Traite d’êtres humains sur un chantier à Anvers: « Un dossier d’une ampleur très sérieuse »
Travailler six jours sur sept pour un salaire mensuel d’à peine 650 euros. L’auditorat du travail anversois mène une enquête sur une traite d’êtres humains sur un chantier de l’entreprise Borealis.
Le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne (Open VLD) a confirmé ce mardi les faits de traite d’être humains sur un chantier du port d’Anvers découvert par l’auditorat du travail. « Il s’agit d’un dossier d’une ampleur très sérieuse, rarement vue chez nous. Malheureusement, il ne s’agit là que de la pointe de l’iceberg car, selon le Global Slavery Index, il y aurait dans notre pays 23.000 personnes victimes d’exploitation ou d’esclavage moderne », commente le libéral.
Aucun suspect n’a encore pu être identifié. Une partie des victimes de ce dossier a déjà pu être auditionnée, l’autre devant encore l’être. Le travail d’audition est particulièrement intensif en raison du recours obligatoire à des interprètes. Selon la justice, ce travail pourrait encore prendre plusieurs jours. « Les services d’inspection sociale et la police sont occupés à plein temps et prennent le temps nécessaire pour rassembler toutes les informations possibles », commente l’auditeur du travail d’Anvers, Bart Wens. « L’objectif est de pouvoir déterminer qui doit être considéré comme leur employeur et qui est responsable de leur recrutement. Nous verrons alors quelles seront les mesures qui devront être posées. »
Salaire d’à peine 650 euros
L’auditorat du travail anversois mène en effet une enquête relative à 55 victimes de traite des êtres humains actives sur le grand chantier de construction de l’entreprise chimique Borealis, aux abords du port d’Anvers. Les personnes concernées – des hommes d’origine philippine ou bengali – auraient perçu un salaire mensuel d’à peine 650 euros pour travailler six jours sur sept.
Dans une réponse adressée aux quotidiens Gazet van Antwerpen et De Tijd, Borealis affirme qu’il ne s’agit pas d’employés de l’entreprise elle-même, mais de l’entrepreneur IREM-Ponticelli.
Les centres d’accueil pour les victimes de traite des êtres humains ont déjà annoncer ne pas pouvoir absorber les 55 travailleurs, en raison du manque de place: « Nous n’avons jamais plus de cinq lits de libre en même temps », a expliqué Klaus Vanhoutte, directeur du centre d’accueil Payoke, à Anvers. « Les centres d’accueil sont la plupart du temps archi-complets. »
Traite des êtres humains: agir sur trois terrains
A la lumière de ce nouveau scandale, M. Van Quickenborne estime que le politique n’en fait pas assez face à cette problématique. Il assure que le gouvernement actuel entend toutefois y remédier en agissant sur trois terrains: la prévention, la répression et l’assistance aux victimes. En matière de prévention, un point central de signalement des victimes a été présenté pas plus tard que ce lundi, souligne-t-il.
Pour la répression, le ministre rappelle que les équipes Ecosoc chargées de faire la chasse à ce genre d’exploitation sont en train d’être renforcées.
Pour mettre fin à ces abus, il convient de renforcer les inspections et sanctionner plus lourdement les abus de la sous-traitance, a estimé ce mardi le syndicat socialiste flamand ABVV. Des affirmations que réfute le ministre: « Les peines ne sont pas légères. Elles peuvent monter jusqu’à 15 ans de prison. Le problème, c’est que le risque de se faire prendre est beaucoup trop bas. C’est pourquoi nous voulons engager plus d’inspecteurs« . Le ministre fédéral de l’Emploi, Pierre-Yves Dermagne, espère que le gouvernement fédéral pourra dégager lors du prochain conclave budgétaire de septembre des moyens financiers complémentaires pour pouvoir engager des inspecteurs supplémentaires, a-t-il fait savoir.
Quant à l’accompagnement des victimes, le ministre reconnaît qu’il y a un « manque structurel » de places dans les centres d’accueil, confirmant le cri d’alerte lancé un peu plus tôt dans la journée par le centre d’accueil Payoke à Anvers.
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