratégie de relance. La tâche de cette équipe jeune et hétéroclite est toutefois dantesque: rebond sanitaire, crise socio-économique, défi climatique et fossé démocratique. Le côté positif, c’est son humilité et le fait qu’elle en soit consciente. La double crainte, c’est son amateurisme et ses divisions internes.

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