Sebastien Bellin tend la main aux accusés du procès des attentats et leur pardonne: « Ces bombes n’ont pas pu éteindre cet amour en moi »
L’ancien basketteur professionnel Sebastien Bellin a livré un témoignage empreint d’amour et de positivité jeudi devant la cour d’assises chargée de juger les attentats à Bruxelles du 22 mars 2016. « Ces bombes, ces atrocités n’ont pas pu éteindre ça en moi », a-t-il souligné, ne cessant de remercier les secouristes et l’ensemble des professionnels intervenus ce jour-là à l’aéroport de Zaventem et ensuite durant son parcours de soins et de revalidation.
Ancien athlète de haut niveau, membre de l’équipe nationale belge de basket (une « énorme fierté » pour lui), le quadragénaire souffre depuis les attaques d’un handicap permanent, qu’il dit avoir accepté, et ne sent plus rien dans sa jambe gauche. « Ma carrière de haut niveau est dans le passé mais je continue d’essayer de repousser mes limites dans le mental et le physique », a-t-il déclaré en ouverture de son témoignage. Sebastien Bellin a dit sa fierté d’avoir pu surmonter, avec l’ensemble des personnes qui ont pu l’aider dans ce parcours, « ces défis que les attentats ont représentés ».
Le 22 mars 2016, il s’apprêtait à prendre l’avion pour New York. Après la première explosion, l’ancien athlète a, sans le savoir, « couru directement » vers la seconde bombe, dont il se trouvait à 5-6 mètres et qui lui a « déchiré » les deux jambes. « J’étais alors à deux doigts de la mort », a-t-il raconté devant la cour. Il avait un éclat de bombe dans la hanche et n’entendait ni se sentait plus rien. Sebastien Bellin a perdu 50% de son sang dans les minutes suivant l’attentat et doit notamment sa survie à un garrot que lui a posé un militaire. Il se décrit d’ailleurs comme « survivant » et non comme victime.
« Mais c’est aussi dans les moments les plus difficiles de la vie que celle-ci nous donne les choses les plus belles », a-t-il ajouté. De nombreuses personnes l’ont en effet aidé depuis ce jour-là et l’ancien basketteur, désormais entrepreneur, a tenu à leur rendre hommage. « J’ai eu beaucoup de chance ce jour-là, parmi ces atrocités. Dans ces événements très durs à comprendre, j’ai vu de la lumière et une force humaine inouïe« , insiste-t-il. « Je pense que c’est ma positivité, mon amour pour la vie qui m’ont sauvé ce jour-là », répète ensuite Sebastien Bellin.
Il pointe en particulier le rôle d’un ambulancier qui l’a maintenu éveillé, alors qu’il « commençait à mourir », en le frappant très fort au visage à plusieurs reprises durant son transfert vers l’hôpital. « Cet amour vit toujours en moi. Ces bombes, ces atrocités n’ont pas pu éteindre ça en moi », a-t-il lancé, décrivant ces dernières comme des « scènes de guerre ». « On ne sait pas préparer des gens, qu’ils soient secouristes, policiers, infirmiers, conducteurs d’ambulances, chirurgiens ou militaires, à ça. Ils ont sauvé des vies »,a-t-il souligné, insistant sur « la dualité de l’autre extrême dans les moments les plus difficiles, celui du positif, de l’humanité qui aide, qui essaye de s’entraider ».
Aux yeux de Sebastien Bellin, ce que les secouristes ont vécu le 22 mars a été plus difficile à vivre que ce que lui a traversé. « Quand on est à deux doigts de la mort et qu’on survit, on réalise qu’on a eu de la chance. Pour ceux qui ont créé cette chance, c’est encore plus difficile. » Il a donc encore et encore remercié tous ces professionnels, évoquant la chance qu’il a eue de les attirer à lui. « Une équipe, comme toujours », conclura l’ancien basketteur.
Durant l’audience, trois photos ont été projetées. La première le montre, en pleine santé et très musclé, arborant fièrement les couleurs de l’équipe nationale belge de basketball. Sur le deuxième cliché, on le découvre à terre, sur le sol de l’aéroport de Zaventem, dans les minutes suivant la double explosion. Il est alors rempli de poussière et ses jambes baignent dans une mare de sang tandis qu’une personne se trouve à ses côtés pour l’aider. La troisième photo aborde son long parcours de revalidation. On le voit, de dos, assis sur une chaise roulante, circulant dans un couloir d’hôpital, où il est poussé par sa plus jeune fille et accompagnée par son aînée, âgées de trois et sept ans à l’époque. Cette photo l’a fait vaciller un instant dans un témoignage très digne et maîtrisé émotionnellement.
« C’est grâce à mes filles que je suis encore là, avec autant de volonté d’avancer », a-t-il repris après un moment de silence et quelques larmes. « Ça a été très dur pour mes filles de me voir figé sur un lit d’hôpital pendant quatre mois », a-t-il expliqué. « Ça a été très dur de voir leur père, qui ne savait pas rester tranquille pendant cinq secondes, resté allongé sur un lit tout ce temps. L’amour guérit tout, la plus belle leçon que j’ai pu apprendre, c’est avec mes deux filles », s’est-il encore confié.