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La criminalité en Belgique baisse pour la septième année consécutive

Michel Vandersmissen Journaliste pour Knack

Votre intuition vous dit peut-être autre chose, mais pourtant le nombre de faits criminels enregistrés baisse pour la septième année consécutive. « La Belgique n’est vraiment pas un pays où l’on peut agir impunément. »

Une bande de filles sème la terreur à Bruges. Des étudiants sont battus et dévalisés. Des criminels mineurs sont libérés parce qu’il n’y a pas de place en centre fermé. Si l’on en croit les nouvelles récentes parues dans les médias, notre société n’a jamais paru plus criminelle.

La perception, c’est la réalité, dit-on parfois, mais dans ce cas-ci, c’est inexact. Depuis le point culminant de 2011, le nombre de faits criminels enregistrés a baissé tous les ans en Belgique – et considérablement. La baisse s’est poursuivie jusqu’au premier semestre de l’année passée, les chiffres les plus récents disponibles.

2011 était « l’année la plus criminelle », avec en tout 1.063.254 faits criminels enregistrés. Il s’agit de crimes déclarés à la police, et pour lesquels un procès-verbal a été établi. En 2015, on a déclaré près de 920 000 crimes. Ce nombre a baissé à 884.615 en 2016: une baisse d’environ 5%. Lors des six premiers mois de l’année dernière, on a enregistré 425.083 faits criminels. C’est presque 25 000 de moins qu’à la même période un an plus tôt. Cela signifie qu’il y a 68 délits de moins par jour.

La police fédérale admet toutefois que tous les délits ne font pas l’objet d’un procès-verbal. C’est le cas par exemple quand l’agent de police local sait d’expérience que le parquet n’engagera pas de poursuites.

Vélos de course

La diminution concerne presque tous les types de délits. Arrêtons-nous d’abord aux vols, toujours le principal sous-groupe des délits. La police fédérale fait une distinction entre les cambriolages de maisons, de bâtiments publics et d’entreprises.

Entre 2015 et 2016, le nombre de cambriolages dans les logements a baissé de 17%. En 2000, il s’agissait toujours d’un peu plus de 75 000 cambriolages ; en 2016, ce nombre a baissé à 56.434. Cela signifie cependant qu’il y a chaque jour cent cinquante maisons cambriolées (ou qui font l’objet d’une tentative de cambriolage).

Le nombre de cambriolages de bâtiments publics a baissé de quatre pour cent, dans les entreprises de quatorze pour cent. La diminution dans les pompes à essence et les commerces d’électronique est encore plus importante. En revanche, les commerces de vélo font plus fréquemment l’objet de cambriolages: les cambrioleurs essaient de s’emparer de vélos de course et les vélos électriques.

Bouclier de sécurité

Le vol de voitures est un autre délit « populaire ». En 2000, il s’agissait de 40 000 voitures ; en 2016, ce nombre a spectaculairement baissé à moins de 9000. La diminution s’est poursuivie au cours du premier semestre de l’année passée (4196 vols de voitures déclarés).

Pour Patrick Ludinant, directeur de la police fédérale, l’explication est évidente: « Les constructeurs automobiles ont fort investi dans la sécurisation. Les voleurs s’intéressent surtout aux derniers modèles coûteux, mais aujourd’hui, ces derniers sont presque tous équipés de localisation GMS et de toutes sortes de systèmes d’alarme. »

Le développement du réseau ANPR, le système de reconnaissance automatique de plaques, explique également cette diminution. Les voitures volées ou non assurées sont immédiatement reconnues. Aujourd’hui, les autoroutes belges sont équipées d’un « bouclier » d’un millier de ces caméras.

Grâce aux évolutions technologiques, les braquages de banques ont également baissé de 127 à 11 par an. Il y a de moins en moins d’argent liquide dans les agences, et les valises intelligentes ont fortement réduit le nombre d’attaques de transports d’argent.

Entre 2015 et 2016, les vols avec violence ont baissé de 12%. Lors des six premiers mois de l’année passée, il y a eu 1755 vols armés.

Chaque année, la police enregistre 35 000 déclarations de vol de vélo, même si le nombre réel de vélos volés est probablement nettement plus élevé. Ce nombre demeure assez stable, même si on enregistre une légère hausse pour le premier semestre de l’année dernière. Ici aussi, il faut chercher l’explication dans la popularité des vélos électriques plus chers.

