immeubles inoccupés
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La chasse aux proprios d’immeubles inoccupés est-elle ouverte? «Que les pouvoirs publics cessent de montrer le mauvais exemple!»

Pierre Havaux
Pierre Havaux Journaliste au Vif

Olivier Hamal, président du Syndicat national des propriétaires et copropriétaires (SNPC-Nems), comprend le bien-fondé d’une lutte contre la spéculation sur des logements vides mais invite aussi la sphère publique à balayer devant les portes de ses nombreux immeubles inoccupés. A commencer par les logements sociaux.

La démarche engagée par la Ville de Namur est-elle l’indice d’une escalade dans la chasse aux immeubles inoccupés?

L’action en cessation est une mesure forte mais elle fait partie de l’arsenal juridique mis en place par les pouvoirs régionaux wallons et bruxellois, au côté du droit de réquisition ou de la taxation sur les immeubles inoccupés. Ce genre de démarches relève plutôt du registre des opérations pilotes que mènent de temps à autre des communes en la matière. Quelle signification faut-il leur donner? Il sera intéressant de savoir la nature exacte du dossier initié par la Ville de Namur.

Les propriétaires d’immeubles inoccupés n’ont-ils pas de raisons de s’inquiéter?

Nous ne sommes pas confrontés à une politique inquisitoriale, les plaintes de propriétaires sont peu nombreuses en la matière. Ce genre d’actions relève un peu du mirage, du fantasme, de la bonne conscience que les pouvoirs publics veulent se donner. Ils veulent faire passer un message: il existe des problèmes de logement, nous n’avons pas les budgets nécessaires pour construire ou rénover des logements sociaux alors qu’il existe des tas d’immeubles privés inoccupés… Des chiffres sont lancés: on a parlé de 30 000 à 40 000 logements vides en Région bruxelloise, estimation passée ensuite à 10 000 à 15 000. Le phénomène gagnerait à être objectivé et bien cerné.

Quid des propriétaires qui résident à l’étranger pour des raisons privées ou professionnelles mais qui tiennent à conserver un pied-à-terre en Belgique?

Mettre les propriétaires d’immeubles inoccupés à l’amende, c’est une question de justice sociale…

Le Syndicat national des propriétaires et des copropriétaires n’a rien contre le principe de lutter contre les immeubles inoccupés, notamment lorsqu’ils deviennent des chancres et donc des sources de nuisances pour les propriétaires voisins. Sociétalement, la pratique n’est plus acceptable non plus. Nous ne sommes plus au XIXe siècle, le droit de propriété n’est plus aussi sacré mais est mis en balance avec d’autres enjeux sociétaux. Il est ainsi regrettable de voir des immeubles inoccupés alors qu’il y a des besoins en logement et nous réprouvons les promoteurs immobiliers qui agissent de la sorte à des fins spéculatives. Là où nous sommes moins heureux, c’est de constater que des pouvoirs publics, y compris des sociétés de logements sociaux, montrent le mauvais exemple en possédant des immeubles laissés à l’abandon et qui sont exonérés de taxes. Pourquoi ce qui est justifié dans la sphère publique ne l’est-il pas dans le secteur privé?

Les pouvoirs publics sont mal placés pour faire la leçon et sévir?

Nous sommes frappés par le tabou, par le déni dans lequel les pouvoirs publics appréhendent le sort des immeubles publics inoccupés. Et il y en a beaucoup. Quelque 4 170 logements inoccupés en Région de Bruxelles-Capitale en 2020, rien que pour le logement social! Un exemple à Liège: l’ancien observatoire de Cointe, acheté par la Région wallonne, inoccupé depuis vingt ans et qui est à l’état de chancre, alors qu’un projet de valorisation du site vient d’être abandonné. Des recours introduits par des propriétaires d’immeubles privés, au nom de l’inégalité de traitement, ont obligé la Ville de Liège à renoncer à exonérer de taxes les logements sociaux inoccupés.

Un immeuble inoccupé est-il forcément abandonné? Sur quels critères se fonde la qualification?

L’exploitation des données de consommation d’énergie et d’eau est un critère à la fois bon et mauvais. Quid des propriétaires qui résident à l’étranger pour des raisons privées ou professionnelles mais qui tiennent à conserver un pied-à-terre en Belgique? Celui-ci est évidemment inoccupé pendant une partie de l’année, ils n’y sont pas nécessairement domiciliés et les consommations d’eau, d’électricité et de gaz sont réduites. S’ils n’y sont pas domiciliés, ils font alors l’objet d’une taxation sur les secondes résidences. Nous ne voyons pas à quel titre ces personnes pourraient être sanctionnées.

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