Inondations : si ça se reproduisait, la Protection civile et la Défense ne seraient pas forcément plus efficaces
Rapidement critiquées après les inondations de juillet dernier, la Défense et la Protection civile en ont-elles tiré des leçons ? Si la réflexion est en cours, les moyens matériel, eux, restent limités quand les éléments se déchaînent.
Des habitants reclus sur leur toit pendant 48 heures. Un centre d’appel débordé. Des équipements maritimes et aériens inopérants au plus fort des inondations de juillet 2021. Un manque criant d’effectifs. En juillet dernier, les critiques ont rapidement fusé à propos des moyens alloués à l’armée et à la Protection civile, intervenant en deuxième ligne après les services de secours. En commission réunie, le 5 octobre dernier, la ministre de la Défense, Ludivine Dedonder (PS), évoquait les conséquences du «choix opéré lors de l’écriture de la vision stratégique 2016». Concernant la Protection civile, c’est principalement la réforme mise en œuvre en janvier 2019 qui était pointée du doigt. Celle-ci avait conduit, entre autres, à la fermeture de quatre de ses six casernes.
« Si nous avions eu plus de moyens matériels, rien ne dit qu’ils auraient pu intervenir. »
Les leçons de la Défense
Le 17 juin dernier, le gouvernement a approuvé les actualisations de la loi de programmation militaire et de la vision stratégique de la Défense. Baptisé Star (pour sécurité, technologie, ambition, résilience), le nouveau plan doit porter le budget annuel de la Défense à 6,9 milliards d’euros en 2030, contre 4,2 milliards à l’heure actuelle. Il entend aussi remédier à l’écueil formulé sur les capacités duales. «Je considère que la mission d’aide à la société est placée sur un même pied que les opérations extérieures, précise Ludivine Dedonder. Toute l’architecture du document revient systématiquement sur une analyse du caractère “à double usage” des capacités à venir, c’est-à-dire une utilité purement liée à la conduite des opérations militaires, mais aussi celle liée au soutien à la nation.» Il faudra toutefois du temps avant que cette réforme, prévoyant des moyens logistiques et de génie, soit perceptible sur le terrain.
Les leçons de la Protection civile
«Si nous avions eu plus de moyens, rien ne dit qu’ils auraient pu intervenir», affirme le colonel Nicolas Tuts, chef d’unité de la Protection civile de Crisnée. «Nous sommes sûrs d’avoir acquis un matériel performant, basé sur des standards européens, ajoute Cédric Erken, directeur général de la sécurité civile. Les bateaux plus puissants sont conçus pour naviguer sur des fleuves. Or, dans certains endroits, il y avait un très gros débit, mais pas assez de hauteur d’eau.» Et les hélicoptères français et italiens sollicités dans le cadre de l’assistance européenne n’ont pas pu voler davantage, vu la faible altitude de la masse nuageuse. A conditions égales, si un tel événement se reproduisait, le matériel maritime et aérien serait donc tout aussi peu opérant.
En revanche, Nicolas Tuts plaide pour un monitoring en temps réel de l’ensemble des moyens activables en cas d’événements exceptionnels. «Depuis que les zones de secours ont acquis une certaine autonomie, nous n’avons plus de vue globale.» Comme le rappelle Cédric Erken, «nous avons tout de même identifié l’acquisition de matériel en plus et la formation de nouvelles personnes. Nous avons également obtenu un financement supplémentaire de la part de la ministre de l’Intérieur (NDLR: Annelies Verlinden, CD&V).»
Une enquête sur la réforme de la protection civile est en cours, ainsi qu’une étude sur la gestion des inondations, dont les résultats sont attendus pour la fin de l’année. Un groupe d’experts sur la planification d’urgence et la gestion de crise a par ailleurs été mis en place. «Avec ces trois analyses, on y verra plus clair sur les constats, les recommandations et les mises en action», conclut Nicolas Tuts.
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