Kim Schmitz, le Megatruand, arrêté à Auckland
Anonymous et des milliers d’internautes s’insurgent contre la fermeture de MegaUpload par le FBI. Mais savent-ils réellement qui ils défendent? Savent-ils qui ils érigent en symbole de la lutte contre les ayants droit? Portrait du fondateur des sites Mega, Kim Schmitz.
Hacker, détenteur de plusieurs identités, receleur d’objets volés, coupable de délit d’initié et de détournement de fonds, qui est Kim Schmitz, le fondateur et dirigeant de Megaupload mais aussi de Megavideo, -movie et -porn? Est-il l’homme qui vole aux labels pour donner aux utilisateurs? Ou est-il simplement un escroc de plus? Il a été interpellé ce vendredi à Auckland après s’être retranché, armé, dans sa villa, suite à la décision de la justice américaine de fermer cette plateforme emblématique et controversée du téléchargement direct sur Internet.
L’arrestation de Kim Dotcom s’est déroulée selon un scénario digne d’un film de gangsters. La police néo-zélandaise a indiqué avoir effectué des perquisitions dans dix endroits d’Auckland, dont la vaste demeure du fondateur de Megaupload, appelée « Dotcom Mansion ». Selon l’inspecteur Grant Wormald, le créateur de Megaupload a tenté de se réfugier dans une chambre forte lorsque la police est arrivée. Il « est rentré dans sa maison et a activé plusiers mécanismes de fermeture électronique », a-t-il dit. « Une fois ces codes neutralisés par la police, il s’est barricadé dans une chambre forte (…) et lorsque la police est parvenue à y pénétrer elle a trouvé Mr. Dotcom près d’une arme qui avait l’apparence d’un fusil de chasse à canon scié ».
Derrière MegaUpload et ses petits frères, se cache une multitude de sociétés: MegaUpload Limited, MegaVideo Limited, MegaMedia Limited et MegaRotic Limited. Ces sociétés composent la face administrative du MegaWorld, centre névralgique de la toile Mega. Toutes sont basées à Hong Kong et auraient généré 175 millions de dollars de chiffre d’affaires, notamment grâce aux abonnements des internautes. À leur tête, un allemand, Kim Schmitz alias Kim Tim Jim Vestor, alias Kim Dotcom né le 21 janvier 1974 à Kiel, en Allemagne.
Pourquoi ces pseudonymes? Certainement pour dissimuler un passé peu glorieux. Son premier petit forfait remonte aux années 90, quand il vendait des cartes téléphoniques volées. Premier délit, première condamnation: deux ans de probation pour escroquerie et recel d’objets volés.
Mega délit d’initié
Il faut attendre 2001 pour son premier gros coup d’éclat, en Allemagne. À l’époque, Kim toujours Schmitz achète 290 000 euros d’actions dans la société Letsbuyit.com, au bord de la faillite. Il n’hésite pas à annoncer un investissement de 50 millions d’euros pour redresser la compagnie. Le marché rassuré, les actions de la compagnie grimpent de 300%. Kim revend ses parts et encaisse 1 160 314 euros.
L’opération ne pouvait pas passer inaperçue et la justice allemande va le chercher jusqu’à Bangkok pour l’extrader, en 2002. Il est alors condamné pour délit d’initié à un an et huit mois de probation et 100 000 euros de dommages et intérêts. L’année suivante, il est reconnu coupable d’avoir détourné 280 000 euros et ainsi causé la faillite de deux sociétés, pendant qu’il s’enrichissait avec Letsbuyit.com.
Puis Kim Schmitz disparaît. Mais le finlandais Kim Tim Jim Vestor prend sa place en 2005. Kim Tim Jim habite Hong Kong avec sa famille, il s’est converti au streaming illégal et fonde la société MegaUpload Limited. Grâce aux exonérations d’impôts accordées aux entreprises étrangères par l’ancienne colonie anglaise et au succès fulgurant du streaming, dopé depuis 2010 par les lois contre le téléchargement illégal, il bâtit son empire.
Pour Kim Jim Tim, la vie est belle, il décide d’ailleurs de changer son nom en Kim Dotcom (pointcom en français) et de déménager dans une luxueuse demeure en Nouvelle-Zélande. Et pas n’importe laquelle: la plus chère du pays, pour la modique somme de 30 millions de dollars. Il y mène bon train et y a même fait tirer le feu d’artifices le plus coûteux qu’ait connu Auckland.
Un succès qui a fini par attirer les autorités américaines
C’est là qu’il est arrêté ce jeudi avec six de ses employés, pour violation des droits d’auteur. Tous les sites Mega sont fermés et 50 millions d’euros sont saisis. Plusieurs voitures de luxe, dont une Rolls Royce Phantom, et 11 millions de dollars appartenant au fondateur ont été également saisis. Kim Schmitz et ses employés sont accusés par le gouvernement américain de « Mega conspiracy » (lire l’acte d’accusation) et d’avoir entraîné « plus d’un demi-milliard de dollars de perte pour les ayants droit », en offrant sur leur site des films, séries et autres produits piratés. Anonymous s’est empressé de défendre le réseau Mega et de s’attaquer au gouvernement américain. Mais ont-ils vraiment besoin d’un symbole comme le Megatruand Kim Schmitz?
Flavien Hamon et Camille Caldini
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