Procès des attentats de Bruxelles: le ministre de la Justice refuse de commenter sa décision de faire appel sur les fouilles
Le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne, interrogé à la Chambre, a refusé de dévoiler ses raisons d’interjeter appel contre la décision du juge des référés concernant les fouilles à nu des accusés détenus au procès des attentats de Bruxelles.
Après le débat sur les boxes des accusés, c’est à présent la question des fouilles, durant le transfert quotidien des prisonniers vers le Justitia depuis la prison de Haren, qui parasite le procès devant la cour d’assises de Bruxelles.
Le 29 décembre, le tribunal civil de Bruxelles siégeant en référé a interdit les fouilles à nu systématiques et non motivées, au motif qu’elles violent la Convention européenne des Droits de l’Homme. Une semaine plus tard, le ministre chargeait le SPF Justice de faire appel de cette décision.
« Nous avons lu cette décision et en avons tenu compte » en émettant une circulaire sur ces transferts le 2 janvier, a d’abord rappelé le libéral flamand. « Même si la décision (du tribunal, NDLR) est nuancée et profondément motivée, nous avons décidé de faire appel après avoir consulté la police et l’administration. Nous dévoilerons nos arguments en ce sens à la cour d’appel, le seul lieu pour le faire. Je m’abstiendrai dès lors de tout autre commentaire. »
« C’est précisément pour ne pas mettre en péril la suite du procès que je dois adopter une attitude de réserve et être prudent dans mes commentaires », s’est retranché le ministre.
Vincent Van Quickenborne a toutefois rappelé que les détenus sont « des personnes qui ont été accusées ou condamnées pour d’horribles attentats terroristes perpétrés au nom de l’État islamique », soulignant une nouvelle fois que la police se basait notamment sur l’analyse de risque de l’Organe de coordination pour l’analyse de la menace (Ocam), de niveau 3 pour les transferts. « Nous devons prendre (cette analyse) particulièrement au sérieux. À ce propos, les fouilles sont légalement possibles, en ce compris les fouilles à nu. Le jugement en référé ne les a pas interdites. »
« Dans un État de droit, le respect de toutes les parties – les victimes mais aussi les accusés – doit être maintenu. Mais, en même temps, la sécurité doit être garantie et, ce, pour tout le monde, donc aussi les agents de police concernés », a poursuivi le ministre, qui a rejeté les accusations d' »État policier ». Selon lui, l’inspection générale (AIG) – l’organe de contrôle indépendant des services de police belges, placé sous l’autorité du pouvoir exécutif fédéral – a conclu que la police suivait les directives « de manière professionnelle et avec un sens de la gradation ».
Il a ensuite ajouté que le procès allait durer plusieurs mois et que certaines mesures utilisées ces dernières semaines pouvaient « rapidement sembler systématiques ».
La défense, qui fustige le non-respect de la décision de justice prise en référé, a déjà reproché au ministre de la Justice son « mutisme » sur les conditions de transfert.
Sur les bancs parlementaires, des critiques ont également été entendues. Dans l’opposition, Sophie Rohonyi (DéFI) a jugé la réponse du ministre « déplorable » et l’a accusé de « se défausser de sa responsabilité » sur la présidente de la Cour d’assises alors que le transfèrement des détenus ressortit à sa compétence. Nabil Boukili (PTB) redoute quant à lui que ces « couacs à répétition » ne se transforment en arguments qui mettront en péril le verdict de la Cour d’assises une fois celui-ci rendu.
Dans la majorité, le ton était également critique. « Cela commence à ressembler à un bras de fer entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif, bien loin de l’appel au dialogue lancé par la présidente de la Cour », s’est inquiété Olivier Vajda (Ecolo-Groen). « D’incident en incident, le procès s’enlise », a averti Khalil Aouasti (PS) qui a mis en avant la situation « infernale » à vivre pour les victimes des attentats.