Les temps sont durs pour les pickpockets. Le nombre de vols à la tire a baissé de moitié par rapport à 2012. C’est le plus frappant dans les transports publics, et surtout dans le métro bruxellois. La baisse découle d’une série de campagnes de sensibilisation de l’État, et probablement aussi de la présence de militaires armés depuis la menace terroriste.

Le nombre de délits contre l’intégrité physique continue également à baisser. En 2011, on a enregistré 90 130 délits ; en 2016, presque 79 000 et lors du premier semestre de l’année dernière encore 38 000. Le nombre de cas de meurtre et d’homicide est demeuré stable, à environ un millier de cas par an (dans 80% de cas, il s’agit de tentatives d’assassinat).

Il y a quelques années, il ne se passait pas un jour sans que la SNCB soit confrontée à un vol de cuivre, suivi de nombreux retards et de désagréments pour les voyageurs. Cependant, les chiffres de la police fédérale montrent que les vols de métaux ont baissé de 34% grâce à la baisse du prix du cuivre et une série d’interventions judiciaires.

Bodycams

Une autre explication, c’est le nombre de plus en plus élevé de caméras de surveillance. Il y a quelques années, le service public fédéral de l’Intérieur signalait que le cap de 400 000 caméras enregistrées était atteint, et le nombre augmente encore tous les jours. Elles sont partout : dans les commerces et les gares de train, mais aussi dans les rues commerçantes principales, et aux voies d’accès de villes et de communes.

Drogue

Pourtant, il n’y a pas que des bonnes nouvelles. Ainsi, la criminalité liée à la drogue a le vent en poupe. Le nombre de délits de drogue a augmenté de 52 000 en 2015 à 53 700 un an plus tard. À première vue, la guerre contre la drogue ne semble donc pas très efficace.

Les délits liés au terrorisme connaissent également une hausse. Patrick Ludinant : « Il y a deux ans, il y a eu les attentats à Maelbeek et à Zaventem, mais à côté de ça, les services de sécurité étaient très occupés à déjouer des attentats, et rechercher et arrêter des suspects. Tant le nombre de procès-verbaux qui contiennent des informations dures sur le terrorisme que le nombre de rapports d’informations ont fortement augmenté. Le niveau de la menace terroriste a diminué, mais nous devons rester attentifs. Regardez le dernier attentat terroriste en France. »

Ailleurs dans le monde, les conflits peuvent entraîner plus de délits enregistrés chez nous. « Nous voyons par exemple une forte hausse de trafic d’êtres humains liée à la crise de migration et à la guerre en Syrie. En 2016, la police a constaté 32 755 infractions à la Loi sur les étrangers. Le nombre de cas de trafic d’êtres humains a augmenté à 741 en 2015 à 1074 un an plus tard. Je parle notamment d’opérations le long des parkings d’autoroute sur l’E40 et l’E17 vers la côte. »

Ces dernières années, le nombre de déclarations de violences intrafamiliales et sexuelles a également augmenté. D’après Patrick Ludinant, c’est surtout parce que l’État s’attarde davantage à ces phénomènes. « Je ne pense pas qu’il y ait plus de violences sexuelles qu’autrefois. On y est davantage sensibilisé, et cela entraîne plus de déclarations. »

Criminalité en ligne

Le nombre de dits délits économiques augmente également, surtout sur internet. Peu à peu, on peut parler d’un glissement d’une criminalité hors ligne vers une criminalité en ligne. Des citoyens portent plainte parce qu’ils n’ont jamais reçu leur commande en ligne ou parce que les produits se révèlent être de la contrefaçon.

Les infractions à la loi sur l’informatique ont augmenté de 11%. La fraude à la carte bancaire a augmenté de 8400 faits en 2015 à 9500 en 2016.

Dark number

Patrick Ludinant pense que tous les délits ne sont pas déclarés. « Et comme nous ne connaissons pas l’ampleur de ce ‘dark number’, la police fédérale a décidé d’organiser un Moniteur de sécurité, organisé pour la dernière fois en 2009. »

Des études internationales montrent que les personnes qui risquent vraiment d’être victimes se sentent souvent plus en sécurité que les autres. « On peut dire cent fois à une personne atteinte de phobie de l’avion qu’aucun avion ne n’est écrasé l’année dernier, elle continuera à avoir peur », explique le professeur en criminologie Stefaan Pleysier. « Les sentiments sont subjectifs et évoluent plus lentement que les faits. »

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