« Nous sommes en situation d’urgence »: des solutions face à la surpopulation dans les prisons
La surpopulation carcérale, un problème endémique en Belgique, appelle des solutions. La commission de la Justice de la Chambre a organisé des auditions à ce sujet. Les responsables des établissements pénitentiaires ont présenté la semaine dernière et ce mardi plusieurs propositions pour y remédier.
Selon les chiffres les plus récents, la surpopulation dans les prisons belges s’illustre par le fait que 12.719 personnes sont incarcérées aujourd’hui en Belgique, alors que les prisons ne disposent que de 11.020 places. Environ 180 personnes dorment au sol. En trois ans de temps, le nombre de prisonniers a augmenté de 2.000 personnes. « Nous sommes en situation d’urgence », a dénoncé le président de l’association francophone des directeurs de prison, Vincent Spronck. Ces personnes qui dorment par terre s’ajoutent aux trois autres personnes qui se trouvent déjà dans la cellule et ne sortent pas 21 heures sur 24, voire ne sortent jamais car elles ne vont plus en promenade.
Surpopulation dans les prisons: des moyens de sortie
Mercredi passé, la directrice générale des établissements pénitentiaires, Mathilde Steenbergen, a réclamé une loi d’urgence d’une durée d’un an. Diverses mesures pourraient être prises comme la libération conditionnelle automatique pour toute personne condamnée à une peine allant jusqu’à 5 ans, sauf si c’est pour des faits de mœurs ou de terrorisme. Ou une libération anticipée six mois avant la fin de peine d’une personne condamnée à 15 ans de prison. Les directeurs de prison francophones ont également avancé des solutions, notamment un arrêté royal de grâce de 12 mois. Concrètement, cela signifierait une réduction de peine généralisée d’un an. « La crise du covid a montré que des libérations anticipées peuvent se faire sans poser de difficulté », a expliqué M. Spronck. L’un des problèmes auquel fait face le monde pénitentiaire est justement des peines qui durent de plus en plus longtemps. Autre suggestion pour lutter contre la surpopulation dans les prisons: des quotas par étabilssement. « Je sais que le mot peut faire peur mais la situation est critique et il faut faire baisser la pression. Avec les quotas, on ne supprime pas les peines mais on les redistribue », a encore dit M. Spronck.
Trop de recours à la case prison?
Le problème de la surpopulation dans les prisons n’est pas sans susciter des tensions entre les directeurs de prison et les magistrats. Les premiers ont parfois l’impression que les seconds ne sont pas conscients du phénomène quand ils prononcent une condamnation ou envoient une personne en détention préventive. « Nous sommes très conscients de la situation mais à un moment donné, les juges n’ont pas d’autre solution que d’envoyer des gens en prison, ne fût-ce que pour assurer la sécurité publique », a fait remarquer Christian De Valkeneer, représentant du Collège des cours et tribunaux. Les magistrats recourent souvent à des mesures alternatives à la privation de liberté mais leur mise en œuvre réclame des moyens. Et elle se heurte aussi à un autre problème, à savoir la part considérable de prisonniers en séjour illégal en Belgique: plus d’un tiers de la population carcérale. Or, les relâcher fait courir le risque d’une disparition dans la nature. L’ex-ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne, avait fait de l’exécution des courtes peines son mantra durant la législature passée. Si nul ne remet en cause le principe, chacun regrette que le système n’était pas prêt. « Nous avons toujours dit que nous étions en faveur mais nous avions mis en garde contre le risque de catastrophe que faisait courir le manque de capacité », a fait remarquer Hildegard Penne, représentante du Collège des procureurs généraux.