Intempéries : « Les extrêmes vont devenir plus extrêmes »
Depuis mardi, une grande partie de la Wallonie connaît des inondations importantes. Selon des chercheurs en climatologie, elles sont liées au dérèglement climatique et vont se répéter de plus en plus souvent dans le futur. Les villes ne sont pas aménagées pour ces conditions.
« En 1990, le premier rapport du GIEC ne disait pas moins que ceci : selon des prévisions météorologiques, l’effet de serre accentuera les deux extrêmes hydrologiques. C’est-à-dire qu’il y aura plus d’épisodes de pluies extrêmement abondantes et plus de sécheresses prolongées », s’exprimait ce matin Jean-Pascal van Ypersele, ex-vice-président du GIEC et professeur de climatologie à l’UC Louvain, sur les ondes de DH Radio.
Claire Godet, doctorante en climatologie à l’Université d’Oslo, confirme également l’influence de l’effet de serre : « la température augmente, donc, avec la fonte des glaces, le niveau de la mer va augmenter, puis les tempêtes vont augmenter. C’est une chaîne sans fin, et les extrêmes, donc les inondations mais aussi les sécheresses, vont devenir de plus en plus extrêmes. » A terme, l’être humain ne serait physiquement pas fait pour survivre à ces conditions extrêmes.
Jean-Pascal van Ypersele voit également les inondations comme un résultat de la gestion des cours d’eau. « Il faut également revoir comment les rivières sont gérées. Car nous avons bétonné beaucoup trop de rives. Les lits des rivières sont bien trop imperméables et cela rend l’écoulement de l’eau beaucoup plus rapide. »
Une catastrophe prévisible ?
Sur la carte des zones inondables en Wallonie l’on remarque que Spa, Theux, Pepinster, les lieux actuellement les plus gravement touchés, ont leur centre-ville en zone inondable, même si les cours d’eau ne sortent que rarement de leur lit.
« Mais les zones inondables sont beaucoup plus larges que ce qu’on pouvait penser. Le centre de Liège commence à être sous eau, jamais on ne se serait dit que c’était une zone inondable. Il est compliqué d’imaginer jusqu’où l’eau va pouvoir aller », analyse Claire Godet.
Hélène Ancion, spécialiste en urbanisme et aménagement du territoire, a rendu un rapport pour la Fédération Inter-Enwironnement Wallonie, intitulé « Stop Béton », où elle préconise que la construction de bâtiments sur les crêtes et les versants, et dans des zones vulnérables augmentent le risque d’inondations et de coulées de boue. L’agriculture y joue un rôle également, avec l’absence de fossés et de haies, avec la monoculture et l’aplatissment du terrain.
Comment prévenir ces crues
« Ici c’est une situation particulière parce que les ruisseaux débordent. C’est un phénomène rare qui n’arrive que tous les 50 ans, donc c’est difficile à prédire », analyse le porte-parole du service public wallon Mobilité et Infrastructure Thierry Toussaint.
Pour Claire Godet, il faut revoir la manière d’urbaniser les villes. Trop de béton provoque des crues, car l’eau ne peut pas rentrer dans la terre. « Reconstruire ailleurs est compliqué aussi, car il ne faut pas aller rebétonner à ce nouvel endroit sinon l’histoire se répète. Construire des buildings avec des rez-de-chaussée inondables ne semble pas souhaitable pour les gens non plus ».
Les différents barrages servent à retenir les masses d’eau et à faire tampon. Mais avec les fortes pluies, celui d’Eupen est par exemple arrivé à saturation, et l’eau est versée dans la Vesdre. Celui de la Gileppe, jeudi matin, est encore en situation normale. « Nous réfléchissons à agrandir et réhausser le barrage de Nisramont », prévoit Serge Toussaint, « mais pour l’instant pas d’autres plans de constructions de barrages et de retenues d’eau ne sont prévus ».
Le SPW Mobilité et Infrastructure gère 330 bassins d’orages, le long des routes, qui servent aussi à faire tampon. Le service public inspecte et nettoie régulièrement les évacuations et égouts le long des routes, car des déchets, feuilles mortes, bouts de bois peuvent s’y amasser et les boucher.
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