Il n'existe aucune garantie que les crédits destinés à la numérisation soient correctement dépensés ou que les ressources nécessaires soient disponibles. © Belga

Budgets peu contrôlés, manque de confiance: la Cour des comptes fustige le processus de digitalisation de la Justice

La Cour des comptes a émis un rapport très critique à l’égard du SPF Justice. Pour elle, le SPF ne maîtrise pas encore pleinement les principes de base d’une bonne gestion administrative.

Dans un audit sur la transformation numérique de la Cour, la Cour des comptes se montre très critique. Par exemple, «une stratégie unique et cohérente fait défaut» et le soutien du service public fédéral de la justice est insuffisant, selon l’organisme de surveillance financière chargé de contrôler les services publics. En raison d’un contrôle insuffisant des risques liés au recours à des consultants, le risque de fraude n’est pas suffisamment maîtrisé.

La numérisation de la justice est un vieux problème. «Depuis des décennies, c’est un travail en cours», a déclaré vendredi la Cour des comptes dans le communiqué de presse sur le rapport remis au Parlement. Le retard est la conséquence d’une analyse insuffisante des besoins et des processus métiers, de structures de concertation inopérantes ainsi que d’un manque d’organisation. Il existe trois acteurs dits opérationnels pour la numérisation: le service du personnel TIC, le Bureau de la transformation numérique et le projet transfrontalier, qui était initialement limité aux amendes de circulation.

En outre, la «gouvernance» du SPF «laisse à désirer» en termes de soutien. Cependant, cette gouvernance est nécessaire car de nombreux acteurs jouent un rôle clé. Mais la coopération entre les acteurs est caractérisée par «un manque de confiance et une certaine concurrence». Ainsi, le comité exécutif du SPF «adopte une attitude réservée», tandis que la cellule politique du ministre de la Justice «joue un rôle opérationnel fort». Un «rôle opérationnel presque systématique», semble-t-il, alors qu’un cabinet est censé jouer un rôle politique. Cette position résulte, entre autres, du manque d’implication du comité exécutif du SPF Justice et de l’inertie et du manque de compétences au sein du SPF.

Digitalisation de la Justice: le flou autour de l’efficacité des dépenses

Le contrôle budgétaire doit également être amélioré. Il n’existe aucune garantie que les crédits destinés à la numérisation soient correctement dépensés ou que les ressources nécessaires soient disponibles. Par exemple, la Cour des comptes note que le recours à des consultants pour la numérisation est «crucial». Ils sont «indispensables» car en interne les compétences manquent et «les ambitions sont stimulées par une augmentation des ressources budgétaires».

«Toutefois, le contrôle des risques liés à l’engagement de consultants est insuffisant. Cela vaut pour la gestion du budget, les conflits d’intérêts et l’influence commerciale, peut-on lire dans le rapport. Le risque de fraude n’est donc pas suffisamment maîtrisé», résume le communiqué de presse. La Cour des comptes estime à environ 500 le nombre de consultants externes dans les trois départements.

En outre, selon la Cour des comptes, le SPF Justice ne remplit pas les fonctions administratives de base -pensez à la RH, au budget ou à la politique d’achat. «Le manque d’outils de gestion indique que le SPF Justice ne maîtrise pas encore pleinement les principes de base d’une bonne gestion administrative. Il n’est pas non plus certain que le processus de numérisation soit durable ou que les projets aboutissent à quoi que ce soit.» La Cour des comptes a formulé une série de recommandations à partir de ses constatations. Par exemple, la transformation numérique de la justice devrait faire l’objet d’une stratégie unique et cohérente. Il devrait également y avoir des processus de gouvernance qui améliorent la coopération et définissent clairement les rôles et les responsabilités. Des recommandations portent également sur la gestion interne des risques liés à la numérisation. Il s’agit notamment des risques budgétaires, des risques d’externalisation- qui nécessitent une stratégie d’externalisation- vers des consultants et du risque de fraude. En outre, les fonctions de soutien administratif doivent être renforcées.

Enfin, la Cour des comptes préconise une politique fédérale de numérisation qui rationalise la stratégie des services fédéraux. Le SPF Politique et Appui (BOSA) «doit assumer pleinement ses missions en matière de numérisation», notamment en termes de centralisation et de coordination des problématiques communes et des synergies. BOSA «ne semble pas être le partenaire qui soutient de manière adéquate la transformation numérique» de la Justice et des autres départements, souligne le rapport. Entre autres choses, BOSA conteste plusieurs déterminations, souligne ses réalisations ou note qu’il manque de ressources, ajoute la Cour des comptes. Certains de ces éléments étaient déjà connus lorsqu’une présentation confidentielle de la Cour des comptes a été divulguée aux médias en mai de l’année dernière.

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