Michel Claise, le juge belge qui ne craint pas les « puissants »
Michel Claise a provoqué un séisme politique en plaçant en détention une vice-présidente du Parlement européen, désormais déchue de sa fonction. Le juge belge Michel Claise est un magistrat pugnace qui aime tenir tête aux « puissants » mais use de méthodes parfois controversées.
A 66 ans, ce Bruxellois francophone, Michel Claise, passé il y a vingt-cinq ans du métier d’avocat à celui de juge d’instruction se prête volontiers aux interviews, en jean et pull en V, pour se revendiquer « humaniste », « tourné vers les autres », et parler des romans qu’il publie.
Parfois taxé d' »anar », cet esprit indépendant admet être franc-maçon depuis les années 1980 « pour la réflexion intérieure et l’enrichissement par la rencontre » que permet la fréquentation d’une loge. Sans oublier le principe essentiel de toujours « tout remettre en question ».
Comme juge attaché au tribunal de première instance de Bruxelles, Michel Claise s’est spécialisé dans la lutte contre la criminalité financière, et a déjà mis en prison des personnalités de la politique, du sport ou de l’économie.
« Claise, le juge qui fait peur aux banquiers« , titrait l’hebdomadaire belge Le Vif en 2014, au moment d’une enquête pour fraude fiscale et blanchiment d’argent ciblant la banque HSBC.
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« Chatouiller les puissants »
Pour solder les poursuites, ce géant mondial de la finance a dû régler en 2019 à l’Etat belge près de 300 millions d’euros, une transaction pénale record en Belgique. « Il aime aller chatouiller les puissants, il a les épaules larges et n’a peur de personne », dit à l’AFP un chroniqueur judiciaire qui le connaît.
Un avocat ayant croisé le juge Claise dans de multiples dossiers se montre plus grinçant : « il est imbu de lui-même et a parfois le mandat d’arrêt trop facile pour faire craquer le suspect ou accrocher un nom connu à son tableau de chasse ». Mais l’intéressé s’est toujours défendu d’adopter des méthodes expéditives pour faire avancer ses enquêtes.
Et de toute façon une mesure de détention provisoire est contrôlée en Belgique par d’autres juges, qui doivent décider dans un délai de cinq jours de la prolonger ou non.
« Pas un shérif »
C’est mercredi que seront fixés sur leur sort l’eurodéputée grecque Eva Kaili et les trois autres suspects écroués dimanche dans cette retentissante enquête sur des versements présumés d’argent par le Qatar pour influencer la politique européenne.
« Je ne me sens pas shérif. Je fais simplement mon métier, (…) dans le respect de la loi. On me confie des dossiers qui impliquent des personnes influentes auxquelles on pense qu’on ne va pas toucher. Mais moi je le fais car c’est mon job. Sans plus », déclarait Michel Claise en 2020 au journal Le Soir.
« Je n’ai pas du tout le sentiment d’avoir un combat à mener contre les gens ou contre la richesse », mais « la criminalité financière est en train de nous bouffer« , ajoutait-il.
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Né en 1956, le magistrat revendique une origine belge « mélangée », avec des racines de part et d’autre de la frontière linguistique, dans le Hainaut francophone (ouest) pour l’ascendance paternelle et le Brabant flamand (centre) côté maternel.
Abandonné par son père, il a grandi avec ses grands-parents boulangers, qui l’ont élevé à la dure. « Une éducation d’un autre temps mais qui peut porter ses fruits », selon lui.
Sans télévision à la maison, il a plongé dans les livres. Et, dès ses 14 ans, les enseignants de l’Institut Notre-Dame d’Anderlecht à Bruxelles lui ont donné aussi le goût d’écrire. M. Claise dit aujourd’hui puiser dans son activité professionnelle l’inspiration pour écrire polars et romans historiques (une douzaine publiés en 15 ans) qui lui ont valu des prix et ont contribué à sa notoriété.
Côté politique, ce diplômé de l’Université libre de Bruxelles (ULB) affirme n’être affilié à aucun parti. Mais il n’exclut pas, une fois à la retraite, de tenter de se faire élire dans un conseil communal pour « communiquer son approche de la culture ».
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