Vincent Van Quickenborne © belga

Transfert de prisonniers avec l’Iran: vote attendu en Belgique sur un traité controversé

Le Vif

Les députés belges sont appelés mercredi à ratifier un traité controversé sur le transfèrement mutuel de prisonniers avec l’Iran, considéré par ses détracteurs comme ouvrant la voie à un « échange » entre un humanitaire belge et un agent du régime iranien.

Sauf surprise, le texte déjà approuvé en commission le 6 juillet devrait être voté par une majorité de députés en fin de journée lors de l’ultime séance plénière à la Chambre avant la coupure estivale.

Mais depuis la révélation de son contenu il y a trois semaines, ce traité bilatéral a suscité un débat enflammé au Parlement, où se sont exprimées les mêmes inquiétudes que celles des opposants iraniens en exil et de leurs soutiens.

Ces opposants y voient la porte ouverte à une remise à Téhéran, et à une possible grâce, d’Assadollah Assadi, condamné en 2021 en Belgique à 20 ans de prison notamment pour « tentatives d’assassinat terroriste ». Le texte est « taillé sur mesure » pour lui, a lancé un député belge d’opposition.

Jugé par le tribunal d’Anvers (nord), cet Iranien de 50 ans a été reconnu coupable d’avoir orchestré un projet terroriste déjoué in extremis le 30 juin 2018, quand des policiers belges ont interpellé près de Bruxelles un couple de Belgo-iraniens en possession d’explosif.

Le couple se rendait en France, où un attentat devait viser ce jour-là près de Paris le rassemblement annuel du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), coalition d’opposants au régime de Téhéran incluant l’organisation des Moudjahidine du peuple (MEK).

Les juges anversois ont estimé que M. Assadi avait fomenté ce projet pour le compte du renseignement iranien, sous couverture diplomatique. Alors en poste à l’ambassade de Vienne, il avait été arrêté le 1er juillet 2018 en Allemagne, et remis à la Belgique trois mois plus tard. La procédure a ulcéré Téhéran, qui continue de réclamer sa « libération sans conditions ».

Début juillet, en présentant aux députés ce traité « sur le transfèrement de personnes condamnées », le ministre belge de la Justice Vincent Van Quickenborne a peiné à apaiser les inquiétudes et à dissocier le texte du cas Assadi.

« Un jeu bizarre »

Il a reconnu que dès l’arrestation du « soi-disant diplomate », dans une enquête de la justice antiterroriste belge, les « intérêts » de la Belgique en Iran et ses 200 ressortissants sont devenus des cibles de potentielles représailles.

« Dès le premier jour, nous avons ressenti des pressions de la part de l’Iran et la situation de sécurité de nos intérêts s’est détériorée de manière systématique », a affirmé M. Van Quickenborne.

La preuve du sérieux de ces menaces est arrivée le 24 février dernier, quand un travailleur humanitaire belge, Olivier Vandecasteele, a été arrêté sans raison à Téhéran, ce qui justifie aujourd’hui aux yeux de l’exécutif belge une ratification urgente du traité signé le 11 mars à Bruxelles.

« L’Iran est un Etat scélérat, mais on ne choisit pas avec qui on doit parler », et libérer M. Vandescasteele est « notre priorité », a martelé le ministre de la Justice mardi après de longues heures de débat à la Chambre. 

Même credo de la part du Premier ministre Alexander De Croo, qui a haussé le ton face aux députés critiquant « un chantage » ou « une forme de rançonnement » de l’Iran avec l’otage belge de 41 ans.

« Que dites-vous à sa famille, qu’on va le laisser croupir dans sa cellule ? », a tonné M. De Croo le 14 juillet, « la Belgique n’abandonne pas ses concitoyens ».

Dans un message vidéo le 11 juillet, la famille de M. Vandecasteele a imploré les autorités de « tout faire » pour cette libération.

« On est dans un jeu bizarre où le gouvernement ne peut pas dire qu’il y a échange alors que c’est ça qu’on négocie », a grincé le député d’opposition François De Smet (centriste).

Un malaise également exprimé par Amnesty International: le texte ne doit pas « servir à accorder l’impunité » aux agents iraniens qui commettraient des crimes en Europe, a averti l’ONG.

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