Procès des attentats de Bruxelles: les enquêteurs se penchent sur l’appartement de la rue Max Roos
La présentation de l’enquête par les services impliqués s’est poursuivie jeudi au procès des attentats à Bruxelles du 22 mars 2016. Les intervenants ont d’abord évoqué la fuite de Mohamed Abrini et l’enquête de téléphonie concernant Zaventem avant de se consacrer, l’après-midi, aux interventions dans l’appartement rue Max Roos à Schaerbeek.
Smail Farisi, qui comparait libre, a souhaité prendre la parole avant le début des débats. « Je ne vais pas bien. Je souffre d’agoraphobie depuis un an et demi. Ma santé est vacillante », a-t-il déclaré ajoutant avoir été « obligé » de boire deux bières le matin pour se donner le courage de venir à son procès. « C’est les médocs ou l’alcool. Le cocktail est fou », a-t-il dit avant de sortir de la salle avec du personnel de la Croix Rouge, sur conseil de la présidente de la cour, Laurence Massart.
Son frère, Ibrahim Farisi, qui comparait libre également a, lui, indiqué devoir se rendre au CPAS pour un rendez-vous concernant son revenu d’intégration sociale. Les deux frères sont finalement revenus en salle d’audience respectivement à 10h45 et 12h15.
Hormis Ossama Krayem, qui a désiré être reconduit en cellule dès l’ouverture de l’audience, les accusés détenus étaient tous présents.
La matinée a d’abord été consacrée à retracer, images de caméras de surveillance à l’appui, l’itinéraire de fuite de Mohamed Abrini depuis le hall des départs de l’aéroport de Zaventem jusqu’au boulevard du Jardin botanique où les enquêteurs perdent sa trace. Un véritable « travail de fourmi », selon ces derniers.
Ils ont également mentionné la recherche infructueuse de la veste claire portée par Abrini le jour des attentats et dont il s’était débarrassé.
Après cela, le commissaire Kris Meert a présenté l’enquête téléphonique concernant l’attaque à Zaventem. Il a notamment expliqué que l’analyse de la téléphonie avait permis d’identifier un « triangle de planques », soit celles de la rue Max Roos, de l’avenue des Casernes à Etterbeek, et de la rue du Dries.
Le policier a également révélé que les terroristes achetaient des téléphones « jetables » (bon marché, NDLR) en série ainsi que des cartes prépayées qui, à l’époque, pouvaient encore être achetées et activées de manière anonyme. Il a également montré que chaque téléphone était utilisé dans un but bien précis : les contacts d’urgence entre les différents lieux d’hébergement, la location et le suivi des hébergements ou encore l’exécution des attentats en tant que telle.
Les débats de l’après-midi se sont orientés vers l’appartement du numéro 4 de la rue Max Roos. Après qu’un commissaire de la police locale de Schaerbeek, ait expliqué comment il avait localisé l’appartement grâce à des emballages de poubelles de marque Brabantia abandonnés sur le trottoir, le commissaire de la police fédérale, Kris Meert, a raconté comment les éboueurs passés le matin même avaient récupéré deux ordinateurs, un GSM et deux cartes sim.
Ces éboueurs, découvrant que l’un des ordinateurs portables contenait des contenus en lien avec le terrorisme, ont confié l’appareil à la police qui a ainsi mis la main sur une « mine d’information » dont le contenu sera évoqué plus tard dans le procès. Le commissaire a également expliqué qu’un collègue des éboueurs avait décidé de garder une tablette en lien avec l’appartement rue Max Roos trouvée dans une poubelle et l’avait formatée, effaçant ainsi toutes les informations qu’elle contenait.
Le second PC n’a pu être analysé, car il a été jeté a la benne par les éboueurs. Le téléphone de marque Zizo, lui, n’a révélé que peu d’informations utiles, notamment un message : « Hamza? » dont les enquêteurs pensent qu’il a été envoyé à Sofien Ayari après sa fuite de la planque de la rue du Dries en compagnie de Salah Abdeslam.
L’appartement de la rue Max Roos contenait encore des explosifs improvisés de type TATP (Tri-Acétone/Tri-Peroxyde) qui a été identifié et désensibilisé avant d’être emporté pour être détruit dans un champ proche de Zaventem par le Service d’enlèvement et de destruction d’engins explosifs (SEDEE).
Sur le TATP, un commandant du SEDEE est venu expliquer à la cour que sa fabrication était « risquée, certes, mais simple » et que « la majorité des produits qui servent de précurseurs (qui créent l’explosion, NDLR) sont disponibles dans le commerce ». Il a ensuite décrit dans les grandes lignes les étapes de fabrication de l’explosif avant d’affirmer que « n’importe qui avec des bons produits, qui connait les concentrations et la température maximale à ne pas dépasser, peut facilement en fabriquer ». Il a dans la foulée précisé que les produits retrouvés rue Max Roos étaient de qualité.
Le commandant a également listé les pièces à conviction trouvées sur place, notamment des bacs contenants de la poudre identifiée comme étant du TATP, des bidons de peroxyde d’hydrogène, d’acétone et d’acide sulfurique en grand nombre ainsi que du câble électrique, des emballages de piles 9V et des seringues graduées. Des éléments pouvant être utilisés dans la fabrication de l’explosif improvisé.
Pour finir la journée, le parquet a donné une introduction concernant les analyses de traces et indices. La juge d’instruction Berta Bernardo-Mendez a relevé un couac dans les analyses ADN au début de l’enquête. Une grande partie des résultats préliminaires du laboratoire INCC (Institut national de criminalistique et de criminologie) se sont révélés erronés quelques mois plus tard, ce qui a forcé le parquet à désigner un collège d’experts chargé de recommencer une série d’analyses ADN et de prendre en charge la suite des missions.
L’appartement de la rue Max Roos à Schaerbeek sera à nouveau au cœur des témoignages des enquêteurs lors de la reprise du procès, lundi.
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