Erkan Ozdemir
La moutonnerie bruxelloise de la fête du sacrifice édition 2016
D’aucuns savent que ce lundi 12 septembre 2016 était la plus grande fête du monde musulman. Mais la décision de la Région d’organiser l’abattage pour l’ensemble des 19 communes bruxelloises l’a transformé en morosité mixée d’aigreur pour les personnes dupées.
La « fête du sacrifice » (Kurban Bayrami ou l’Aïd el Kebir) célèbre un épisode relaté dans le Coran. Selon le texte religieux, Dieu (exalté soit-il) demanda au prophète Ibrahim (ou Abraham) de sacrifier son fils, le prophète Ismaïl, pour éprouver sa foi. Alors que le prophète Ibrahim s’apprêtait à immoler (lire sacrifier) l’enfant à l’aide d’un couteau, l’ange Gabriel (ou Cebraïl) arrêta son geste et remplaça le corps de l’enfant par un mouton. Cet événement est commémoré par les musulmans sous la forme d’un sacrifice animal et représente un moment clef dans le cycle éducatif d’une famille musulmane.
Malgré l’aspect remémorant cet acte héroïque d’un père en détresse qui fait preuve d’une foi imperturbable, je me retrouve malgré moi à écrire ces lignes avec un arrière-goût amer de désespoir et de rancoeur.
J’ai vécu une séance calamiteuse devant les bains de Schaerbeek à la rue de Jérusalem.
En effet, il y avait là un agglutinement de gens dans la joie inespérée de réceptionner leur mouton prêt à être partagé et à être consommé. Le partage de 2/3 du mouton égorgé aux plus nécessiteux est une obligation.
Après avoir discuté longuement avec les personnes présentes, j’apprends qu’un manque criant d’organisation et de communication constituait les maîtres mots de cette période censée être festive. Après vérification, il régnait, en effet, une ambiance générale de morosité mixée à une aigreur de personnes dupées.
Malheureusement, la finalité de cette soirée du 13 septembre prendra vite des allures de désemparement total au regard de la livraison du camion tant attendu.
La société ITC, responsable des abattages, avait été désignée via une procédure d’appel d’offres par la Région de Bruxelles. Elle devait déjà répondre présente le lundi 12 septembre à partir de 14h; ce qui n’a jamais été le cas.
En revanche, les musulmans présents avaient évidemment pris la précaution de prendre congé auprès de leur employeur et sont restés parfois plus de 10 heures sous un soleil de plomb.
Le camion de livraison n’est jamais arrivé! Pourtant 114 familles (Schaerbeekoises, Woluwétoises et Auderghemoises) attendaient leur dû. Un dû payé et parfois même très cher. Ce mardi, j’ai vu des familles avec enfants déchanter pour la énième fois.
Le camion est arrivé, oui, mais son contenu n’était pas à la hauteur des attentes. 18 carcasses de moutons sont suspendues dans la remorque frigorifiée. Celles-ci ne sont pas numérotées et donc forcément pas identifiables par le propriétaire initial.
Pour la deuxième fois et apparentée à la réception lourde d’un ascenseur émotionnel, ces victimes musulmanes, qui ont fait le déplacement pour la troisième fois se sont retrouvées face à un dilemme énorme et illégitime : laisser repartir le camion avec son contenu dérisoire dans un élan de solidarité avec le reste du groupe ou laisser profiter une partie du groupe présent??
Je suis outré par cette ingérence de la Région qui « chipe » la vedette aux autorités communales dans le but dépassé de l’intérêt financier.
L’heure est grave et elle n’est plus à chercher absolument un bouc émissaire sur qui les politiques vont s’adonner à coeur joie.
Durant cette expédition, je n’ai vu aucun politique d’origine turque ni marocaine. Pourtant, ces derniers promettent la pluie et le beau temps en prônant une objectivité sans reproche en faveur de la communauté musulmane qu’ils représentent.
C’est la raison pour laquelle, j’émets l’idée de pouvoir créer une plateforme citoyenne musulmane qui pourra participer lors de la prise de décision de cette envergure. Cet échantillon de citoyens de tout bord aura pour ambition de travailler en « workshop » avec les politiques communaux ou régionaux et ainsi de trouver la solution idéale cautionnée par toutes les parties prenantes. Ces personnes invitées n’auront évidemment aucune ambition salariale et ne devront se réunir que de manière sporadique.
Je pense qu’il y a dans le sens de cette piste lancée, une consultation populaire qui devient inévitable, car qui connait mieux la détresse du peuple à part le peuple??
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