Procès des attentats de Bruxelles: « Vous avez insulté le Coran », l’audience suspendue après un échange nerveux entre un témoin et des accusés
La présidente de la cour d’assises chargée du procès des attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles, Laurence Massart, a brièvement suspendu l’audience mardi après-midi après que le témoignage de Walter Benjamin, grièvement blessé à Zaventem, a provoqué un esclandre dans la salle.
L’exposé du quinquagénaire avait commencé de manière classique, avec un récit de l’horreur vécue le jour des attentats, la perte de sa jambe et les séquelles psychiques pour lui et ses proches. Mais les choses se sont gâtées lorsque le témoin a brandi un Coran et lu un extrait d’une sourate. « Vous avez insulté le Coran » a-t-il ensuite lancé aux accusés, ce qui n’a pas plu à Sofien Ayari et Salah Abdeslam. « Je refuse qu’on dise que j’ai insulté le Coran! », s’est exclamé le premier.
Et le deuxième de surenchérir : « On subit nous ici! On a rien fait du tout! » « Vous êtes des assassins! », leur a crié la victime, avant que la présidente ne décide de suspendre l’audience le temps que les esprits se calment. « Je peux comprendre votre souffrance mais ça ne sert à rien », avait dit Laurence Massart à Walter Benjamin juste avant cela. À la reprise des débats, une vingtaine de minutes plus tard, Osama Krayem n’était plus présent dans le box des accusés. Mohamed Abrini, lui, a tenu à prendre la parole à l’issue du témoignage du quinquagénaire. « On aurait pu éviter ce genre d’incident », a estimé « l’homme au chapeau ».
« À Paris, il est aussi arrivé que des survivants traitent les accusés d’assassins mais le président de la cour les rappelait à l’ordre. Il disait ‘stop, il n’y a pas d’assassin dans le box’. Moi, je suis coupable, pas besoin d’attendre le verdict pour le dire. Mais il y a des gens ici qui n’ont rien à voir… » « Je me débrouille pas trop mal jusqu’ici, monsieur Abrini », lui a rétorqué Laurence Massart. « Il y a peut-être des fois où je ne suis pas tout à fait top, mais je fais de mon mieux », a-t-elle ajouté, rappelant sa longue expérience à la présidence de cour d’assises.
Me Laura Pinilla, l’avocate de Mohamed Abrini, a également tenu à revenir sur les propos du témoin. Walter Benjamin s’en était pris nommément à son co-plaideur Me Stanislas Eskenazi, lui reprochant d’avoir déclaré que défendre les accusés de ce procès était « un honneur ». « On nage en plein délire, c’est la honte des avocats! », s’était-il offusqué.
« Nous avons tous deux un respect immense pour les victimes et leur histoire. Mais il ne me semble pas normal ni correct qu’un avocat se retrouve presque sur le banc des accusés pour avoir fait son boulot. Ça va trop loin. Une limite a été franchie. Nous faisons notre métier », a commenté la pénaliste.