Didier Reynders, commissaire européen à la justice, en charge notamment de l’évaluation de l’état de droit dans les États membres. © Hans Lucas via AFP

Justice, lutte anti-corruption, intégrité et transparence: les points d’Etat de droit à améliorer en Belgique selon la Commission européenne

Clément Boileau
Clément Boileau Journaliste

Le cinquième rapport annuel sur l’Etat de droit dans l’Union vient de paraître. Si la Commission européenne note quelques progrès en Belgique, des «préoccupations» demeurent, en particulier sur le plan judiciaire.

Le voici, le voilà: le cinquième rapport annuel sur l’état de droit dans l’Union rédigé par la Commission européenne, qui pointe les progrès — ou reculs — des États membres en la matière, qu’il s’agisse de justice, de démocratie, de lutte contre la corruption ou de transparence.

Pour la Belgique, le principal point de préoccupation de la Commission concerne clairement le judiciaire, malgré des «progrès supplémentaires dans les efforts visant à fournir des ressources humaines et financières adéquates». Sans surprise, c’est surtout le «le non-respect par le gouvernement des décisions de la Cour européenne des droits de l’homme et des tribunaux nationaux, y compris un jugement définitif d’une cour de dernier ressort», qui «suscite de graves préoccupations», écrit la Commission. On pense évidemment aux décisions de justice concernant le droit d’asile, que le gouvernement belge refuse d’exécuter, quitte à payer des amendes salées.

Toujours sur le plan judiciaire, la Commission a certes noté des améliorations concernant les droits de la défense (NDLR : la Belgique a été assignée devant la CJUE pour ses carences en la matière), «les directives interdisant l’enregistrement des réunions entre avocats et clients [ayant] renforcé la confidentialité entre avocat et client». Pourtant, «il n’est toujours pas possible de dresser un tableau de l’efficacité de la justice, en raison d’un manque persistant de données sur les procédures judiciaires, alors que des efforts sont déployés pour cartographier les arriérés judiciaires»… Bref, il est donc demandé à la Belgique de «poursuivre les efforts visant à remédier aux insuffisances structurelles du système judiciaire», tout en améliorant «l’efficacité de la justice, en particulier pour réduire la durée des procédures». Une position au diapason des demandes des acteurs du judiciaire, qui veulent une rallonge de 250 millions d’euros annuels pour assurer le bon fonctionnement de l’institution souvent décrite au bord de l’implosion.

Lacunes en matière d’intégrité

La lutte anti-corruption constitue également un point d’attention saillant du rapport rendu par la Commission, malgré des «stratégies et plans d’action pertinents», par exemple les «mesures prises pour lutter contre la corruption liée aux groupes de criminalité organisée et au trafic de drogue.» «Une révision législative du code de procédure pénale pourrait avoir un impact positif sur la lutte contre la corruption», explicite la Commission, notant que «le Bureau central pour la répression de la corruption et les services du ministère public continuent à traiter les affaires de corruption de haut niveau».

«Il reste d’importantes lacunes dans la politique sur l’intégrité, notamment en ce qui concerne les ‘portes tournantes’ (NDLR: le pantouflage, qui désigne le passage de fonctionnaires ou responsables politiques de la sphère publique à la sphère privée et inversement), et les règles relatives aux cadeaux et avantages, particulièrement pour les députés.

Extrait du rapport de la Commission européenne sur l’état de droit (Rule of law).

Mais le manque de ressources, comprend-on, rend «difficiles […] l’enquête et la poursuite des affaires de corruption transnationale». Et, malgré «l’extension du Code de conduite global pour les titulaires de charges publiques fédérales à tous les membres des cabinets privés ministériels», «il reste d’importantes lacunes dans la politique sur l’intégrité, notamment en ce qui concerne les portes tournantes (NDLR: le pantouflage, qui désigne le passage de la sphère publique à la sphère privée et inversement), et les règles relatives aux cadeaux et avantages, particulièrement pour les députés. Des lacunes existent en ce qui concerne la transparence des déclarations d’actifs», souligne également la Commission.

Transparence: effort demandé

Autre point d’attention notable du rapport, les questions de transparence, et singulièrement la transparence administrative, qui a fait l’objet d’une loi adoptée en toute fin de législature. Encore insuffisant, selon la Commission, qui juge que «les nouvelles propositions n’accordent pas de pouvoirs décisionnels à la Commission pour l’accès aux documents administratifs (CADA)», en tout cas au niveau fédéral.

Last but not least, la Commission s’inquiète de «la sécurité des journalistes», laquelle «continue de faire face à des défis, avec des études et des incidents récents mettant en évidence une tendance inquiétante de harcèlement en ligne».

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